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Même pas besoin du gaz russe ?

L’Europe ne devrait pas se soucier du bluff de Poutine concernant un embargo sur le gaz. Les voies alternatives existent. C’est la thèse défendue par certains, notamment aux Etats-Unis. Mais qu’en est-il au juste ?

En début de semaine, en Sibérie orientale, Vladimir Poutine lançait, selon des mots cités par l’AFP, «le plus grand projet de construction du monde». Le gazoduc «Force de Sibérie» reliera les gisements gaziers de Iakoutie à la mer du Japon et à la frontière chinoise.

 

Avant l’énoncé, depuis la Mongolie cette fois, de son plan de paix en huit points pour l’Ukraine – qualifié de poudre aux yeux par Kiev – le président russe envoyait un message on ne peut plus clair aux Européens : si vous renforcez vos sanctions, Moscou peut couper le gaz.

10% du budget russe dépend des exportations gazières vers l’Ouest ? Plus pour très longtemps, les routes de l’Asie sont en chantier.

Dans le bras de fer engagé avec les Européens, le gaz est l’«arme nucléaire» de Vladimir Poutine. Cette perspective fait trembler l’est du continent. Il en a déjà usé par le passé avec l’Ukraine.

Mais cette menace est-elle crédible ? Certains en doutent. D’abord, quoi qu’en dise Moscou, la perspective d’une alternative chinoise pour la vente de ses hydrocarbures n’est pas pour demain et il en coûterait très – trop ? – cher à son économie avant que ce relais opère.

Ensuite, et surtout, l’Europe pourrait en réalité d’ores et déjà se passer du gaz russe. C’est la thèse que défend par exemple Matthew Bryza, ancien diplomate américain et directeur du Centre international des études de défense à Tallinn. Dans un texte publié dans le Financial Times, il explique comment l’Europe peut couper court au bluff de Vladimir Poutine.

Première étape : la Commission européenne doit s’assurer que toutes les installations de stockage de gaz naturel des pays membres soient remplies. Cela constituerait une réserve de 85 milliards de m3, plus de la moitié des 163 milliards de m3 importés de Russie en 2013.

Deuxième étape, l’UE doit explorer le marché international du gaz naturel liquéfié (GNL) pour les 78 milliards de m3 restants, ses terminaux étant par ailleurs sous-utilisés. Les capacités existent. Du coup, «l’UE pourrait passer l’hiver sans importer une molécule de gaz russe», explique Matthew Bryza. Troisième et dernière étape, la Commission doit créer un fonds de 20 milliards d’euros pour financer ces achats, garantis par les Etats, un peu sur le modèle du Fonds de stabilité financière.

Ce plan – apparemment limpide – est celui d’un critique invétéré de Moscou depuis des années et d’un proche des milieux pétroliers américains. Lorsqu’il évoque les pistes pour suppléer au gaz russe, il commence par les Etats-Unis – devenus exportateurs –, l’Australie (à l’autre bout du monde) et le Mozambique. Est-ce sérieux ?

Les auteurs d’une étude de l’Institut d’économie de l’énergie de Cologne publiée cette semaine sont plus circonspects. Ils évaluent l’impact d’une coupure de gaz russe sur l’Europe sur un, trois, six et neuf mois.

Le premier pays touché serait la Finlande, dont 100% de l’approvisionnement dépend de Moscou. Après trois mois, la Pologne et la Turquie commenceraient à souffrir, de même que la République tchèque, la Hongrie et la Slovaquie. Après six mois, ce serait au tour de l’Allemagne, l’Autriche, la Suisse, la Grèce, les Balkans et l’Estonie. Après neuf mois, l’Allemagne, la France et l’Italie seraient sévèrement touchées.

Les autres pays, ceux bénéficiant de larges réserves ou d’un terminal GNL, seraient en grande partie épargnés. Les chercheurs allemands sont dubitatifs quant à un renouvellement rapide des sources d’approvisionnement sur un marché hautement spéculatif. La concurrence avec l’Asie serait rude et les coûts importants. Pour l’agence de notation Fitch, une décennie sera nécessaire à l’Europe pour se passer du gaz russe.

Dans l’immédiat, Bruxelles se prépare au pire. Mercredi, le commissaire européen à l’Energie, l’Allemand Günther Oettinger, évoquait le recours possible à une règle interdisant la sortie de gaz naturel liquéfié de l’UE et la limitation du gaz industriel en cas de crise pour préserver l’approvisionnement des ménages.

Vladimir Poutine appuiera-t-il sur le bouton rouge ?

Une chose est sûre, la guerre du gaz serait un désastre pour l’Europe aussi bien que pour la Russie. La Chine sourit à ce scénario, elle qui signe déjà des contrats pour du gaz russe avec un rabais de 40%.

Le Temps

http://fortune.fdesouche.com/354509-meme-pas-besoin-du-gaz-russe#more-354509

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