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De l'ombre communiste sur les gouvernements socialistes

Certains se plaisent à observer aujourd'hui encore que le lamentable gouvernement actuel, constitué en 2012 ne comporte aucun communiste. Et on ne peut que constater que "L'Humanité", la FSU ou la CGT dénoncent avec beaucoup de force, au moins sur le papier, ce que ces cerbères et quelques "utiles idiots" appellent la "dérive sociale-libérale" du pouvoir actuel.

Rappelons d'abord qu'en juin 2012 c'est le conseil national du PCF lui-même qui a voté, à une écrasante majorité, avec seulement 4 voix contre, 16 abstentions, sur près de 500 membres, de ne pas participer au gouvernement de Jean-Marc Ayrault. En même temps la sénatrice Assassi soulignait alors "de facto nous sommes dans la majorité."

On observera dans la pratique que, sur le terrain des municipales, les survivants, les suivistes, les fils de permanents et les nouvelles pousses du parti :
– ou bien figurent en bonne place dans des listes municipales composées en accord avec le PS,
– ou bien se proposent de tirer parti du discrédit actuel de la présidence Hollande.

On soulignera le constat du premier cas notamment à Paris, où Mme Hidalgo, après avoir soigneusement écarté les écolos de ses listes de premier tour, a fait du jeune stalinien Brossat une sorte de brillant second.

Au contraire, le second cas s'observe, par exemple à Aubervilliers, où ils parlent ni plus ni moins de "refermer la parenthèse socialiste".  (1)⇓

Le calcul se révèle plus cynique encore à Nîmes. Voilà comment les staliniens du Gard imaginent de tirer leur épingle du jeu, en bénéficiant d'une situation "quadrangulaire":

"c’est une triste particularité locale qui pourrait paradoxalement permettre la reconquête : l’extrême droite est traditionnellement forte, ici. Si cela se confirmait, en mars, la gauche pourrait emporter la mairie avec 40 %, à la faveur d’une triangulaire qui opposerait l’UMP sortante au FN. Arriver en tête de la gauche au premier tour et battre la droite, et l’extrême droite, au second."  (2)⇓

Dans un cas comme dans l'autre le mépris total avec lequel le Parti considère les socialistes dont ils entendent, aujourd'hui encore, "plumer la volaille", ne se dément jamais.

Un retour en arrière permet de mieux comprendre comment la machine fonctionne.

C'est en 1969, plus de 20 ans après le renvoi des ministres communistes, en 1947 sous le gouvernement Ramadier, que le PCF et les socialistes ont sérieusement entrepris de nouer un accord politique qui conduira au fameux programme commun.

La route se révélera longue avant de retrouver des ministres communistes, en 1981. Au lendemain de sa victoire à l'élection présidentielle du 10 mai, le premier cabinet, constitué le 23 mai, n'en comportait aucun. Ce fut après le second tour des législatives, que Mitterrand permit, le 22 juin à Pierre Mauroy de faire entrer les gens du PCF dans son ministère, qui durera jusqu'au 22 mars 1983. Rappelons les noms de ces tristes sires : Charles Fiterman, ministre d’État aux Transports ; Anicet Le Pors à la Fonction publique : Jack Ralite à la Santé ; Marcel Rigout à la Formation professionnelle.

Remarquons au passage que les réseaux stalino-soviétiques disposaient alors d'autres relais. Dès 1982, la démission de Pierre Dreyfus, ancien PDG de Renault de 1955 à 1975 (3)⇓, ou la suppression de son poste de ministre de l’Industrie, ainsi que le remplacement de Jean-Pierre Cot  (4)⇓ à la Coopération, avaient discrètement marqué le commencement discret d'un reflux de l'influence des compagnons de route et/ou amis du Bloc de l'ESt.

Néanmoins tous les gouvernements socialistes ultérieurs avaient laissé une petite place aux amis du PCF – dont il sut toujours tirer profit. Le cabinet Jospin (1997-2002) en l'absence de toute référence à un programme commun trouvait encore le moyen de baptiser cette présence incohérente du nom de "gauche plurielle".

Aujourd'hui, après 45 années de nuisance, la phase historique de l'alliance socialo-communiste, à géométrie variable, interrompue en 1947, recommencée à partir de 1969 n'est donc pas tout à fait terminée. À l'époque, Marchais secrétaire général du PCF osait dire à son sujet : "nous n'avons jamais cessé et ne cesserons d'agir pour que cette unité d'action se réalise."  (5)⇓

C'était évidemment oublier les périodes nombreuses où les premiers ennemis désignés par les communistes étaient les socialistes. "Feu sur le Blum" poétisera Aragon. Zinoviev, alors président de l'Internationale communiste "Komintern" avait ainsi théorisé, en 1920, à la face du monde :

"Le conflit entre feu la IIe Internationale et la IIIe dont les forces augmentent de jour en jour n'est pas un étroit litige de parti ; ce n'est point une question à laquelle ne doivent s'intéresser que les hommes appartenant à un parti. C'est un conflit entre le travail et le capital, et qui concerne tout travailleur."  (6)⇓

Ainsi donc le sectarisme communiste, sous couvert d'alliance électorale, c'est comme Félix Potin, on y revient, même si, comme Félix Potin l'enseigne commerciale a disparu.

JG Malliarakis http://www.insolent.fr 

Apostilles

  1. in "L'Huma" du 24 janvier
  2. Ibid.
  3. Pierre Dreyfus avait signé en 1981 un livre inouï sous le titre "Une nationalisation réussie : Renault", 211 pages chez Fayard, où ne figure aucun élément d'évaluation chiffrée, pour ne pas parler de "comptabilité", s'agissant d'une entreprise qu'il avait dirigée pendant 20 ans. Publiée par L'Humanité le 27 décembre 1994 sa notice nécrologique a disparu du web.
  4. Jean-Pierre Cot était le fils de Pierre Cot, auquel Jules Monnerot consacre un passage bien senti dans sa "Sociologie du communisme" comme prototype du compagnon de route "progressiste".
  5. cf. entretien à l'AFP du 14 décembre 1969 cité dans L'Humanité du 15 décembre. Et L'Humanité du 19 pourra titrer : "Comment remplacer le système actuel : Communistes et socialistes décident d'engager des conversations sur les conditions fondamentales d'un accord politique."
  6. au cours du "Premier Congrès des Peuples de l'Orient", à Bakou en septembre 1920.

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