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L’immigration responsable de la pénurie de profs selon un rapport officiel

L’immigration responsable de la pénurie de profs selon un rapport officiel

La nouvelle ministre de l’Éducation nationale, Amélie Oudéa-Castéra, a expliqué avoir retiré ses fils de l’école publique parce qu’il manquait des heures de professeurs. Mais pourquoi donc ? La réponse avec ce texte publié par Polémia il y a près de 10 ans.
Polémia

« Comme aucun professeur ne veut être muté dans les banlieues de l’immigration… »

L’Éducation nationale a de plus en plus de mal à recruter des professeurs de collège. Au dernier concours du CAPES (printemps 2014), 1 592 postes étaient à pourvoir en mathématiques, 793 ont pu être pourvus ; en lettres classiques, il y a eu 156 admissibles pour 300 postes à pourvoir. Les causes réelles de cette désaffection sont simples : comme aucun professeur ne veut être muté dans les banlieues de l’immigration, on y affecte les nouveaux enseignants. D’où la crise des vocations. Bien sûr, c’est souvent du non-dit mais curieusement les difficultés se cristallisent sur le refus d’être affecté à… l’Académie de Créteil qui dessert la Seine-Saint-Denis, le Val-de-Marne et la Seine-et-Marne. Intitulé pudiquement « Les difficultés de recrutement d’enseignants dans certaines disciplines », un rapport de 9 inspecteurs généraux de l’Éducation nationale et de l’administration de l’Éducation nationale fait le point.

Un document explosif pour qui sait le lire.
Polémia en livre ici les bonnes feuilles. Il s’agit de la version intégrale du point 2-2 du rapport publié en juillet 2013 (pages 16 à 18). Il faut, bien sûr, décrypter les euphémismes d’un rapport administratif nécessairement soumis aux contraintes du politiquement correct. Tel qu’il est, il n’en est pas moins très révélateur d’une situation profondément dégradée et qui montre à quel point l’immigration est une catastrophe pour l’éducation nationale. Pour aider au décryptage les commentaires de Polémia figurent entre crochets.

L’appréhension de la mobilité géographique à l’issue du concours

Témoignages entendus lors des visites de la mission dans les universités :

IUFM X [NDLR : On notera l’anonymisation non justifiée du lieu]. Dans les parcours préprofessionnels en licence, les étudiants mettent la localisation (affectation dans l’académie) en tête de leurs critères pour s’orienter vers le professorat des écoles ; d’autres font le choix de l’enseignement privé pour cette même raison.

[NDLR : = plutôt le privé ou le primaire pour éviter le 9-3.]

Université D : Parmi les préoccupations fortes pour les étudiants susceptibles de les détourner du concours, la question de la première nomination semble jouer un rôle extrêmement dissuasif.

[NDLR : = la première nomination, c’est forcément dans une banlieue de l’immigration.]

Université B : Parmi les raisons invoquées par les étudiants pour ne pas préparer les concours du second degré (ou qui y renoncent), le fait de ne pas choisir son lieu de vie est évoqué prioritairement. Ce refus de la mobilité est une évolution sociologique frappante et s’exprime avec force ; il explique la préférence pour le CRPE [NDLR : concours de recrutement de professeur des écoles = primaire] qui garantit une affectation dans l’académie ; ce n’est pas tant la perspective d’être affecté dans un établissement difficile qui est redoutée que celle de perdre ses repères et ses liens affectifs ; avec l’entrée plus tardive dans le métier, les projets personnels sont aussi plus avancés (mariage, enfants, …). [NDLR : une petite louche de sociologiquement correct…]

Les mêmes arguments ont été entendus dans toutes les universités visitées par la mission. La mobilité imposée par le mouvement national d’affectation est souvent très clairement jugée dissuasive, les étudiants l’ont partout souligné lors des entretiens avec la mission d’inspection générale. Elle est même présentée quelquefois comme un élément dirimant pour se présenter aux concours. La mission a le sentiment que le rejet de la mobilité n’était pas exprimé de façon aussi explicite et vigoureuse il y a encore quelques années. [NDLR = la situation s’aggrave.]

L’âge plus élevé des candidats, parfois en couple, inscrits dans un réseau de relations, engagés dans des projets personnels, enracinés dans une région, rend la mobilité plus difficile. Cet argument est parfois avancé pour expliquer le choix préférentiel des concours du premier degré, de l’enseignement privé (CAFEP), voire le maintien prolongé dans un statut d’enseignant contractuel qui entraîne une moindre mobilité, au prix, il est vrai, d’une forte mobilité interne. Le même argument motiverait aussi les refus, encore marginaux mais en forte progression dans certaines académies, de rejoindre le poste de première affectation ou les démissions quelques jours après le début d’année scolaire qui deviendraient moins rares. [NDLR = le phénomène de fuite s’accentue.]

