Dans le monde d’aujourd’hui, de plus en plus interdépendant et interactif, chaque action a une myriade de causes, de sens, d’objectifs et de réactions ; beaucoup sont visibles, beaucoup invisibles. Certaines, ouvertement admises et déclarées ; d’autres, personne n’oserai les confesser.
Lorsqu’on tente de comprendre les nombreux conflits complexes en cours dans le monde et le rythme vertigineux auquel ils apparaissent, il serait erroné de les approcher isolément. Seul un coup d’œil surplombant et « holistique » peut nous donner une image de notre situation et, plus important, de la direction où nous sommes entraînés.
La géopolitique du XXIe siècle ne peut pas être comprise en appliquant une mentalité de silo. La guerre civile en Syrie, le « printemps arabe » en Egypte, la destruction de la Libye et de l’Irak, la montée de la Chine, le Japon boiteux, la crise de l’Eurozone, le « bouclier antimissile » américain en Pologne, le programme nucléaire de l’Iran, le futur « printemps » en Amérique Latine… Avec une approche au hasard, l’image que nous obtenons est celle d’un chaos total. Avec une approche appliquant le bon modèle d’interprétation, nous commençons à voir comment les choses sont en relation, réagissent et évoluent en obéissant à des forces extrêmement puissantes et dynamiques – bien qu’invisibles pour la plupart – conduisant silencieusement le monde d’aujourd’hui.
Ne lisez pas - seulement - les journaux.
Il est bon d’être informé ; c’est néanmoins sans utilité si vous ne pouvez pas formater cette information en modèles intelligibles et appropriés. Une trop grande quantité d’information non-traitée aura un effet de saturation sur votre cerveau. C’est donc une bonne chose de s’éloigner des grands titres bruyants, des nouvelles sensationnelles, des rumeurs de terreur et des présentateurs-vedettes. C’est comme quand vous regardez un tableau impressionniste de Claude Monet : si vous vous tenez trop près, vous ne voyez qu’un dédale de petits points colorés, mais quand vous reculez de quelques pas alors la beauté de l’œuvre se déploie devant vos yeux.
Dans la saturation de l’information d’aujourd’hui, nous devons relier les points correctement en dépit de l’insistance des médias mondiaux à nous dire que nous les relions tous mal.
Aujourd’hui, la plupart d’entre nous ont compris que nous sommes « une planète en guerre » ; pas en guerre avec quelque monde étranger (ce qui rendrait les choses plus faciles à comprendre !). Nous sommes plutôt une civilisation menant une guerre civile avec elle-même et contre elle-même.
En lisant la presse mondiale, vous pourriez penser qu’il s’agit d’une guerre entre nations souveraines, mais c’est plus compliqué que cela. Cette guerre mondiale est menée par une Elite Mondiale immensément puissante, illégitime, autoritaire mais numériquement infime, profondément incrustée dans les structures de pouvoir publiques et privées de presque toutes les nations de la Terre ; notamment, des Etats-Unis d’Amérique.
Comme une tumeur maligne cancéreuse, nous ne pouvons pas l’enlever complètement ; nous pouvons seulement espérer l’affaiblir et stopper sa croissance avant qu’elle ne développe des métastases, tuant le corps politique entier de l’humanité. Ce dont le monde a besoin aujourd’hui, c’est une sorte de subtile « chimiothérapie politique virtuelle » pour enlever et détruire cette tumeur maligne gouvernant le monde.
Une manifestation-clé de cette maladie sociale et politique se trouve dans les inégalités extrêmes qui existent aux USA, où les 1% les plus riches de la population possèdent 35% de la richesse du pays, alors que les 90% du fond doivent faire ce qu’ils peuvent avec seulement 25% de la richesse nationale. Encore pire, l’écrasante majorité des membres du Congrès, des Sénateurs, et des membres de l’Exécutif se trouve dans la catégorie des « 1% les plus riches » [1].
