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Seconde Guerre Mondiale: Quand la Pologne gomme l’histoire nationale

La complexité de l’histoire est ce qui fait la richesse d’un pays, sa base civilisationnelle. Il semble que nous entrions de pleins pieds dans une phase de barbarie rampante. La Pologne, comme beaucoup d’autres pays, ne semble plus parvenir à maîtriser cette complexité, l’époque a besoin de gentils qui soient uniquement gentils et de méchants avec de véritables têtes de méchants. L’histoire nationale est donc rabaissée à la hauteur de vue des nouveaux idéologues hollywoodiens.

La Pologne a ainsi décidé de modifier sa législation et de démolir environ 500 monuments de l’époque soviétique, dont plus de la moitié sont directement consacrés à la mémoire des soldats, officiers et de tous ceux morts pour libérer la Pologne de l’occupation nazie. Et l’on se demande ce que regrettent le plus les Polonais d’aujourd’hui, car à l’époque la question ne se posait pas: regrettent-ils d’avoir été libérés ou bien de l’avoir été non pas par les “amis américains qui seuls ont gagné la guerre“?

L’histoire d’un pays civilisé est toujours complexe, comporte des instants de gloire, des moments que l’on préfèrerait oublier. Quelques grands hommes, beaucoup d’arrivistes. Les idéologies changent, mais l’Histoire reste, nous venons d’elle, tout comme nous la faisons. Ce rapport dialectique est très fragile, difficile à assumer et il semblerait que la Pologne n’y arrive plus. Elle a déjà adopté les lois de décommunisation permettant de justifier la russophobie par l’invocation du totalitarisme soviétique. Maintenant, elle remet en cause la mémoire des hommes et des femmes soviétiques qui ont lutté aux côtés des Polonais contre le seul ennemi de l’époque: les nazis. Car aujourd’hui, l’ennemi n’est manifestement plus le nazi, que l’on voit ressurgir en Europe de l’Est, au grand jour, dans les rues, sans aucune condamnation des instances de l’UE et même réhabilité par l’OTAN (sur la réhabilitation par l’OTAN de la collaboration nazie en Lettonie, voir notre article ici).

En 1944-1945, plus de 600 000 militaires de l’armée soviétique ont trouvé la mort en libérant la Pologne de l’occupation nazie. Les quatre grands maréchaux soviétiques qui participèrent à la Victoire, Joukov, Rokossovsky, Konev et Vassilievsky, furent faits en Pologne cavaliers de l’ordre Virtuti Militari de première classe. Rokossovsky avait des origines polonaises.

Mais suivant la grande vague de russophobie qui sert de ligne politique en Europe, le mois dernier, le Parlement polonais a décidé de modifier la loi de décommunisation afin de permettre la destruction de plus de 500 monuments de l’époque soviétique, dont plus de la moitié sont consacrés à la mémoire des morts soviétiques pour la libération de la Pologne contre les nazis.

Comment concrètement vont-ils faire la part des choses? Par exemple, la première armée polonaise était armée par les Soviétiques, elle comportait des soldats et des officiers polonais et soviétiques qui se battaient ensemble et sont morts en 1944. Les monuments à leur mémoire vont également être détruits? Ou bien seront-ils réécrits, subiront-ils eux aussi une “rénovation” qui permettra d’ôter toute mention à la participation soviétique?

Rappelons que les soldats morts étaient enterrés là où ils se trouvaient. Détruire ces monuments, c’est un peu comme détruire des cimetières.

Israel s’est prononcé contre cette mesure qui vise à la réécriture de l’histoire et remet en cause les conclusions du tribunal de Nuremberg. La Douma a adopté une résolution demandant aux instances européennes de réagir, le revanchisme que l’on remarque dans certains pays de l’Est comme la Pologne, l’Ukraine ou les pays baltes, de la part des collaborationnistes et néo-nazis est inadmissible en Europe. La député Iarovaya a estimé qu’une telle démarche est une insulte à la mémoire de tous les pays qui se sont battus pour libérer la Pologne.

Puisque le silence des instances européennes signifie non seulement leur consentement, mais leur complicité, leur “collaboration” une fois n’est pas coutume, le Ministère russe de la défense a retiré la mention secret défense de toute une partie des documents d’époque concernant la libération de la Pologne et ils sont tous en ligne, disponibles sur son site ici. Comment les Polonais ont accueilli et fêté les soldats soviétiques les libérant, comment ils ont aidé à enterrer les morts, comment ils ont construit les monuments et promis de garder vivante la mémoire de cette tragédie, pour que cela ne se reproduise pas.

Mais le temps passe, la mémoire est petit à petit effacée, pour faire place à une autre victoire, dans les salles de cinéma et dans les consciences populaires occidentales par la réécriture de l’Histoire de la Seconde Guerre Mondiale, pour donner aux Etats Unis le rôle qu’ils n’ont pas joué. Pour qu’à moindre frais, ils puissent être les libérateurs du Monde, puisqu’ils prétendent en être devenus les maîtres. Et tout petit chef qui ne sait user de son pouvoir a besoin d’un tableau “d’époque” à son effigie. (Sur la réécriture de l’histoire, voir notre texte ici)

Car finalement, l’enjeu est bien là. Celui de la réécriture de l’histoire, donc de la prise de pouvoir, de l’assise de son pouvoir d’influence, d’une magistrature morale. Tous ces monuments rappellent le rôle décisif joué par l’Union Soviétique dans la libération des pays européens et l’ampleur du sacrifice humain qui a été fait par l’URSS. Cela donne des droits et oblige. Détruire ces momuments, c’est au fur et à mesure vider la mémoire nationale de ces pays, l’épurer, pour laisser la place à une nouvelle histoire, celle de l’URSS combattant contre l’Europe et des Etats Unis défendant le “Monde libre” – contre la Russie. Puisque c’est cette fable que nos dirigeants veulent nous faire avaler afin de justifier des choix géopolitiques, qui contreviennent à l’intérêt des Etats européens.

Karine Bechet-Golovko

source: http://russiepolitics.blogspot.fr/2017/07/seconde-guerre-mondiale-quand-la.html

https://reseauinternational.net/seconde-guerre-mondiale-quand-la-pologne-gomme-lhistoire-nationale/

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