Si la mobilité géographique est forte en début de carrière, elle l’est beaucoup moins après les quelques mutations qui permettent à l’enseignant de rejoindre, plus ou moins facilement, l’académie de son choix et souvent de ses études. Les enseignants du premier degré sont recrutés dans le département où ils ont réussi leur concours ; mais la rotation commence à être importante dans certaines académies comme Créteil et Versailles, et il faut parfois attendre longtemps des possibilités de mutation hors du département de première nomination. [NDLR : même dans le primaire, il y a fuite des Académies de Créteil et Versailles.]

Cette crainte de la mobilité géographique, inégalement exprimée, peut aussi être analysée parfois non pas comme un refus de l’éloignement mais comme une volonté d’éviter une première affectation « dans un collège difficile de l’Académie de Créteil » ainsi que l’ont spontanément exprimé plusieurs étudiants rencontrés lors des entretiens. [NDLR : cette fois c’est dit !]

De fait, près de 46% des néo-titulaires du second degré sont affectés dans les Académies de Créteil et de Versailles.

Cette crainte reflète l’image surmédiatisée de la violence en collège. Mais elle renvoie aussi à la vision d’un métier qui serait exercé en solitaire, sous la pression d’une hiérarchie qui ne soutiendrait pas son personnel. Elle reflète la conception d’un métier principalement axé sur la seule maîtrise d’une discipline, magnifiée par la préparation du concours, et qui serait dégradée par son impossible transmission à des élèves rétifs : « Je ne suis pas venu là pour ça », selon un témoignage recueilli auprès d’un jeune enseignant ; ou encore : « Je laisse cela à d’autres, qui ont grandi aux côtés de ces élèves et parviennent à les comprendre », a expliqué un étudiant.

Or, ces expériences peuvent être valorisées, non seulement en termes d’avancement, mais d’expérience professionnelle comme le soulignait le rapport Pochard :

« Une partie des jeunes enseignants affichent cependant de plus en plus leur conviction que, sous certaines conditions, les établissements dits “difficiles” peuvent constituer des laboratoires permettant d’apprendre à maîtriser toutes les dimensions de leur métier. Ils sont, d’autre part, de plus en plus nombreux à penser que l’on peut se construire une “carrière horizontale” en variant les profils d’établissements pour acquérir de nouvelles compétences. »

À condition cependant qu’une solide formation professionnelle ait permis à l’enseignant de connaître la diversité des situations d’enseignement et des publics, de réfléchir aux enjeux de la didactique, d’expérimenter la gestion de classe et le travail en équipe. A condition que le concours évalue aussi des compétences permettant d’enseigner à des publics variés. À condition que l’établissement d’arrivée et l’académie d’entrée aient une véritable politique d’accueil et d’accompagnement des néo-titulaires et des nouveaux arrivants, sur le plan pédagogique et matériel. A condition aussi qu’une solide formation disciplinaire ait été dispensée, qui donne au professeur la maîtrise de ce qu’il enseigne : un professeur tient d’abord sa classe par l’intérêt pédagogique de ce qu’il fait. Pour citer un exemple, c’est ce que l’Académie de Créteil a commencé de mettre en place. La DRH travaille à la fois sur l’image de l’académie et sur l’amélioration des conditions d’accueil, notamment le logement. Dans cette logique, deux initiatives ont été prises pour tenter de fidéliser les jeunes enseignants :

  • une convention pour ouvrir seize logements en Seine-Saint-Denis a été passée entre l’État, la préfecture, le ministère et un organisme HLM, dans une zone attractive [NDLR : notons le mot « zone attractive »] ;
  • une incitation financière existe depuis 2010 : pour remédier à la forte rotation dans certains établissements du nord de la Seine-Saint-Denis, une action a été lancée en faveur du logement : une prime d’attractivité de trois fois 2.000€ est versée sur trois ans, prise sur le budget de l’action sociale, sous condition de résidence dans la commune ; elle concerne une vingtaine de néo-titulaires. [NDLR : manifestement l’incitation financière n’a pas suffi.]

La mobilité géographique sera en tout état de cause indispensable tant que le déséquilibre persistera entre les académies les plus demandées et celles qui ont le plus de besoins. C’est là la garantie d’une éducation nationale veillant au maintien d’une certaine équité entre les territoires de même qu’entre les personnels. Cette mobilité peut toutefois être mieux préparée, accompagnée et valorisée dans la carrière des personnels. [NDLR : vous reprendrez bien un peu de politiquement correct.]

Polémia 13/01/2024 – 1re publication : 02/05/2014

Note de la rédaction : les instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) ont été remplacés par les écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPE). Créées par la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République et formellement mis en place le 1er septembre 2013,  elles permettent la formation des enseignants du primaire et du secondaire.

Crédit photo : Domaine public

https://www.polemia.com/immigration-responsable-de-la-penurie-de-profs-selon-un-rapport-officiel/

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