Comprendre les intentions cachées, les plans à long terme, les ambitions hégémoniques et les complots inavouables nécessaires pour les réaliser est particulièrement important pour les citoyens américains, britanniques, européens et australiens. Après tout, ce sont leurs dirigeants qui ordonnent formellement aux forces armées de leurs pays de saccager et de détruire des pays-cibles.
Quand les électeurs d’Argentine, de Colombie, du Nigéria ou de Malaisie choisissent les mauvais dirigeants, ils sont les seules victimes de leur mauvais jugement électoral. Mais quand les électeurs américains, britanniques ou français, dans leur sottise, mettent des gens inappropriés au pouvoir dans leurs pays, alors des centaines de millions de gens dans le monde souffrent de leurs bombes, drones, invasions, ingérences et changements de régimes.
Rapport de la montagne de fer
Un vieux livre de la fin des années 60 appelé Report from Iron Mountain on the Possibility and Desirability of Peace [2] [Rapport de la Montagne de Fer sur la possibilité et la désirabilité de la paix] fut, dit-on, rédigé par le think-tank de futurologie, le Hudson Institute, à la demande du Secrétaire US à la Défense de l’époque, Robert S. McNamara. Beaucoup disent que le livre est un faux. Mais il reflète étrangement les réalités du demi-siècle passé.
Le livre inclut l’affirmation qu’il fut rédigé par un Groupe d’Etude Spécial de quinze hommes dont les identités devaient rester secrètes et qu’il n’était pas destiné à être rendu public. Il conclut que la guerre, ou un substitut crédible à la guerre, est nécessaire si les gouvernements veulent maintenir leur pouvoir.
Le Report from Iron Mountain déclare que « les guerres ne sont pas ‘causées’ par des conflits d’intérêts internationaux. Une suite logique appropriée ferait qu’il serait souvent plus exact de dire que les sociétés guerrières ont besoin – et donc provoquent – de tels conflits. La capacité d’une nation à faire la guerre exprime le plus grand pouvoir social qu’elle peut exercer ; l’activité guerrière, active ou envisagée, est une question de vie ou de mort sur la plus grande échelle soumise au contrôle social ».
Le rapport continue en expliquant que « la production d’armes de destruction massive a toujours été associée au ‘gaspillage’ économique ». Iron Montain souligne que la guerre est un instrument important, parce qu’elle crée une demande économique artificielle, une demande qui n’a pas d’issues politiques : « la guerre, et seulement la guerre, résout le problème de l’inventaire ».
Sans surprise, Iron Mountain conclut que la « paix mondiale » n’est ni désirable ni dans les meilleurs intérêts de la société, parce que la guerre non seulement sert des fonctions économiques importantes mais joue aussi des rôles sociaux et culturels clés.
« La possibilité permanente de la guerre est le fondement d’un gouvernement stable ; elle fournit la base pour une acceptation générale de l’autorité politique… La guerre est virtuellement synonyme de nationalité. L’élimination de la guerre implique l’élimination inévitable de la souveraineté nationale et de l’Etat-nation traditionnel ». Ainsi, « la guerre a été le principal procédé évolutionnaire pour maintenir un équilibre satisfaisant entre la population humaine brute et les ressources disponibles pour sa survie. Elle est particulière à l’espèce humaine ». Donc, afin de garantir sa propre survie par son retranchement à l’intérieur des structures de pouvoir américaines, britanniques, européennes et autres, les Maîtres du Pouvoir Mondial [Global Power Masters] ont besoin de la guerre, de la menace et des rumeurs de la guerre, tout comme le poisson a besoin d’eau, les tigres de proies faciles, et les chiens d’arbres… et tous pour des raisons similaires !
