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L’immigrationnisme à Sciences-Po

 La très active association des anciens élèves de Sciences-Po a organisé, le 10 décembre dernier, une conférence d’actualité sur la question : « Immigration clandestine ; une nouvelle vague ? ».

Ce titre semblait résonner comme un cri d’alarme poussé par des veilleurs attentifs à l’égard d’un nouveau déferlement humain. Très vite il a été loisible de constater qu’il n’en était rien.

Des intervenants de la même ligne de pensée et un public qui l’était moins.

Trois intervenants étaient sur l’estrade et couraient peu de risques d’un profond désaccord réciproque.

Le plus connu était Benjamin Stora, historien institutionnalisé de la Guerre d’Algérie et « président du Conseil d’orientation du Musée de l’histoire de l’immigration », musée où, il y a quelques jours, l’hôte de l’Elysée commit un discours appelé à une célébrité comparable à celui prononcé par Pierre Laval le 22 juin 1942.

 

Henri Labayle est professeur de droit et spécialiste du droit européen de l’immigration et de la sécurité intérieure européenne. Il dirige le Réseau universitaire européen « Droit de l’espace de liberté, sécurité, justice ». Il représentait au sein du débat l’autorité de l’idéologie européenne en matière d’immigration.

Enfin, François Gemenne, enseignant et chercheur belge, expert des questions de géopolitique de l’environnement, représente, même s’il l’a peu exprimé en la circonstance, un courant de pensée important en faveur d’une gouvernance mondiale des migrations et qui vise, à terme, à superposer une autorité planétaire aux pouvoirs publics nationaux pour gérer celles-ci.

Peut-on rappeler aux organisateurs que le principe d’une table ronde est de permettre à des intervenants d’opinions opposées de confronter leurs points de vue pour le plus grand intérêt du public ? Cela, une fois de plus, n’a pas été le cas. Les échanges, à l’exemple de ceux de la table ronde de l’émission C dans l’air du 18 août 2014 avec les mêmes participants, ont été monocolores.

En revanche, il a été surprenant de constater que le public était partagé et que certains auditeurs ont montré une liberté d’esprit et de parole revigorante à l’égard des orateurs.

Un thème de la conférence d’actualité peu abordé

Le sujet de la conférence était censé être l’immigration clandestine. Ce thème est en prise directe avec l’actualité puisque les médias et les politiques, tel Eric Ciotti qui a présenté un rapport très alarmant à l’Assemblée nationale sur ce sujet, ne cessent de dénoncer l’engorgement du système d’asile français qui apparaît à bout de souffle. Cette situation dramatique a inspiré au gouvernement un projet de loi sur le droit d’asile qui est en cours de discussion au Parlement.

Or, pendant les deux heures du débat, le problème crucial que posent à la France les dérives du droit d’asile fut peu abordé. Alors de quoi fut-il question ? Une fois de plus l’assistance entendit les poncifs du message immigrationniste qui, en novlangue, oppose sa propre « sérénité » aux « fantasmes », aux « peurs » et aux propos « passionnels » du public tout en luttant contre les « idées reçues ». Surtout pas de « jugements simples » face à des « situations complexes ». Laissez parler les sachants !

Quelques informations biaisées pour commencer

D’emblée, H.Labayle affirma que les étrangers ne représentaient que 4% de la population en Europe.

 

Ce professeur feint de confondre étrangers et immigrés. Les étrangers sont des immigrés non naturalisés. Les immigrés directs et leurs descendants directs, qu’ils soient naturalisés ou non, représentent en France environ 12 millions de personnes, autour de 18% de la population française, et compte non tenu de l’ignorance du vrai chiffre des immigrés clandestins.

Si l’on écoute B. Stora, France et immigration sont les deux faces de la même bataille. Les immigrés ont porté le rayonnement intellectuel de la France. Pour B. Stora l’exemple emblématique est Picasso.

Encore une fois l’amalgame est grossier et relève d’une vision qui oublie la réciprocité. Si la France des années folles a accueilli beaucoup d’artistes et d’auteurs étrangers c’est que notre pays offrait un climat de liberté et une hospitalité qui n’existaient nulle part ailleurs. Toutefois Hemingway est resté un auteur américain et Foujita est reparti au Japon. Par ailleurs, l’effervescence culturelle purement française entre les deux guerres fut extraordinaire.
La France, on l’oublie trop souvent, a, entre les deux guerres, donné l’hospitalité à environ 170.000 juifs fuyant un contexte hostile alors que les autres pays, notamment anglo-saxons, manifestaient une grande réticence. Les Russes blancs échappant à l’horreur communiste ont été heureux de trouver chez nous un havre accueillant. Reconnaissants envers notre pays, ils ont, au terme d’une intégration parfois très dure, honoré leur dette à son égard et produit relativement peu de délinquants, de trafiquants de drogues et de violeurs.

