Les arrêtés contre le port du burkini jugés disproportionnés
Ce n’est pas la première fois qu’une telle décision est annulée. En 2023, le maire Rassemblement national de Fréjus avait pris une mesure anti-burkini. Le tribunal administratif de Toulon avait, là encore, suspendu l’arrêté. En août 2018, l'arrêté du maire de la ville de Ghisonaccia (Corse) qui régulait l’accès aux plages avait été suspendu par le tribunal de Bastia. Dans les deux cas, ces mesures avaient été jugées disproportionnées par rapport au risque que représente le burkini : « Contrairement à la situation de la commune de Sisco [...], le dossier n'a[vait] pas fait apparaître de risques avérés d'atteinte à l'ordre public sur les plages de Ghisonaccia en cas de présence d'une personne portant une tenue de type burkini », précisait le tribunal. L’arrêté reposait sur le même texte que celui utilisé par la municipalité de Sisco, en août 2016, mais à Sisco, l'interdiction municipale avait pourtant été confirmée par le tribunal. Pourquoi ? Il faisait suite à des heurts entre des Corses et des membres de la communauté marocaine.
Villeneuve-Loubet, une décision qui fait jurisprudence
Toutes les décisions prises par les tribunaux administratifs des villes concernées se réfèrent à l’affaire de Villeneuve-Loubet. Dans cette commune, l’interdiction de porter des vêtements religieux à la plage a été rejetée par le Conseil d’État. L'instance avait été saisie par la Ligue des droits de l’homme et le Comité contre l’islamophobie en France. L’ordonnance de la plus haute juridiction administrative française estimait que « l’arrêté litigieux a […] porté une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales que sont la liberté d’aller et venir, la liberté de conscience et la liberté personnelle ». Selon Le Monde, l’avocat de la Ligue des droits de l’homme se félicitait que cette décision s’établisse comme principe pour toutes les villes - une trentaine - qui mettraient en place une interdiction des burkinis.
Si cette décision fait jurisprudence dans les cas semblables depuis 2016, le Conseil d’État a précisé qu’une restriction de l’accès aux plages pouvait toujours être mis en place en cas de risques de troubles avérés à l’ordre public, et pour des raisons d’hygiène, de décence, de sécurité et de bon accès au rivage. Mais, manifestement, il faudra que les maires trouvent d'autres raisons d'interdire le burkini… si cela est encore possible.
Raphaelle Claisse
https://www.bvoltaire.fr/sur-les-plages-corses-la-justice-interdit-dinterdire-le-burkini/