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Il fallait y penser avant…

Un sondage révèle que 74% des Français se disent insatisfaits du résultat des élections législatives. Le seraient-ils moins s’ils avaient voté en leur âme et conscience au lieu de suivre dociles les consignes des partis ? Certainement, car lorsque l’on reste libre de son choix on peut être déçu, mais on ne nourrit pas un sentiment de frustration. Ce mécontentement traduit peut-être aussi le réveil douloureux des électeurs, constatant que la gauche en tête de sièges, ne l’est pas en voix, loin s’en faut. Dépossédé volontairement par le jeu des alliances, l’électeur qui s’est laissé guider plus qu’il n’a été acteur ne peut que s’étonner à présent, mais c’est bien là son unique faute et la lettre de Macron conforte cette impression. Un président qui affirme que personne n’a gagné au motif qu’il n’a pas, lui, de majorité absolue, berne les Français. Macron fait une nouvelle fois une lecture de la constitution très « Fabusiomacronienne ». À aucun moment il n’est dit qu’un parti l’emporte seulement s’il a 289 députés. En définitive Macron prend ce prétexte pour s’affranchir de choisir un Premier ministre dans le groupe le plus nombreux, comme il est de coutume sous la Vème république, en clair il ne reconnaît pas le résultat des urnes, qui lui est très défavorable et appelle à une entente large, façon de transformer un massif rejet des français à son encontre, en une splendide victoire tactique.

Maladresse de sa part ? Non, provocation, pied de nez à ces partis qui se sont couchés une fois de plus pour garder quelques députés. Cette déclaration fleure le coup d’État. Comme garant des institutions on devrait trouver mieux. Au lieu de se pencher sur la source du problème, il le contourne, comme toujours. Le politologue Dominique Reynié, directeur général de Fondapol observe que toutes les gauches pèsent 27% et toutes les droites 47% et de conclure : « Une majorité de droite va être gouverné par la gauche. Le barrage républicain m’effraie ».

En cela il a raison mais reste toujours étonnamment prudent et n’ose pas poser la question qui fâche, celle du mode de scrutin, seul responsable de cette anomalie. L’origine du décalage entre voix et sièges vient uniquement de là. Pourquoi ne pas l’évoquer clairement ? Pour ne pas froisser, une fois de plus. C’est une constante dans notre vie politique, il est devenu interdit de se saisir de certains sujets, et celui des institutions malades et totalement déphasées avec la réalité en fait partie. Il y a une fausse pudeur consistant à considérer ceux qui dénoncent le système comme corrompu, au sens d’altéré, comme des séditieux, ou révolutionnaires, voulant provoquer un chaos institutionnel. Sottise d’autant plus insupportable que l’anomalie est aujourd’hui parfaitement visible. Tant que la supercherie était masquée par la concordance entre nombre de voix et représentation finale, il n’y avait pas de quoi s’inquiéter, globalement la logique était respectée. Dorénavant ce n’est plus le cas, la raison et la justice devraient conduire à changer cela.

Impossible, l’argument massue de la peur d’une instabilité constitutionnelle sera avancé en lieu et place d’une volonté d’équité. Instabilité dont on se demande bien quel visage elle pourrait avoir, en regard à la confusion qui règne dans cette nouvelle assemblée. Toucher à la Vème république est pour beaucoup un crime, tant elle offre finalement de possibilités pour que ceux qui depuis 40 ans président tour à tour de façon catastrophique, aux destinées de notre pays. Ce tabou de l’intangibilité chronique de notre constitution, qui n’est toilettée qu’à la marge et toujours aux bénéfices de ceux qui sont au pouvoir, va avec celui d’en finir avec l’imposition par la gauche de SA morale, de SA conception de la dignité politique, en clair de SA vérité. L’évolution ne viendra pas de ceux qui se nourrissent d’un système qui a été perverti. Laurent Wauquiez illustre cet immobilisme, en déclarant qu’il s’oppose à toute coalition gouvernementale, mais reste favorable à un pacte législatif. Formule creuse et alambiquée pour avouer que les LR feront du LR, c’est-à-dire rien, ou du bricolage en regardant la France s’enfoncer.

Comment pourrait-il assumer ce grand écart ? Repousser une coalition mais accepter un pacte ? À force de compliquer les raisonnements, ils en deviennent intenables, quand ce n’est pas franchement absurdes. Il veut une politique à la carte, comme au restaurant ? C’est donc fort de cette nouvelle stratégie qu’il entend reconquérir le pouvoir ? Laissons-le à sa rêverie. Plus inquiétant il justifie sa position en se déclarant opposé «  aux manœuvres » et « aux combinaisons d’appareil ». Mais n’a-t-il pas fait exactement l’inverse pendant l’entre-deux tour ? Ne s’est-il pas vautré dans la compromission pour sauver quelques députés LR et permettre à des Renaissances et des NFP de barrer la route au RN ? A-t-il déjà oublié les turpitudes dont il s’est rendu responsable pour exister ? Il n’est hélas pas le seul, Larcher y va de son commentaire au micro de RMC. Lui aussi récuse le résultat de cette élection, en s’attribuant cependant, non sans fierté, son active part dans cet imbroglio, avouant sans honte que finalement tout a été frelaté dans l’unique but d’empêcher le RN de gagner, donc ça ne compte pas. Étrange argument. Après avoir fait barrage au RN, le voilà prêt à recommencer pour le NFP. Il y a tout de même un bémol qui n’échappera à personne. Influencer les électeurs est une chose, écarter du pouvoir le groupe qui possède le plus de députés n’est possible qu’en cas de nouvelle coalition. Avec qui pensent-ils gouverner ? Entre les 37% du RN qui ne doivent pas gouverner, et maintenant les 25% du NFP nouvellement disqualifiés par les Barons de la politique, nous débouchons sur une démocratie qui exclue 62% du corps électoral sans sourciller.

Notre pays est vraiment malade et pas seulement financièrement. Ça ressemble fortement à ce référendum de 2005 dont le résultat fut dévoyé quelques années après. Ils ont cette fois été plus rapides pour déjuger le vote du peuple. On ne peut plus se satisfaire d’une forte participation et trois jours plus tard dire aux Français que finalement on continuera à faire sans leurs avis. Que l’on soit pour ou contre le NFP, là n’est pas la question, c’était avant de les porter au pouvoir qu’il fallait s’interroger sur la stratégie à adopter. Le NFP est majoritaire à l’Assemblée nationale, le Premier ministre doit être choisi dans ses rangs. À eux de trouver les moyens de gouverner, c’est l’esprit de notre constitution, enfin du peu qu’il en reste. Nous souffrons d’un manque cruel de clarté et d’honnêteté, chacun se jugeant autorisé à récuser un résultat dès lors qu’il n’est pas conforme à sa vision des choses. La folie s’est emparée de notre pays, les principaux personnages, Président de la République, Président du Sénat sont en roue libre. Soit nous assistons à des retournements de vestes pour permettre aux perdants de gagner, soit nous entrons dans une instabilité institutionnelle qui devra passer par la destitution de Macron et une refonte de notre Vème république. À force de jouer avec le feu, on finit par se brûler…

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Par Gilles La-Carbona : secrétaire national du RPF au suivi de la vie parlementaire

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