THIERRY BOUCLIER. La violence de la gauche remonte à la Révolution française qui fut un phénomène essentiellement parisien au départ. De ce point de vue, et en raison de la centralisation historique de la France, tout est effectivement parti de la capitale pour se répandre ensuite à travers l’ensemble du territoire. Toutefois, il existe une violence spécifique à Toulouse, et dans une moindre mesure, à Bordeaux. Celle-ci trouve son origine dans la guerre civile espagnole qui a également été matrice des violences de la gauche. À l’issue de cette guerre, de nombreux Espagnols, toutes obédiences de gauche confondues, ont gagné la France en emportant avec eux les méthodes violentes et radicales qu’ils employaient au-delà des Pyrénées. Cet héritage, plus de quatre-vingts ans plus tard, est toujours très présent dans la région du sud-ouest.
ÉLÉMENTS : Présentez-nous le Cercle des Capitouls ? Quels sont ces capitouls sous le patronage duquel vous vous placez ? À travers ce cercle, cherchez-vous à renouer avec l’identité toulousaine et plus largement occitane ? Quelle est la mission du Cercle des Capitouls ?
NICOLAS BOUTIN. Le Cercle des Capitouls a été fondé en 2016, à une époque où Toulouse a connu un certain essor parmi les militants de droite. Nous sommes parvenus à lancer des débats sur des thèmes variés et à faire vivre ce vivier de sympathisants, en faisant le choix de transformer nos différentes appartenances politiques en une force commune. Pas de sectarisme. Venus d’horizons variés, toutes les générations se retrouvent lors de nos cercles et peuvent ainsi s’enrichir mutuellement. Le Cercle des Capitouls est le point de rencontre de toutes ces expériences ; c’est un réseau qui n’aspire qu’à s’agrandir.
Notre nom fait référence aux magistrats qui ont conduit la ville du XIIe siècle à la Révolution française. Il s’agit d’un clin d’œil. Les relations avec le royaume de France ont souvent été tumultueuses, ici, mais les capitouls étaient le trait d’union entre d’une part nos spécificités locales et d’autre part la fidélité au roi de France. Sans entrer dans un long débat, l’identité occitane est aujourd’hui dévoyée par la gauche internationaliste, dans le seul but de cracher sur l’histoire de France. Nous essayons d’inciter notre public à s’engager politiquement au niveau local, sous quelque forme que ce soit, à s’enraciner, à habiter au sens fort un territoire, dans un monde environnant où la mobilité est devenue la règle.
À travers ces événements, auxquels nous nous efforçons d’apporter qualité, originalité et convivialité, nous voulons sortir des sentiers battus et faire découvrir à notre public une nouvelle génération d’intellectuels, de militants, d’écrivains ou de structures qui ont le mérite d’effectuer un vrai travail de terrain, ancré dans le réel, enraciné et créatif.
ÉLÉMENTS : Pour le sociologue allemand Max Weber, l’État a le monopole de la violence physique légitime. Vous, vous montrez que la gauche a su conférer une forme de légitimité à son recours à la violence. De quelle façon ? Et parallèlement elle a su diaboliser toute manifestation de violence à droite. Comment ? Cela ne suppose-t-il pas une hégémonie dans le champ culturel ? Qui a gagné la bataille culturelle ? La droite a-t-elle une chance de renverser ce rapport de forces ?
THIERRY BOUCLIER. La gauche est arrivée à ses fins par un double phénomène. D’une part, elle a réussi à imposer l’idée qu’elle représente le camp du bien et du progrès et que la droite symbolise celui du mal et du passé. Partant de ce postulat, toute violence venant de sa part est acceptable et normale, tandis que celle pouvant trouver son origine à droite est nécessairement insupportable et condamnable. De la classe politique à la caste médiatique en passant par le monde judiciaire, chacun a intériorisé ce double axiome. La récente actualité l’a encore montré, avec les violences des antifas lors d’un meeting de Jordan Bardella à Bruz, près de Rennes, le 25 septembre dernier, ou au cours des déprédations commises par cette même mouvance, en plein cœur de Rennes, dans la nuit du 30 septembre. Ces violences extrêmes n’ont entraîné aucune condamnation unanime. Je vous laisse imaginer l’ampleur des réactions si les mêmes exactions avaient été commises par l’ultra-droite ! Tant que la droite n’aura pas mis un terme à son complexe, elle continuera de subir les assauts de la gauche. Si elle veut un jour reprendre le dessus, elle devra avoir le courage d’affronter la gauche sur le terrain des idées et de la mettre face à son bilan qui n’est pas glorieux.
ÉLÉMENTS : Toulouse n’est pas la seule capitale régionale à avoir ses « antifas », mais ils y sont particulièrement actifs. À quoi cela tient-il ? À une histoire spécifique ? Quelle forme prend leur activisme ? Quelle réponse lui opposer ? Le Cercle des Capitouls en est-une ?
NICOLAS BOUTIN. Toulouse a la spécificité de placer Jean-Luc Mélenchon en tête lors des élections nationales, mais d’avoir un maire « centre-droit » depuis près d’un demi-siècle, hormis six ans de socialisme ! Ce maire PS, Pierre Cohen, avait appelé à « éradiquer le FN » en 2012, notamment « par le rapport de force physique ». Une vraie illustration de la porosité entre une certaine gauche « présentable » et l’ultragauche violente. Outre le fait que nous avons hérité des réfugiés espagnols, la CNT anarcho-syndicaliste (Confédération nationale du travail), le SCALP (Sections carrément anti-Le Pen) et Action directe ont trouvé en Toulouse une base qui s’explique par la géographie de la ville. Aujourd’hui, la menace antifas demeure, mais les effectifs ont chuté, du fait de divisions internes et d’un manque de visibilité depuis plusieurs années. On les aperçoit dans la formation d’émeutes autour des manifestations, dans les réunions interdites aux Blancs à la fac du Mirail, dans les squats où ils laissent à la rue des retraités…
Quant à la réponse à apporter, elle relève de chacun de nous. Soyons ce que nous sommes, sans avoir besoin de s’excuser, de se cacher ou de se justifier, il suffit de convaincre. Le Cercle des Capitouls a été une des réponses dans le sens où nous avons pris à revers les injonctions de ne pas organiser de débats à Toulouse, de ne pas avoir pignon sur rue, de ne pas exister. C’est raté, nous sommes bel et bien là. Venez à notre rencontre le 13 octobre prochain.
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La Gauche ou le monopole de la violence17,50€