La généralisation de l’automatisation dans tous les secteurs de l’économie va se poursuivre au cours de la prochaine décennie. Cette automatisation va nous enrichir sur le long terme, mais à court terme, le remplacement du travail humain va créer beaucoup de problèmes, notamment parce qu’aucun gouvernement ne se prépare à cette révolution, affirme The Economist.
L’innovation, et en particulier l’automatisation, a révolutionné notre façon de travailler. Elle a détruit des emplois, et en a créé de meilleurs. Une société plus productive est une société plus riche, et l’augmentation de la richesse provoque une hausse de la demande pour des biens et des services de plus en plus sophistiqués. Aujourd’hui, on ne voit plus de pool de secrétaires, mais il y a de plus en plus de programmeurs et de designers web.
Pour les travailleurs, ce seront d’abord les inconvénients de cette évolution qui se feront sentir. Même si elle suscite la création de nouveaux emplois plus intéressants sur le long terme, à court terme, la tornade technologique provoquera un élargissement des écarts de salaires, et ce phénomène est susceptible de créer des tensions sociales et peut-être même politiques. Or, aucun gouvernement ne s’y est préparé.
Ce qui se passe actuellement n’est pas sans rappeler la Révolution Industrielle. A cette époque, ce sont essentiellement les détenteurs de capitaux qui ont profité des fruits de la hausse de la productivité. Il se passe sensiblement la même chose aujourd’hui : ce sont ceux qui possèdent les capitaux, et les salariés les plus qualifiés, qui ont le plus profité de la révolution numérique. Sur les 3 dernières décennies, les 1% les plus riches ont vu leur revenu passer de 9% à 22% du PIB mondial, alors que le reste de la population a vu le sien décroître de 64% à 59%.
Et ce n’est qu’un début, puisque l’automatisation ne fait que commencer. Jusqu’à présent, les emplois remplacés étaient des emplois impliquant des tâches routinières et répétitives ; mais les ordinateurs sont de plus en plus capables de prendre en charge des travaux plus compliqués, de façon plus économique et plus effective que les humains. Les activités de services sont les premières visées.
Selon une étude récente menée par des chercheurs de l’Université d’Oxford, 47% des emplois d’aujourd’hui pourraient être automatisés au cours des deux prochaines décennies.
Dans le même temps, des startups numériques ont inventé de nouveaux produits et services qui améliorent nos existences, mais elles créent très peu d’emplois. Lorsque Facebook a racheté Instagram en 2012, cette dernière comptait déjà 30 millions de clients, mais seulement 13 employés. Kodak, qui a récemment fait faillite, avait un effectif de 145.000 personnes à sa meilleure époque.
Le problème, c’est qu’il y a un décalage entre le moment où ces nouvelles activités détruisent des emplois, et celui où elles deviennent elles-mêmes de gros employeurs. Google emploie maintenant 46.000 personnes, mais c’est maintenant qu’Airbnb, une startup plus récente qui permet à des individus de louer leur logement à des touristes, menace les milliers d’emplois du secteur de l’industrie hôtelière.
Les conséquences sociales de cette automatisation sont énormes, parce que les emplois les plus vulnérables sont les moins qualifiés, alors que les compétences qu’elle réclamera, la créativité et l’expertise managériale, par exemple, sont les mieux rémunérées. Les salaires médians vont donc stagner, et les inégalités sociales vont donc encore s’accroître, et avec elles, les tensions qu’elles suscitent.
Les politiciens n’auront pas de réponse à ce phénomène : il est impensable d’arrêter le progrès, et la mobilité des capitaux et des cerveaux rendront impossible la mise en place de toute taxation punitive.
Le seul aspect sur lequel ils pourront agir est l’éducation. Les écoles doivent être modifiées pour favoriser la créativité afin de permettre aux futurs adultes de proposer des compétences complémentaires à celles des ordinateurs. Peut-être faut-il investir pour créer des écoles destinées à des enfants plus jeunes pour développer les capacités cognitives qui seront décisives pour leur potentiel futur. De même, il faudra mettre en place de la formation continue pour les adultes.
Dans ce nouveau monde, il y aura toujours des travailleurs qui se retrouveront écartés en termes d’emploi ou de salaire, parce qu’ils n’auront pas de compétences très demandées. Le mieux ne sera pas de décréter des augmentations de salaire minimum, qui pousseront les entreprises à toujours plus d’automatisation, mais de compléter leur salaire avec une allocation pour permettre à tous ceux qui travaillent d’avoir un revenu décent.
Commentaires
"...les compétences qu'ils réclameront" svp. Merci !