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Enfant tué à Nîmes : des responsabilités politiques et judiciaires manifestes

Dans la nuit du 21 au 22 août, un enfant de dix ans est mort à cause d’une balle d’arme à feu. Le procureur de la République en charge de cette affaire évoque un possible règlement de comptes sur fond de trafic de drogue.

Les lieux communs vomiront alors des bouches souvent plus bavardes que responsables. Vous entendrez « le trafic de stupéfiants gangrène les quartiers » ou encore « notre priorité est la lutte contre les trafiquants ». Aussi, le ministre de l’Intérieur viendra s’émouvoir en présentant tout de même ses « exceptionnels » résultats en la matière. Dans quelques semaines, voire quelques jours, le flux de l’information discontinue produira ses effets les plus pervers : l’oubli de l’essentiel.

Une loi pénale extrêmement sévère

Un enfant est mort parce que des territoires entiers sont gérés par les trafiquants de drogue en toute impunité politique et judiciaire. Pourtant, disons-le clairement, la loi pénale en la matière est extrêmement sévère. Le chef d’un trafic de stupéfiants encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Pour la production ou la fabrication illicites de stupéfiants, le risque de principe est de 20t ans. Pour l’importation ou l’exportation, comptez 10 ans. Enfin, pour le plus courant, c’est-à-dire le transport, la détention, l’offre, la cession, l’acquisition ou l’emploi, la loi prévoit 10 années d’emprisonnement. Il ne s’agit pas d’égrener le chapelet de toutes les infractions en la matière, mais le Code pénal contient une section dédiée à la répression du trafic de stupéfiant. On ne peut pas expliquer que le législateur est laxiste ou qu’il faudrait de nouvelles dispositions. En réalité, celles-là suffisent.

Mais comme cela ne fonctionne pas, certains politiques ou autres, dits philosophes, prônent encore la dépénalisation ou la légalisation encadrée, comme le proposait la députée de la majorité Caroline Janvier, début 2021. Leur solution se résumerait ainsi : « On came gratis. » Resterait seulement à définir l’indice « Nutriscore » de la cocaïne…

Cet argument sans fin est d’une mauvaise foi considérable. La dépénalisation n’asséchera pas les réseaux de la même manière qu’on peut le constater pour le tabac. Il n’y a qu’à faire un tour à la sortie du métro, porte de la Chapelle, pour s’en rendre compte.

La problématique se situe manifestement ailleurs. En matière politique, malgré tous les efforts de communication, tant que les frontières ne seront pas mieux surveillées, les stupéfiants continueront à inonder les rues du pays.

Distinguer les petits et grands trafiquants ?

En matière de justice, il a été analysé (notamment par Dominique Duprez, chercheur au CNRS, spécialiste des questions liées au trafic de drogue, qui en parle régulièrement) qu’en fonction du flux judiciaire à traiter, il existe des inégalités entre les tribunaux. Autrement dit, pour la détention de stupéfiants, il y a moins de chance d’être poursuivi en Seine-Saint-Denis qu’ailleurs.

En outre - et cela est fondamental -, la pratique judiciaire, pour moduler les peines, a ajouté un critère qui n’existe pas dans la loi. Ce critère est très simple : c’est celui de la quantité de drogue détenue. Autrement dit, plus la quantité est importante, plus le risque pénal est fort. On peut parfaitement comprendre ce raisonnement, mais il est juridiquement infondé.

La loi ne fait aucune distinction entre les petits trafiquants et les grands trafiquants, entre le petit trafic et le grand trafic. La bataille des chiffres, lancée sous Sarkozy, autorise de dire si la lutte est efficace ou non. Mais c’est un trompe-l’œil permanent. Il faut lutter contre tous les trafics, grands et petits.

Aujourd’hui, si l’on fait passer le « petit trafiquant » en comparution immédiate, il sera condamné à des peines aménageables parce qu’on le considère comme moins responsable. Mais le bracelet électronique n’empêche pas de continuer à dealer. Or, les autres « petits dealers », ceux qui ne se sont pas encore fait attraper, comment évaluent-ils le risque ? Nécessairement en fonction de la peine de l’autre. Si son risque pénal est faible, il poursuivra son pari capitalistique souterrain jusqu’à ce que celui du quartier d’à côté en veuille davantage. Un autre enfant de dix ans en fera alors peut-être encore les frais.

Me Alain Belot

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