Non, l’Europe n’est pas historiquement une terre d’immigration. C’est une terre d’invasion et il n’est pas exclu que cela continue. Oui, c’est une terre de diversité, mais intra-européenne. L’Ukraine partagée entre des Orientaux orthodoxes et des Occidentaux catholiques est un bon exemple. On joue sur les mots.

A la question posée sur l’apport de l’immigration à la France, B. Stora a répondu à côté et insisté sur le fait que de nombreux immigrés possèdent un bon niveau professionnel. C‘est vrai mais pour lesquels ? L’immigration de travail ne représente guère plus de 10% de l’immigration légale. La part la plus élevée est celle du regroupement familial et de l’immigration clandestine.

F. Gemenne reproche à la société française d’avoir élevé « des frontières intérieures qui empêchent les immigrés de réaliser leur projet économique ». C’est faux. La France a toujours cherché à intégrer puis assimiler les immigrés : Italiens, Espagnols, Portugais, Polonais, etc. L’école a été un vecteur déterminant. Aujourd’hui, devant cette marée humaine le système d’assimilation a explosé et ne fonctionne plus. L’impéritie de la caste dirigeante française débordée par le nombre, l’influence de la religion a poussé les immigrés, notamment musulmans, à se constituer en ghettos, puis en communautés.

 

F. Gemenne considère que gauche et droite sont tombées dans le piège tendu par « l’extrême droite » qui pose les bonnes questions. Mais il n’existe pas de piège. Il y a seulement une réalité dont elles sont responsables et dont elles nient l’existence.

Une dialectique à décoder

Les immigrationnistes ont un talent certain pour embarquer les auditeurs dans des considérations savantes qui ont pour objectif de faire diversion et d’enliser les oppositions. Le décodage de cette dialectique nécessiterait un livre. Contentons-nous de quelques exemples que nous avons entendus.

F. Gemenne a insisté sur la diversité des pays européens face à l’immigration et sur la concentration des demandeurs d’asile sur seulement cinq pays de l’Union européenne. Et alors ? Que la Lituanie ne soit pas touchée pour l’instant par l’immigration n’empêche pas que l’Europe occidentale est submergée, qu’en France le droit d’asile est détourné et que c’est cela qui nous préoccupe.

Qu’il n’y ait pas qu’une immigration Nord/Sud et que les flux migratoires touchent beaucoup de pays limitrophes comme la Turquie et le Liban sont des réalités. Cela n’empêche pas que, chaque année, l’équivalent d’une ville comme Rennes entre en France et que ce n’est plus tenable.

Que les demandes de visa proviennent dans l’ordre de Russie, d’Ukraine et du Maghreb est à vérifier et peut-être vrai pour l’Europe. Cela ne l’est pas pour la France principalement ciblée par le Maghreb et l’Afrique subsaharienne.

Le décodage de cet « enfumage » ne serait possible que si, une fois pour toutes, il y avait lors de ces débats égalité des intervenants en nombre et en qualité. A Sciences-Po, et c’est regrettable pour les anciens élèves, ce ne fut pas du tout le cas.

L’internationalisation d’un problème considéré comme mondial

La dialectique des intervenants joue sur plusieurs niveaux qui sont choisis selon les besoins du moment : le niveau individuel, celui de la nation, celui de l’Europe et celui du monde entier. Chacun présente son petit fonds de commerce.

Pour F. Gemenne la question de l’asile n’est pas une affaire nationale mais internationale. Pourquoi s’attacher à sauver les chrétiens persécutés d’Orient et oublier les femmes violées du Kivu ou du Congo ? Un tel choix à caractère national et confessionnel serait bien évidemment intolérable à ses yeux.

H. Labayle a tenu un discours quelque peu contradictoire. Selon lui, les Etats-nations européens, affaiblis face aux géants de demain comme la Chine et l’Inde, ne peuvent renoncer à leur mission de protection ; mais, plutôt que d’être tentés par le « repli sur soi», vieille tarte à la crème des immigrationnistes, ils doivent reconnaître leur échec. La bonne échelle est désormais à ses yeux l’échelle européenne.
Cependant il constate et souligne la faillite de l’UE dans ce domaine. L’absence de solidarité des pays européens à l’égard de l’Italie a conduit ce pays à abandonner « Mare nostrum » au profit de « Triton » géré par Frontex. Lorsque l’on sait l’inefficacité de cet organisme européen face à la déferlante actuelle il est loisible de se demander si confier la gestion du problème à Bruxelles est une solution adaptée.