Mais les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et leurs alliés ne peuvent pas avoir simplement un quelconque ennemi. Ils ont besoin d’un ennemi crédible, dangereux, « effrayant » : d’abord ce fut l’Allemagne, puis le Japon, l’Union Soviétique, la « Menace Rouge » mondiale ; aujourd’hui c’est le « Terrorisme fondamentaliste islamique » et, de plus de plus, la Chine et la Russie entrent dans la zone centrale de l’écran radar géopolitique des Maîtres du Pouvoir Mondial.
Le cas de la Russie
Dans l’époque récente, la Russie a diversement joué le rôle de Tampon, de Frein et (maintenant, espérons-le) de Mur contre l’agression des puissances occidentales.
Quand la Russie agit comme un Tampon, le monde se sent frustré ainsi que les cas de la Serbie, de l’Irak, de l’Afghanistan, du Pakistan, de la Lybie et de la Palestine le montrent. Dans tous ces cas, la Russie prenait une posture d’adversaire, « affrontant » les US, R-U, UE et Israël, en mots mais certainement pas en actions. Les puissances occidentales obtinrent toujours ce qu’elles voulaient, même aux Nations Unies.
Dans les temps récents, cependant, la Russie agit de plus en plus comme un Frein face aux ambitions hégémoniques occidentales, notamment en Syrie et en Iran. En novembre 2011 et en février 2012, la Russie mit son veto à deux Résolutions de l’ONU, proposées par les USA, le R-U et la France, contre la Syrie, et qui, si elles avaient été votées, auraient eu le même effet dévastateur sur la Syrie que la Résolution 1973 de l’ONU eut l’année dernière sur la Libye. Aussi, la Russie a refusé de soutenir les pseudo-rapports de l’AIEA (Agence Internationale de l’Energie Atomique) et les sanctions contre l’Iran du fait de son programme nucléaire. De plus, la Russie a dépêché des forces militaires dissuasives crédibles pour contrer la militarisation du Golfe Persique et de la Méditerranée par l’OTAN.
Ici nous commençons à nous demander si un affrontement pourrait réellement éclater. Cela eut l’effet modérateur d’obliger les USA, le R-U, la France et Israël à renoncer dans l’immédiat à leurs menaces de frappes unilatérales contre l’Iran et la Syrie. Le mauvais coté est que cela accule les USA et leurs alliés à recourir à des tactiques secrètes et criminelles impliquant des insurrections et des guerres civiles fabriquées – c’est-à-dire le « Printemps arabe » (voir plus loin).
La question-clé est de savoir ce qui est nécessaire – quelle atrocité doivent commettre les puissances occidentales – pour que la Russie commence à agir comme un Mur solide, disant aux puissances occidentales en termes non-voilés : « Nous ne vous laisserons pas aller plus loin ; nous n’en tolérerons pas plus ! ». Si et quand la Russie fera finalement cela, les puissances occidentales reculeront-elles ou tenteront-elles de renverser le Mur russe ? C’est la question-clé parce que c’est d’elle que dépend le déchaînement ou non de la Troisième Guerre mondiale dans un futur proche.
Plus important, concernant le processus de prise de décisions de l’Occident, tout ce que nous disons sur la Russie est aussi valable pour la Chine que les Maîtres du Pouvoir Mondial voient comme leur véritable ennemi à long terme, du fait de son énorme croissance économique, politique, démographique et militaire, et de son contrôle géopolitique croissant sur le bassin du Pacifique et l’Océan Indien.
Le cas de la Chine
En tant que grande puissances aériennes et navales, les USA et le R-U comprennent bien que la Chine a beaucoup plus d’options que la Russie pour contrôler les principaux océans, car la Russie est fondamentalement une puissance terrestre et enfermée par les glaces. Ajoutons à cela que la Chine détient plus de deux trillions de dollars en bons du Trésor US et un autre trillion en euros, et alors nous commençons à comprendre que la Chine détient la commande financière qui peut déclencher un effondrement soudain de l’hégémonie du dollar US.
