Dans son rapport de suivi annuel, la Commission a aussi proposé d’accorder le statut de candidat à l’Albanie, qui y aspire depuis 2009. Deux avancées volontaristes, alors même que le bilan de la Commission dresse un tableau sans complaisance des efforts encore à livrer par les six aspirants des Balkans occidentaux et la Turquie, pour affermir État de droit et démocratie et «renforcer leur gouvernance économique».
La politique d’élargissement «renforce la stabilité économique et politique» de tout le continent en traitant des «fondamentaux, comme la lutte contre la corruption, la bonne gouvernance économique la liberté d’expression et des médias, les droits de l’Homme et la protection des minorités», a plaidé le Commissaire responsable, Stefan Füle.
L’élargissement, qui a porté l’UE de 15 à 28 membres en dix ans «n’est pas du pilotage automatique», mais une politique qui permet aux États-membres, désormais très réticents à ouvrir la porte à des voisins difficiles, «de diriger le processus», a-t-il insisté dans une conférence de presse. L’approche a été saluée par le ministre britannique aux Affaires européennes, David Lidington. «Il est vital pour la crédibilité du processus que les pays ne joignent l’UE que quand ils sont totalement prêts», a-t-il souligné.
Négociations avec la Turquie
Concernant la Turquie, la Commission juge que les négociations d’adhésion, ouvertes depuis 2005 mais bloquées depuis des années par l’impasse chypriote et les réserves allemandes et françaises, «doivent retrouver un élan». Concrètement, elle demande aux États-membres, qui pourraient se prononcer lors d’une réunion des ministres de l’UE chargés des Affaires européennes prévue mardi prochain, de confirmer leur engagement gelé depuis juin d’ouvrir avec Ankara un nouveau chapitre de négociations, le 22, concernant la politique régionale.
Droits fondamentaux
Les 28, dont la bonne volonté est loin d’être acquise, sont aussi appelés à dégager la voie à l’ouverture de deux chapitres supplémentaires portant sur les droits fondamentaux, la justice, la liberté et la sécurité. Ce serait «l’outil le plus efficace pour que la Turquie se saisisse de la question des droits et libertés fondamentaux», a insisté M. Füle. Car le rapport ne se prive pas de condamner le «recours excessif à la force de la police» contre le mouvement de contestation parti en juin de la place Taksim à Istanbul.
Ces événements soulignent le «besoin impérieux de développer une vraie démocratie participative» et «d’assurer le respect des libertés fondamentales», insiste la Commission. Mais elle crédite aussi la Turquie de «pas importants» avec l’adoption officielle cet été d’un «paquet démocratique» et de réformes en faveur de la minorité kurde. Dans une première réaction, le ministre turc chargé des relations avec l’UE, Egemen Bagis, a critiqué la publication du rapport pendant la fête musulmane de l’Aïd al-Adha, déplorant que «l‘Europe s’éloigne de jour en jour de la Turquie» après plus de huit ans de pourparlers infructueux.
L’Albanie distinguée
L’Albanie est pour sa part distinguée pour de «bons progrès» notamment en matière de normalisation politique, avec la tenue en juin de législatives remportées par les socialistes pro-européens. Mais Tirana se voit aussi sommé «d’agir contre le crime organisé et la corruption» si elle veut convaincre les 28 de lui accorder le statut de candidat. La question pourrait être examiné lors du sommet européen de décembre, selon M. Füle. Dans une Union qui se remet à peine de la crise de la dette, la Commission souligne aussi l’ampleur de la tâche pour relancer l’économie «fragile» de ce petit pays, parmi les plus pauvres d’Europe.
Pas d’adhésion pour les autres pays
Sur les autres pays aspirants ou déjà candidats, Serbie, Monténégro, Macédoine, Kosovo et Bosnie-Herzégovine, le bilan de la Commission ne laisse augurer d’aucune percée notable. Le commissaire a toutefois émis l’espoir que les 28 ouvrent les négociations d’adhésion avec la Serbie en janvier, comme Belgrade le souhaite, au vu des «énormes progrès» de la normalisation en cours entre la Serbie et le Kosovo.
Quand à l’Islande, la Commission prend note de la décision prise en septembre par son nouveau gouvernement de centre droit eurosceptique d’interrompre sine die ses négociations d’adhésion avec l’UE.