« L'euthanasie » des enfants débute en 1938 ou 1939 avec le cas de « l'enfant K. ». Les parents d'un nouveau-né handicapé tentent, début 1939, d'obtenir l'autorisation de « Gnadentod », (en allemand, mort miséricordieuse) auprès de la chancellerie du Führer. Auparavant, le directeur de l'hôpital universitaire pédiatrique de Leipzig, Werner Catel, avait reçu le 23 mai 1939 les parents de l'enfant et s’était prononcé sur ses chances de survie. Il leur avait conseillé la mort de l'enfant. Il fut donc décidé en plus haut lieu qu'il était tout naturel, dans un institut pédiatrique, et dans certaines circonstances, qu'une euthanasie puisse être réalisée en pareil cas par les médecins eux-mêmes, sans que l'on n'en parle plus avant.
Cette première « euthanasie » d'enfant entraîne une accélération décisive de la mise en œuvre de la doctrine « d'hygiène de la race », qui commence avec la loi allemande sur la stérilisation forcée du 14 juillet 1933 et mène par étapes à « l'euthanasie » d'enfants handicapés puis d'adultes.
La « Commission du Reich pour l'enregistrement scientifique des souffrances héréditaires et congénitales graves » est créée trois semaines après ce premier cas « d'euthanasie », et se donne comme première mission concrète le recensement des victimes potentielles. Dans un premier temps il n'est obligatoire de déclarer que les enfants concernés par la circulaire jusqu'à leurs trois ans révolus. Les formulaires prescrits donnent l'impression que le recensement poursuit le but d'un traitement thérapeutique et d'un accompagnement spécialisés.
Trois experts sont nommés par la commission pour juger de 20 000 formulaires sur les 100 000 reçus (80 000 ne justifient pas un accueil en « établissement pédiatrique spécialisé »). Ils se sont proposés comme experts sans aucune forme de contrainte ; deux soutenant l’euthanasie par enthousiasme et un par conviction !
Le verdict de vie ou de mort est déterminé à la seule lecture des formulaires, sans que les experts n'aient accès aux documents médicaux ou vu les enfants. Les experts apposent au formulaire un « + » s'ils décident que l'enfant relève de l'euthanasie, ou un « - » dans le cas contraire. Un critère décisif pour une évaluation « positive » du dossier est le pronostic sur la capacité de travail et d'apprentissage de l'enfant.
Les enfants sont alors placés dans un des 37 « établissements pédiatriques » chargés de les euthanasier (Le premier centre fut ouvert en octobre 1939). Les parents sont sciemment trompés sur le but véritable de l'internement, qui leur est présenté comme une prise en charge spécifique de leur enfant dans un cadre thérapeutique spécialisé. On ne recourt pas tout d'abord à des mesures contraignantes, mais dès septembre 1941 des parents qui refusent l'internement de leurs enfants sont menacés de perdre leur droit de garde.
L'âge des enfants concernés par le programme est élevé à 16 ans au premier semestre 1941 afin d'éviter que des adolescents handicapés ne soient gazés dans le cadre de l'Aktion T4. Le nombre de personnes concernées s'étend ainsi toujours plus. En sus des handicapés psychiques et physiques, le programme intègre également les soi-disant psychopathes.
En raison du peu de connaissances à l'époque, il est difficile de déterminer quelles maladies et handicaps avaient les victimes. D'après l'analyse de 789 dossiers d'enfants tués, issus d'un centre de réhabilitation à Vienne en Autriche, montre que la plupart étaient diagnostiqués avec une schizophrénie infantile, de l'« idiotie », ou de l'épilepsie. Il est probable qu'une partie d'entre eux aient été autistes, ces trois diagnostics étant couramment posés aux enfants autistes à l'époque. De plus, les enfants non-verbaux ou caractériels étaient choisis en priorité, au motif qu'ils demandaient une attention plus importante.
Les enfants internés pour lesquels l'autorisation de « traitement » a été délivrée ne sont pas en général tués immédiatement, mais sont fréquemment et pendant plusieurs mois des cobayes de l'expérimentation scientifique. Des installations de recherche sont également créées au sein même de plusieurs des « établissements pédiatriques spécialisés » et des essais cliniques comme des recherches anatomiques y sont pratiquées.
Les enfants sont tués par ingestions échelonnées et sur-dosées de barbituriques comme le phénobarbital ou le véronal, voire de morphine, mélangés à la nourriture des patients ou vaporisés au prétexte d'une protection contre le typhus. Ces overdoses conduisent à des paralysies respiratoires, et à l'arrêt du fonctionnement du système digestif et rénal. Il est ainsi toujours possible d'invoquer une cause apparemment naturelle de décès. La sous-nutrition et le séjour en chambres très peu chauffées accroît les effets des ingestions médicamenteuses tout en préservant l'apparence d'un décès naturel et contingent.
Le nombre des victimes de « l'euthanasie » des enfants est estimé à au moins 5 000 personnes.
L'euthanasie des enfants fut un programme dont on peut supposer qu'il n'était pas prévu pour la seule durée de la guerre, mais plutôt comme une mesure permanente visant l'anéantissement des « inutiles ».
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