Nous devons cesser de penser uniquement en termes économiques et financiers comme le font généralement les Occidentaux, qui en concluent que la Chine n’inonderait jamais les marchés internationaux avec un ou deux trillions en bons du Trésor US parce que cela détruirait leur valeur et, par un processus de boomerang, aurait un impact négatif sur la Chine elle-même dont les réserves s’évaporeraient.
Mais la Chine – l’Empire de Dix Mille Ans – a un processus de pensée différent. La Chine attend le bon moment lorsqu’elle joue aux échecs avec l’Empire Adolescent américain. La Chine pourrait même décider de jouer une carte géopolitique – et non financière ou économique –, en sacrifiant toutes ses réserves en dollars simplement pour détraquer la cavalerie monétaire du Béhémoth US avec laquelle ce dernier finance sa gigantesque machine militaire. La Chine tirera-t-elle les premiers coups géopolitiques sur la scène financière mondiale ?
En 2010, Wikileaks a rapporté qu’en 2009 le Premier ministre australien d’alors Kevin Rudd a discuté avec la Secrétaire d’Etat US Hillary Clinton de la meilleure manière de traiter avec la Chine, tous deux exprimant leurs craintes concernant son ascension rapide et sa réserve de milliards de dollars de dette US, poussant Hillary à demander : « Comment traiter durement avec son banquier ? ». Tous deux conclurent que les puissances occidentales devaient tenter d’« intégrer la Chine dans la communauté internationale, tout en préparant aussi un déploiement de force si tout se passe mal ».
Le Pentagone sait très bien que son ennemi à long terme après 2020 est la Chine. D’après US News & World Report, Aaron L. Friedberg – ancien proche conseiller de Dick Cheney, membre du PNAC [3] et du Council on Foreign Relations, et professeur à l’Université de Princeton – a déclaré que les USA ne devraient épargner aucun effort pour « maintenir le dragon chinois dans sa tanière » parce que « la force dissuade l’agression », et averti que « cela coûtera de l’argent ». En gardant la Chine à l’esprit, on comprend mieux les actions des USA dans d’autres lieux éloignés, en tant que tremplins directs ou indirects sur la route de la Chine.
Prenons le Moyen-Orient, par exemple, où le positionnement géopolitique US et leur contrôle des réserves pétrolifères sert aussi de tête de pont sur le Heartland de la Russie et peut servir à couper les sources de pétrole de la Chine – notamment à partir de l’Iran.
Wikileaks a aussi révélé que Kevin Rudd a dit à Hillary Clinton que la Chine était « paranoïaque concernant Taiwan et le Tibet », ajoutant que « l’Occident devrait promouvoir une communauté Asie-Pacifique afin d’émousser l’influence chinoise ». C’est encore un autre exemple du double discours et de la présentation tendancieuse des Occidentaux, parce que contrairement aux USA et aux Européens, la Chine n’a pas d’ambitions hégémoniques mondiales.
La Chine cherche plutôt à rester la puissance dominante dans le bassin Asie-Pacifique, en repoussant l’intrusion, le colonialisme et l’ingérence traditionnels de l’Occident.
Le pire scénario de cauchemar de l’Occident – comme le nota Samuel Huntington dans sa théorie du « Choc des Civilisations » dans les années 1990 – est si la Chine atteint deux objectifs géopolitiques clés vers lesquels elle progresse lentement mais sûrement :
- Etablir des liens, une coopération et un accord plus étroits avec la Russie et l’Inde sur le continent asiatique, et
- Négocier une coopération plus étroite et surmonter la défiance du passé avec le Japon. Si le Japon et la Chine s’accordent sur une stratégie géopolitique commune comme la France et l’Allemagne le firent après la Seconde Guerre mondiale (conduisant à l’Union Européenne), alors toute la puissance de la région Asie-Pacifique avec les deux tiers de la population mondiale seraient intouchables pour l’Occident. Imaginez seulement le mariage de la technologie de pointe japonaise avec les ressources et la main d’œuvre chinoise !
