Les éditions Perrin viennent de publier le livre d’Antoine Boulant, le tribunal révolutionnaire.
Ce livre court et facile à lire réussit cependant à nous faire connaître tous les rouages de ce tribunal qui fonctionna d’avril 1793 à juillet 1794 et qui est l’incarnation parisienne de la répression révolutionnaire. Marqué par la figure prépondérante de l’accusateur public FOUQUIER-TINVILLE, ce tribunal exécuta les basses besognes en leur donnant un vernis légal. Pendant ces mois de répression jacobine, le tribunal jugea 5215 personnes et prononça 2791 condamnations à mort avec souvent comme seule justification le désir d’appliquer les principes utopiques de l’égalité dogmatique.
Si les Evénements eurent bon dos (Lutte contre les émigrés, les ci-devant nobles, les pactisants avec l’étranger, les déviationnistes …), c’est avec une enveloppe légale que la Terreur eut cet instrument implacable pour guillotiner ceux qui ne plaisaient pas au régime et à son ange exterminateur. La machine se déréglant et broyant ceux qui l’avaient conçue, Danton et Robespierre passèrent eux aussi sous les fourches caudines et eurent à connaître le rasoir national.
En huit chapitres le livre développe la naissance de ce tribunal, ses locaux, le quotidien, la dichotomie entre justice et pouvoir, la mise au service de la destruction du royalisme, le retour de couperet, la Terreur, le procès de celle-ci. Une bibliographie conséquente permet au curieux d’aller plus loin s’il le désire.
Ce tribunal est symbolique de la folie de cette révolution qui tua 300000 personnes à travers toutes sortes de juridictions d’exception ou d’actes individuels commis par inféodation à une idéologie meurtrière désirant réprimer « toute entreprise contre révolutionnaire ou tout attentat contre la liberté, l’égalité, l’unité et l’indivisibilité de la République » et laissant libre court à toute interprétation oiseuse de ces entreprises…
Les archives sont nombreuses car les révolutionnaires étaient aussi des paperassiers et l’historien n’a que l’embarras du choix. Le livre se veut une synthèse des travaux des historiens précédents augmentée de sources inédites à l’époque de leurs travaux et défrichées en particulier par Olivier BLANC et autres universitaires.
Ce livre se veut descriptif et sans réel parti pris mais ne peut que constater que cette révolution fut un génocide (Gérard Walter) même s’il y eut un souci d’un certain respect de formes judiciaires pour ce ci-devant tribunal de sinistre mémoire mais qui pouvait préfigurer les cours prévôtales, martiales, de la « Libération », ou de la cour de sûreté de l’Etat, cours pour lesquelles les droits des accusés furent souvent réduits à néant. En définitive il s’agirait d’un processus « conduisant progressivement le pouvoir politique à éliminer ses rivaux et des individus potentiellement dangereux en les privant des garanties les plus élémentaires. »
En définitive un livre synthétique documenté et montrant l’efficacité d’un instrument de terreur ( la manipulation de la « Justice ») au service d’une idéologie démente que l’on aimerait savoir ne pas pouvoir renaître.
Eric ABGRAAL
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