L'habile emphase avec laquelle, ce 13 janvier le Premier ministre est intervenu à l'Assemblée nationale ne saurait nous tromper.
Certes, sa rhétorique a été fortement applaudie, quatre fois ovationnée, quand le chef du gouvernement s'est posé en garant de ce qu'il appelle "l'esprit du 11 janvier". Les députés, de tous les partis, entendaient sans doute ainsi s'associer à ce que l'on a pu ressentir comme une sorte d'émotion nationale et populaire plus ou moins unanime. Celle-ci s'est déployée de toute évidence bien au-delà des petites manœuvres qui avaient précédé l'organisation de la manifestation et dissuadé de nombreux Français d'y participer – précisément ceux qui, peut-être, ont réfléchi au-delà de l'émotionnel.
Certes aussi, Manuel Valls a énuméré quelques pistes concrètes : "améliorer" le système des écoutes pour le rendre "plus performant", ou encore généraliser l'isolement en prison des islamistes radicaux. On prépare par ailleurs une loi sur le renseignement, et on va rapidement pouvoir mettre en œuvre la loi antiterrorisme votée le 13 novembre 2014.
Annonce aussi, qui laisse un peu rêveur : "Je ne veux plus qu’il puisse y avoir, sur internet, ces mots effrayants, ces mots de haine que j’ai combattus"
Or, justement, une fois mesuré l'effet de cette éloquence d'un jour, on peut se permettre de disséquer dans les divers membres de phrase : ils contiennent, juxtaposées, toutes les contradictions d'une coalition qui répugne à s'ouvrir à droite dans la mesure même où elle se ferme à gauche.
"Oui, la France est en guerre contre le terrorisme, le djihadisme et l'islamisme radical. La France n'est pas en guerre contre l'islam et les musulmans, a-t-il martelé, la France protégera tous ses concitoyens avec détermination et sang-froid."
On ne veut pas vraiment qualifier le terrorisme par sa motivation islamiste radicale ; au mieux, on additionne les deux nuisances : la nuance ne saurait être tenue pour innocente, quand M. Hollande, de son côté, ne prononce même pas les mots qui déplaisent.
Le flou du contenu saute aux yeux. Or, ce passage contradictoire du discours, cherchait aussi à recouvrir une alliance dans laquelle figurent les éléments les plus sectaires de la gauche, et parmi eux le parti communiste.
Car la ligne de ces étranges alliés tend à nier de façon explicite, à longueur d'articles et de prises de positions :
1° que la situation s'apparente à celle d'une guerre d'un type plus ou moins nouveaunbsp;;
2° que l'inspiration des terroristes puise dans un certain islamisme radical.
Comment s'étonner que cette gauche-là ait donc tenu à dénaturer une fois de plus, à détourner de son objet un mouvement spontané́ d’unité́ nationale.
Ses représentants les plus actifs ont marqué, dans le passé, à de nombreuses reprises leur complaisance à l'égard du terrorisme islamique. En 2012 ce sont deux villes communistes du Pas-de-Calais, Calonne-Ricouart puis Grenay, qui osaient décider de faire du terroriste Georges Ibrahim Abdallah un "citoyen d'honneur de la ville". En 2013 ce fut au tour d'Everbecq, maire communiste de Bagnolet. Cette provocation, saluée par les collectifs activistes, entraîna une protestation du CRIF et la perte de la ville aux élections municipales de 2014, et, enfin, en juillet 2014, l'annulation de cette décision par le tribunal administratif de Montreuil.
Observons comment dans les événements de la semaine écoulée, les mêmes ont su tirer la couverture à eux, opposant leur sectarisme aux aspirations légitimes à une véritable cohésion nationale
Dès le 7 janvier, lorsque s'est diffusé "spontanément" le rendez-vous place de la République consécutif à l'attentat contre Charlie Hebdo la tactique semblait choquante, pour ne pas dire obscène : en appeler au "rassemblement des partis de gauche contre le fascisme" plutôt qu'à l'union nationale contre l'islamo-terrorisme sentait le vieil appareillage moisi.
Au début cette manœuvre récupératrice du PCF semblait simplement ressortir de sa dialectique ordinaire. En toutes circonstances en effet il faut à cette vieille nuisance, que nous croyons édentée, procéder par unification/exclusion. "Tous ensemble ouais", mais pas les affreux. "Tous" : sauf ceux que depuis l'accession de Dimitrov à la tête du Komintern en 1935 on appelle invariablement des "fascistes". Ce terme épouvantail est ressorti des greniers par le président russe en mai 2005 dans sa tribune libre au Figaro destinée à requalifier Staline comme héros de la démocratie.
Il a fallu ce qu'on peut appeler "l'affaire Bougrab-Charbonnier" pour que l'on comprenne un peu mieux la persistance de ce sectarisme. On a pu découvrir, un peu tardivement, que le directeur de ce journal "anar", "gauchiste", provocateur, etc. se rattachait lui-même au communisme et que son incartade avec une Jeannette Bougrab, UMP, était ressentie comme une sorte de mésalliance, une impureté que vouliat cacher son propre entourage robespierriste.
Personne n'y faisait peut-être attention, peut-être même pas dans son équipe rédactionnelle, – mais Charb lui-même le rappelait encore lors de la fête de L'Humanité de juin 2014 à Toulouse : "j'ai quasiment toujours voté communiste".
Tant que le gouvernement Valls ne se sera pas débarrassé de cette alliance à vocation traîtresse, sa crédibilité antiterroriste restera sérieusement compromise.
JG Malliarakis http://www.insolent.fr/