Les cinq types de guerre
Quand Report From Iron Mountain fut rédigé dans les années 60, ses auteurs allèrent jusqu’à étudier si des substituts pouvaient être mis en œuvre à la place de la guerre, mais – hélas – ils conclurent que la guerre devait être maintenue, et même améliorée dans son efficacité. La guerre pourrait cependant prendre des formes inattendues et plus subtiles. Les recommandations du Report incluaient :
- Un programme de recherche spatial géant dont le but était largement impossible à atteindre (un trou noir, dévoreur de budget et donc capable d’alimenter l’économie) ;
- Inventer un nouvel ennemi, non-humain : la menace potentielle d’une civilisation extraterrestre ;
- Créer une nouvelle menace pour l’humanité : par exemple, la pollution ;
- Mettre en œuvre de nouvelles manières de limiter les naissances : en ajoutant des drogues à la nourriture ou aux fournitures d’eau ;
- Créer des ennemis alternatifs fictifs.
Près d’un demi-siècle plus tard, certaines de ces recommandations ont été réalisées (par ex., 1 : un programme spatial militaire et civil), d’autres sont en cours de réalisation (3, 4, et, si la machine « Psy-Ops » d’Hollywood est une indication, la n°2 est en préparation), mais la 5 est la vraie clé de voûte : « Créer des ennemis alternatifs fictifs », que nous avons beaucoup vus récemment : l’Irak, l’Afghanistan, la Serbie, la Libye, le Venezuela, Cuba, la Corée du Nord, le Terrorisme islamique, et maintenant l’Iran et la Syrie.
L’immense problème qui se dresse devant l’humanité est que les USA ont de plus en plus recours à des méthodes de guerre secrètes, clandestines et technologiques, de préférence à des invasions ouvertes, car le Vietnam, l’Irak et l’Afghanistan ont fait vraiment mauvais effet dans les Informations du soir…
Ainsi, il y a fondamentalement cinq types de guerres utilisées par les Maîtres du Pouvoir Mondial à travers leurs instruments USA, R-U et OTAN, chacun étant caractérisé par une complexité croissante de guerre psychologique [PsyWar] et stratégique-logistique :
Invasion militaire – Clairement visible, très territoriale et utilisant une force militaire et une force économique écrasantes. Ainsi que le recommande la Doctrine Colin Powell des années 90, « les USA ne devraient faire la guerre à des ennemis étrangers que lorsque la puissance militaire américaine est si écrasante que la victoire est garantie ». Une doctrine plus impitoyable peut-elle être imaginée par une grande puissance ? Des couards bombardant des gens à l’autre bout du monde, en utilisant une commande électronique et un écran à partir d’une installation sécurisée.
Coup d’Etat militaire – Identifier les éléments dissidents et félons à l’intérieur des forces armées du pays-cible, les inciter à renverser les autorités légales locales et les soutenir avec des armes, de l’argent, une couverture médiatique mondiale et locale « positive » et un appui diplomatique. Une méthode favorite utilisée contre l’Amérique Latine dans les années 50, 60 et 70, elle est encore utilisée ici et là, comme le montre le cas de l’Egypte.
Coup financier – Consiste à d’abord acculer un pays dans le bourbier d’une « dette souveraine » impayable face aux puissantes méga-banques mondiales. Puis, quand le pays-cible ne peut pas rembourser cette dette, les banksters envoient les sangsues du FMI et de la Banque Mondiale, soutenus par les médias mondiaux et les agences de notation. Ils provoquent des difficultés économiques et sociales, un effondrement financier et monétaire conduisant à un bouleversement social général, et donc « justifiant un changement de régime ». Dans toute l’Amérique Latine ils perfectionnèrent le « Modèle de la Dette souveraine » qui est maintenant utilisé contre la Grèce, l’Espagne, l’Italie, l’Irlande et – bientôt – le R-U et les USA.
