Deux mots ont servi de repoussoirs protecteurs à l’oligarchie mondialiste qui règne en Occident, et particulièrement en France avec la macronie : populisme pour fustiger toute attitude valorisant le “peuple d’en-bas”, ses émotions et ses protestations, son enracinement provincial, son conservatisme sociétal, ses résistances face à la pensée unique écologique, immigrationniste, de plus en plus pénalisante pour la population d’un pays en déclin ; complotisme, pour dénoncer toute tentative de trouver une cohérence dans la marche du monde au sein de puissances occultes organisées en réseaux d’influence médiatique et politique afin d’imposer sournoisement leur vision de l’avenir.
Ces garde-fous ont montré leur efficacité en rejetant populistes et complotistes confondus hors des grands médias, dans la forêt luxuriante et aussi le marécage empoisonné d’internet où le meilleur peut être écarté avec dédain en raison de son voisinage avec le pire. Une pensée dominante s’impose donc jusqu’à conduire journalistes et politiques à s’autocensurer dés que l’étiquette stigmatisante risque de leur être collée. Ce processus induit une double conséquence : d’abord, alors que notre société française se morcelle en communautés, une sorte de brouillard l’enveloppe, une purée de pois idéologique qui oblige à penser comme tout le monde, ou tout au moins à le laisser croire quand on s’exprime, avec pour effet de s’autocensurer ou de proclamer sa bien-pensance à l’exclusion de toute pensée hérétique ; ensuite, toute vision globale et cohérente devient suspecte, se trouve psychiatrisée, afin de ne retenir dans les informations et au sein des débats, que le court terme d’un problème à la fois, afin de ne lui reconnaître qu’une cause immédiate et une solution circonscrite.
La crise des carburants que les Français subissent avec la pénurie de ceux-ci et la hausse de leurs prix qui l’avait précédée, et qui a pu parfois en être accrue, est un exemple de cette focalisation. Au maximum de la concentration de l’objectif, on a un syndicat marxiste, la CGT, qui rêve toujours du “grand soir” et de la grève générale, et qui tente de se refaire une santé en menant une grève dure alors même qu’il est minoritaire. Les Français moyennement favorables à la réquisition des grévistes désapprouvent à 71% la poursuite du mouvement. Si la colère par procuration de la grève avait répondu au sentiment de beaucoup d’entre eux, ce dernier a fait place au refus de voir la vie quotidienne de la majorité prise en otage par des extrémistes. Mais on voit bien que ce double mouvement contradictoire ne prend son sens que si l’on dépasse le champ étroit des raffineries et des stations-service. En amont de la possibilité physique d’acheter du carburant, il y avait la capacité de le faire dans le cadre d’une hausse des prix, et d’une diminution du pouvoir d’achat.
La guerre en Ukraine a été un exutoire opportun pour expliquer la hausse des produits énergétiques. La “croisade” démocratique au profit de l’Ukraine et les sanctions contre la Russie décidées par les “occidentaux” ont entraîné une rareté relative et un renchérissement des produits : le prix à payer pour défendre nos “valeurs”, selon Macron. Mais, si le bon peuple est invité à ce sacrifice pour la bonne cause, il se trouve que la cible des sanctions, la Russie augmente ses revenus et que les sociétés pétrolières font des super-profits. Il y a dans ce paradoxe de quoi susciter l’étonnement, puis la colère. Celle-ci monte d’abord contre les “profiteurs de guerre”, exige que l’on taxe les profits excessifs et appelle à une plus juste répartition des richesses. Une entreprise française concentre les revendications, TotalEnergies qui, en France, verse des rémunérations pourtant enviables à ses salariés, intéressés par ailleurs aux résultats de l’entreprise par l’actionnariat. Elle a offert aussi une ristourne appréciable à ses clients, et proposé une hausse de 7% de ses salaires ainsi qu’une prime de plusieurs milliers d’Euros. L’oeil rivé sur le bras de fer entre TotalEnergies et la CGT, les Français oublient que cette entreprise réalise ses bénéfices dans le monde beaucoup plus qu’en France, et que la vindicte à son encontre innocente de fait des entreprises étrangères dont les profits sont plus importants. Il semble difficile aux Français de comprendre que saisir une opportunité et servir d’abord les actionnaires, sans les capitaux desquels l’entreprise ne se développerait pas, constituent des mesures de gestion intelligente, alors que l’augmentation pérenne des salaires n’est pas sans risque si la conjoncture devient défavorable.
Néanmoins, cette concentration des critiques sur l’entreprise et son dirigeant fait oublier que les causes de la hausse des prix se trouve ailleurs que dans la spéculation : elle se situe d’abord en amont de la guerre dans la fuite en avant pratiquée de tout temps par la Réserve Fédérale qui produit la monnaie de la puissance américaine, que l’Europe, donc la BCE, faisant fi des réticences allemandes, a imitée jusqu’à la caricature offerte par Macron et son “quoi qu’il en coûte” destiné à couvrir par les déficits et la dette le coût faramineux d’un confinement démesuré par rapport au risque sanitaire du covid. Lorsqu’un pays dispose d’une quantité de monnaie et de facilités de crédits qui dépassent largement sa production de biens et de services, il crée un appel d’air pour les importations, ce qui explique l’état déplorable de notre commerce extérieur, puis il subit un rééquilibrage de l’offre et de la demande en fonction des liquidités disponibles, c’est-à-dire qu’il génère de l’inflation. La politique macronienne lors de la pandémie a été de bout en bout irresponsable : après avoir privé le pays des produits nécessaires, elle a instrumentalisé la peur pour installer un climat de soumission, puis a présenté les vaccins, américains notamment, comme la solution incontournable. Chacun aura remarqué la convergence entre Mme Von der Layen et M. Macron dans cette stratégie, voire cette manipulation. La guerre en Ukraine est le second épisode de ce scénario qui voit les peuples européens entraînés dans un conflit contraire à leurs intérêts par une “élite” paradoxale qui multiplie les erreurs à un point tel qu’on s’interroge seulement sur les parts d’incompétence et de trahison volontaire qui entrent dans la politique suivie. ( à suivre)