Au mois de mai dernier, par exemple, la baronne du petit écran est allée passer une dizaine de jours à Cannes en compagnie de trois collaborateurs. Le petit groupe a posé ses valises griffées au Majestic, luxueux établissement de la Croisette. Montant : 112.123 euros. Une bagatelle pour des personnalités de ce standing, mais une petite fortune pour le commun des mortels. Avec des tarifs à plus de 1.300 euros la nuit, on est loin en effet de ce que s’offre d’ordinaire le service public. Selon nos confrères de Marianne, le forfait alloué aux salariés « normaux » ne dépasse pas… 74 euros.
Un goût du luxe qui passe mal
Évidemment, cette différence de traitement ne pouvait pas laisser les syndicats indifférents. Une plainte pour « détournement de fonds » et « abus de confiance » a ainsi été déposée, le 12 février dernier, contre Delphine Ernotte. Le syndicat CFE-CGC souligne des faits qui « soulèvent des préoccupations quant à la gestion financière de France Télévisions et à la légitimité des dépenses ».
Dans sa plainte, consultée par le quotidien La Lettre, l'avocat du syndicat évoque notamment deux suites, la « Prestige Mer » et la « Deluxe Ville », respectivement à 1.759 et 1.319 euros la nuit. Le petit déjeuner et le mini-bar étaient-ils compris dans le forfait ? L’histoire ne le dit pas…
Petit arrangement entre amis
Mais pour la direction de France Télévisions, tout ceci n’est que polémique stérile. Circulez, y a rien à voir. Tout a été fait dans les règles de l’art. « Pas un euro d'argent public n'a été utilisé pour ces frais », jure-t-on dans l’entourage de dame Ernotte. Et pour cause : c’est une société privée dénommée TEC qui a réglé la note. Pour arriver à ses fins, France Télévisions a eu recours à l’ingénieux système de « barter », permettant au groupe d'échanger un espace publicitaire invendu contre des services. En clair, le principe est le suivant : je te file un espace publicitaire et tu me paies mes nuits d’hôtel. Rien d’illégal à ce troc, certes, mais rien de très moral non plus. N’aurait il pas été possible de faire en sorte que ce « service » à 100.000 euros profite à l’ensemble du groupe - voire aux usagers - du service public, plutôt qu’il serve à financer le train de vie dispendieux de sa patronne ? L’idée n’a manifestement pas traversé l’esprit de Delphine Ernotte. Qu’elle ne saisisse pas, en plus, en quoi ce petit arrangement financier peut choquer en dit long sur la déconnexion et le sentiment de toute-puissance de la petite élite dont elle fait partie.