Coup social – Consiste à financer des activistes politiques pour provoquer un changement de régime contrôlé dans le pays-cible. Ici les ambassades des USA, du R-U ou d’Israël locales soutiennent toutes sortes de groupes dissidents en leur accordant un large financement et une large couverture médiatique, plus la logistique pour générer des troubles de rues constants, qui finissent par constituer quelque parti ou mouvement politique amical envers les USA. Dans les années 80, ils utilisèrent les dénommés mouvements des « droits de l’homme » en Amérique Latine, les « Mères de la Place de Mai » en Argentine étant un exemple-type [4].
Guerre civile fabriquée – Consiste à financer, armer et soutenir des groupes d’« opposition » militarisés contre le gouvernement en place du pays-cible. Normalement, un conseil de « libération nationale » ou un « conseil » de ce genre est constitué, comme en Libye, en Egypte, en Syrie et ailleurs, autour duquel d’autres groupes militants, bandits et mafias peuvent évoluer. Ici, la CIA, le MI6 et le Mossad jouent un rôle-clé et, dans les cas de la Libye et de la Syrie, des ramifications de la CIA comme Al-Qaïda jouent aussi un rôle fondamental de « combattant de la liberté ». Au Moyen Orient, ils nommèrent cela le « Printemps arabe », le présentant à l’opinion publique mondiale comme un combat spontané, authentique et légitime pour la liberté, mené par la population locale contre des régimes soi-disant répressifs et autoritaires.
Ainsi, on tire parti de conflits locaux prêts à exploser : des régimes qui sont au pouvoir depuis trop longtemps (comme en Egypte et en Libye) ; des divisions religieuses (chiites contre sunnites). Ce n’est pas une surprise d’apprendre que Bassma Kodmani, « membre du bureau exécutif et directrice des affaires étrangères » au Conseil National Syrien, assista à la Conférence du Bilderberg en juin dernier en Virginie, aux USA [5].
Dernièrement, l’auteur de cet article a été informé de la montée d’un « Printemps d’Amérique Latine » qui tire parti des graves tensions sociales et politiques dans toute l’Amérique Latine et reflétant l’immense fossé qui existe entre les très riches et les très pauvres. Normalement, les riches sont très alignés sur les USA et les pauvres ont des dirigeants qui désignent naïvement « l’exploitation commerciale yankee » comme seule coupable, passant à coté de facteurs politiques et sociaux fondamentaux.
Des signes de ce futur « Printemps latino-américain » peuvent être vus dans le récent coup d’Etat orchestré par le groupe de Monsanto au Paraguay, la fraude électorale à l’odeur d’argent au Mexique, et la militarisation US croissante en Colombie et ailleurs dans la région.
Souvent ces types de guerre commencent à un niveau plus faible – disons, un coup social – et sont ensuite transformées en insurrection et en guerre civile complète si cela convient aux objectifs des Maîtres du Pouvoir Mondial. La Libye, la Syrie et l’Egypte en sont des exemples.
Quoi, Pourquoi, Quand et ou
Mais que signifie tout ceci exactement ? Fondamentalement, nous pouvons voir qu’un tel chaos orchestré par les Maîtres du Pouvoir Mondial, bien que localement chaotique dans des pays et des régions spécifiques, conduit en réalité à un « nouvel ordre mondial » à une échelle mondiale.
La partie « chaos » est déployée pour détruire des pays entiers, spécialement ceux qui ont tenté de préserver leur souveraineté nationale d’une manière ou d’une autre. C’est une caractéristique-clé partagée par tous les « Etats-voyous » attaqués – Libye, Irak, Serbie – avant d’être envahis. La même chose est valable pour des cibles actuelles comme la Syrie, l’Iran, Cuba, le Venezuela, la Corée du Nord et l’Equateur. Les Etats plus souverains peuvent être affaiblis, au plus grand profit des mondialistes qui, après tout, veulent fondamentalement nous entraîner tous vers un unique Etat mondial, ressemblant au communisme, sous leur contrôle total.
