La France détruit son territoire à vitesse grand V. C’est ce que l’on apprend à la lecture d’une enquête consacrée à l’évolution des villes depuis 30 ans publiée le 15 avril dernier par l’Insee (1).
Les chiffres, parfois, sont terribles. Entre 1982 et 2011, la population des villes s’est accrue de 23%, en gagnant près de 9 millions d’habitants supplémentaires. Le problème est que l’espace urbain a, lui, augmenté beaucoup plus rapidement : il a gagné… 42%, en passant de 84000 km² à 119000 km². Dit comme cela, évidemment, cela peut laisser de marbre. Tout change quand on sait que ces 35000 km² perdus correspondent à l’équivalent de… sept départements français. C’est comme si, en l’espace d’une génération, nous avons collectivement bétonné l’équivalent de l’Ariège, de la Haute-Loire, du Jura, des Bouches-du-Rhône, de la Lozère, de la Mayenne et du Lot !
Bienvenue près des rocades et des zones d’activité commerciale
Les causes de ce phénomène sont connues. Depuis les années 1970, les Français cherchent à fuir les grands ensembles. Un mouvement encouragé par l’Etat, qui a mis en place des aides à la maison individuelle tandis que le déclin de l’agriculture encourage les élus ruraux, pour sauver leur école et leur bureau de poste, à accueillir les populations et les entreprises à la recherche de terrains disponibles.
Résultat : “L’urbanisme s’effectue pour l’essentiel sous forme d’étalement urbain, avec des lotissements, des rocades, des espaces commerciaux, des zones d’activité économique conçus sans l’intervention d’architecte ni d’urbaniste”, rappelle l’urbaniste David Mangin.
Une solution au vilain nom de densification
Bref, il est temps de changer de logiciel. La solution, au demeurant, existe. Elle porte hélas le vilain nom de densification ce qui, dans l’imaginaire collectif, renvoie inévitablement aux cités des années 1960 et 1970, synonymes de mal-vivre et de ghettoïsation. Autrement dit à un contre-modèle absolu. Fort heureusement, on sait aujourd’hui densifier intelligemment. “A Rotterdam, on construit desmaisons individuelles accolées les unes aux autres, avec des toits-terrasses: chacune possède un jardin sur son toit! C’est-à-dire qu’en plein centre d’une grande métropole, on parvient à recréer un mode de vie quasi identique à celui que les gens vont chercher en grande banlieue“, cite par exemple l’urbaniste Alain Cluzet.
Bref, une prise de conscience est amorcée. Et de premières réalisations concrètes sont engagées. Compte tenu de l’ampleur du problème, il en faudra bien d’autres…
Notes :
(1) Insee, la France et ses territoires. Fiche 2 : La hiérarchie des villes en France métropolitaine sur trenteans : stabilité globale et reclassements