Le spectacle lamentable donné par le fonctionnement statutaire de l'UMP induit ces temps derniers des effets collatéraux non négligeables.
Deux "petits" événements significatifs, survenus le même jour le 28 novembre doivent pourtant retenir l'attention. Il s'agit des votes négatifs du Sénat sur le projet de Loi de finances et les protestations de l'Association des régions de France sur le fonctionnement prévu pour la Banque publique d'investissement. Ces deux dossiers manifestent en effet une situation du pouvoir actuel beaucoup plus fragile qu'on ne veut faire semblant de le croire.
D'une part, en effet, le feuilleton de la présidence du principal parti de droite, dissimule les débats profonds internes à la gauche. Celle-ci se révèle déchirée par des choix indispensables. Or, ni Monsieur Normal ni son Premier ministre ne parviennent à les imposer, ni probablement même à les concevoir. Il ne s'agit pas seulement de fiscalité ou d'économie, mais aussi de politique scolaire, de lutte contre la délinquance et l'immigration clandestine, de position au sein de l'Union européenne, etc.
Tôt ou tard, et même sans doute très bientôt, ces sujets reviendront au premier plan sans que la cohérence, au moins apparente, de l'action gouvernementale ait vraiment été rétablie.
D'autre part, la majorité factice gronde de plus en plus. Elle se sait confrontée à ces contradictions entre les idéologies, dont elle se réclame encore, et les réformes qu'il faudra bien esquisser et, plus encore, mettre en œuvre. Elle n'est pas seulement composée du parti socialiste en ses diverses tendances et factions. Elle comprend aussi le parti radical de gauche, un peu dérisoire, le parti communiste, qui se refait impunément une dentition, mais aussi les écolos, les groupuscules, les mouvements associatifs extraparlementaires, etc.
Or tout cela se retrouve, effectivement, à deux échelons : celui de la majorité sénatoriale conquise à l'automne 2011, et celui des collectivités territoriales qui dans leur grande majorité ont basculé à gauche dès la deuxième présidence Chirac, donc depuis quelque 10 ans. Par conséquent leurs personnels savent pertinemment ne rien devoir ni à Monsieur Hollande ni à son collaborateur Ayrault, respectivement chef de l'État et chef du gouvernement, à ce qu'il paraît, depuis mai 2012.
Le pays légal, celui qu'accapare la classe politique, se trouve ainsi en présence d'un morcellement quasi féodal. Et comme les dirigeants officiels ressemblent fort peu aux Capétiens directs, on n'en sortira que difficilement et, du point de vue de ses profiteurs, que douloureusement.
Les discours tenus dans l'enceinte du Palais du Luxembourg pourraient être cités largement.
Une perle de taille a été lâchée par exemple par l'indérridable humoriste Cahuzac : celui-ci a osé se féliciter, lors du débat sur les crédits de l'Union européenne que "le président de la République a placé la France au centre du jeu. Il a eu des entretiens bilatéraux pour que le Conseil ne voie pas s'affronter contributeurs nets et amis de la cohésion". (1)⇓Cette déclaration veut dire, en clair, que tout un clan gouvernemental de frivoles courtisans et de technocrates à courtes vues ne voient pas l'erreur que commet Paris en approfondissant le fossé avec ses principaux partenaires.
Le point crucial est ici que la majorité sénatoriale de gauche, celle qui a élu Bel à la présidence de cette assemblée, a besoin des communistes et que ceux-ci ont pris l'habitude de voter "contre" avec la droite et le centre. Ceci n'empêchera sans doute pas l'adoption en seconde lecture au Palais Bourbon des principales mesures notamment fiscales, rejetées par la haute chambre du parlement. Mais cela pose plus en plus un problème politique.
Or on ne doit pas perdre de vue que le Sénat lui-même reflète les rapports de forces au sein des collectivités territoriales, théoriquement dominées par les socialistes.
Et le deuxième craquement au sein de la pseudo-majorité issue du second tour de mai 2012, s'est précisément manifesté par la fronde des exécutifs régionaux autour du contrôle de la future Banque publique d'investissement. Le Ministère des Finances entend placer l'institution sous sa coupe. Ce que bien évidemment les grandes régions refusent. On rapporte ainsi la remarque du président de la plus grosse d'entre elles fâché car "Bercy nous prend pour des analphabètes sur le plan économique". (2)⇓ Or ces propos viennent d'un soutien de poids de l'actuel président de la république. Les régions considèrent qu'avec 2 administrateurs sur 15 elles ne détiendront aucune véritable influence dans les choix "volontaristes" Ceux-ci leur seront imposés au nom du soi-disant redressement productif, cette vaste escroquerie semblant destinée à camoufler le plus sordide des clientélismes.
JG Malliarakis http://www.insolent.fr/
notes :