L’option était dans tous les esprits, à la fois lointaine comme une vague menace et concrète pour certains. Source d’espoir pour les perdants et d’inquiétude pour ceux qui ont été élus sur un coup du sort. « Le seul débat qui domine n’est pas de savoir s’il y aura une dissolution, mais quand elle aura lieu », affirme un ténor du palais Bourbon. Et c’est arrivé plus tôt que prévu puisque, ce 29 septembre, le ministre Olivier Dussopt a confirmé les bruits qui circulaient : en cas de vote d’une motion de censure de son gouvernement, Emmanuel Macron dissoudra l’Assemblée nationale. La veille encore, le député Renaissance Karl Olive avertissait un parterre de journalistes : « Ne sous-estimez surtout pas la volonté d’Emmanuel Macron à dissoudre. »
Une sortie qui donne un éclairage nouveau à la réception à l’Élysée des candidats de la majorité battus aux élections législatives. Comme un avertissement faisant écho aux principaux reproches que Macron fait à ses troupes : ne pas être en campagne permanente. « Le Président a parfaitement acté la réalité des résultats des élections législatives », analyse Karl Olive. Pour ce député des Yvelines, proche du chef de l’État, « on est davantage dans un système parlementaire avec des logiques de coalition ». Pour l’heure, l’avertissement d’Emmanuel Macron provoque les moqueries de l’opposition : « Chiche », s’amuse Marine Le Pen. Du coté de la NUPES, on joue la carte de la bravade. « Quand vous voulez : la NUPES est prête à vous défaire ! » cingle la présidente du groupe de LFI Mathilde Panot, sur Twitter. Autrement, peu de réactions émanant d’autres parlementaires du groupe.
Les véritables raisons
Du côté LR, on est singulièrement plus silencieux. Le silence des personnes visées ? Hormis Aurélien Pradié : « Le prince capricieux, c’est le prince impuissant », on peine à trouver une réaction. Celle de la sénatrice UDI Nathalie Goulet est un peu plus complète : « Plutôt que de menacer de dissolution, Emmanuel Macron pourrait déjà changer de méthode de travail comme il s’y était engagé pendant la campagne électorale et écouter les parlementaires, ce chantage n’est pas convenable », tweete la sénatrice normande. Et pour cause : le RN et la NUPES ne sont pas concernés par cette menace non voilée émanant de l’Élysée. « Emmanuel Macron souffre d’une autorité dégradée et d’un sentiment de "final shutdown" », affirme un membre de son entourage. Dans cette optique, le message politique serait simple : envoyer un sérieux coup de semonce à ses fluctuants alliés du centre et à la droite LR : si une dissolution arrive, vous serez balayés au profit des extrêmes. « Les premières victimes de la dissolution seraient la NUPES qui se flingue toute seule depuis six mois et les opposants modérés », analyse Karl Olive. Par élimination, la dissolution avantagerait surtout la majorité présidentielle et le RN. Le « chiche » de Marine Le Pen n’était pas un mot vain.
« Macron est très agacé par certaines de ses troupes qui oublient à qui elles doivent leur carrière », analyse un membre de la Macronie. De quoi convaincre que cette menace de dissolution est surtout adressée à ses propres troupes. Miser sur l’attrait de la gamelle et la peur du loup, on est en plein dans La Fontaine. « Ne faut-il que délibérer, la cour en conseillers foisonne ; Est-il besoin d’exécuter, l’on ne rencontre plus personne », disait le fabuliste. En Macronie, on entre dans le dur.