La submersion est présentée comme un phénomène inéluctable

Si on écoute F. Gemenne, qu’on le veuille ou non, il existe un processus de restructuration planétaire. Le monde entier est attiré par les lumières de l’Occident. C’est un phénomène inéluctable auquel il est vain de vouloir s’opposer. Il n’y a pas de remède ni de solution. Les frontières ne servent à rien. Leur système a volé en éclats. Le jour où le migrant a décidé de partir c’est perdu. Elever des murs constitue une illusion et n’a aucun impact sur les fleuves migratoires. Cela rend simplement les migrations plus dangereuses.

On connaît ce type d’argument. Il est à rapprocher du fameux sens de l’histoire lénino-marxiste qui était opposé à tous ceux qui défendaient la démocratie occidentale pendant la Guerre froide. Nous avons vu quelle orientation a pris ce sens ! C’étaient les mêmes propos que tenaient les collaborateurs pendant l’Occupation : ne rêvez pas, ils ont gagné, ils sont les plus forts, faire quelque chose est une illusion et ne sert à rien, le tout accompagné d’un hochement de tête plein de commisération.

Une leçon de morale

Après l’internationalisation et l’inéluctabilité du phénomène nous arrivons au troisième pilier de la trilogie : la morale. F. Gemenne, qui est très fort sur ce thème, a rappelé opportunément que le 10 décembre était la Journée internationale des Droits de l’homme. Pour lui la question fondamentale est contenue dans l’article 13 de la Déclaration universelle des Droits de l’homme : « Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays. » Il soutient que nos pays l’ignorent alors que les droits de l’homme sont au cœur du projet européen. La contradiction est, selon lui, flagrante et les conséquences criminelles : 3.500 personnes noyées en 2014.
Il semble oublier deux choses :

-la Déclaration universelle n’a jamais proclamé que l’on avait le droit de s’installer dans le pays que l’on veut ; cette interprétation est particulièrement malhonnête ;

-par ailleurs, des pays ont réussi à contrôler l’immigration clandestine ; c’est aujourd’hui le cas de l’Australie qui a mis en place un système de contrôle de ses côtes qui permet d’éviter les décès par noyade.

Leurs solutions

Un grand reproche adressé à ceux qui s’opposent à l’immigration incontrôlée est de proposer des solutions du type « YAKA ». Les intervenants de Sciences-Po n’ont pas été de reste. La société européenne doit s’ouvrir et réfléchir aux causes du phénomène migratoire, Elle doit changer son regard et appréhender les nouvelles réalités en engageant la lutte contre les discriminations.
Le discours politique doit s’inverser. Si B. Stora est sceptique à l’égard des politiques, il fait tout de même cet aveu : les seuls à tenir le bon discours ce sont les patrons.

Comme on peut le voir, il y eut peu de solutions concrètes proposées. Une timide jeune femme, au fond de la salle, demanda pourquoi il n’était pas envisagé d’accueillir des immigrés pour les employer, les former et les rendre à leur pays pour qu’ils y soient utiles. Elle demanda aussi ce qu’il en était de l’immigration choisie. H. Labayle bondit pour clore de manière péremptoire ce sujet brûlant : « L’immigration choisie est un échec ». Et au Canada, c’est aussi un échec ? Quant à la première question il n’y fut pas répondu. Comment procéder au Grand Remplacement, qui est la seule chose qui compte, si les immigrés n’étaient que de passage ?

Conclusion. Une grande oubliée : la France

Pendant cette conférence la France fut la grande oubliée. Le projet économique, social, familial des candidats à la migration, l’interprétation fallacieuse des Droits de l’homme, le caractère mondial des migrations, le caractère nécessairement européen de toute politique migratoire des pays du Vieux Continent ont représenté les seules références qui comptaient.

L’utilité de l’immigration dans un contexte dramatique de chômage, le poids sur les finances publiques, les répercussions dramatiques sur la vie des Français et les conséquences de ce mascaret humain sur le destin de la civilisation française n’ont pas réellement représenté des sujets d’intérêt pour les intervenants. B. Stora a bien évoqué l’émigration définitive de Français jeunes et de bon niveau (80.000 par an, selon Jean-Paul Gourévitch) et l’a expliqué par la mondialisation. Il ne lui est visiblement pas venu à l’esprit que les deux phénomènes constituaient les deux faces du Grand Remplacement et de la disparition de la France.

 André PosokhowConsultant pour Polémia, 26/12/2014

Voir : Rapport Posokhow :

http://www.polemia.com/84-milliards-cout-budgetaire-de-limmigration-selon-le-rapport-posokhow/

http://www.polemia.com/limmigrationnisme-a-sciences-po/

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