Tous ces « printemps » arabes (et latinos), invasions, zones d’interdiction de vol, sanctions ; toute cette rhétorique contre les « Etats-voyous », sont des mesures de préparation du terrain destinés à positionner les puissances occidentales et leurs alliés en vue de l’assaut final contre l’Asie, ce qui signifie la guerre avec la Russie et la Chine.
Bien sûr, une telle guerre serait en grossière contradiction avec la Doctrine Powell. La Chine et la Russie sont très puissantes, donc le fait de les embêter comporte de gros risques. Si – que Dieu nous protège ! – on en arrive un jour à une guerre entre la Chine et la Russie d’une part et l’Occident d’autre part, entraînant d’autres puissances comme l’Inde, le Pakistan et le Brésil, cela n’arrivera probablement pas dans l’immédiat. Cependant, c’est ce qui se profile au-delà du seuil de 2020. Ses préliminaires sont en train de se jouer aujourd’hui dans divers points chauds.
Pourquoi tout cela est-il fait ? Peut-être que la surextension impériale et le dollar énormément surévalué qui a sauvé les Banquiers du Pouvoir Financier (ne dites pas cela trop fort !) ont acculé les Elites occidentales dans un coin irréversible et intenable.
C’est comme au jeu d’échecs : que faites-vous quand tous les coups possibles mènent à l’échec et mat ? Eh bien, fondamentalement, vous avez deux « options sur la table » : (1) admettre la défaite, ou (2) renverser la table de jeu et… sortir votre revolver.
Adrian Salbuchi http://www.voxnr.com/cc/di_antiamerique/EFAEZyApkuOIAIUkri.shtml
notes
1] Voir Zbigniew Brzezinski, 14 octobre 2011, discours d’acceptation du Jury du Prix Tocqueville, attribué à Brzezinski par l’ancien président français Valéry Giscard D’Estaing. Sans surprise, tous deux appartiennent à la Commission Trilatérale Rockefeller/Rothschild, un organisme décisionnel clé « riche et puissant ».
[2] Originellement publié en 1967 ; republié en 1996 par la Free Press (Simon & Schuster).
[3] PNAC – Project for a New American Century [Projet pour un Nouveau Siècle Américain] ; le think-tank néoconservateur de la fin des années 90, qui conçut et planifia les invasions de l’Afghanistan et de Irak, promouvant les intérêts stratégiques d’Israël au Moyen Orient, qui servirent de plan de travail pour les politiques US d’après le 11 Septembre jusqu’à nos jours.
[4] Son dirigeant Hebe Bonafini est connu pour avoir détourné des millions de dollars.
[5] Voir le site official du groupe de Bilderberg : www.bilderbergmeetings.org/participants2012.html. La nationalité de Mme Kodmani est typiquement décrite comme « internationale ». Elle sert très bien ses maîtres internationaux.
Adrian Salbuchi est un analyste politique, auteur, speaker et animateur de débats radiophoniques en Argentine. Il a publié plusieurs livres sur la géopolitique et l’économie en espagnol, et récemment publié son premier e-Book en anglais : The Coming World Government: Tragedy & Hope ? qui peut être commandé sur son site web www.asalbuchi.com.ar, ou des détails peuvent être demandés par E-mail à arsalbuchi@gmail.com. Salbuchi a 58 ans, marié, avec quatre enfants adultes, et travaille comme consultant stratégique pour des sociétés argentines et internationales. Il est aussi fondateur du Projet de la Seconde République en Argentine, qui se développe internationalement (visitez : www.secondrepublicproject.com).
Cet article a paru dans le magazine New Dawn No. 134 (Sept-Oct 2012).