Le président de la Catalogne espère transformer les élections régionales anticipées en plébiscite sur l’indépendance de la région à moyen terme.
Les indépendantistes catalans veulent jouer le tout pour le tout. En anticipant d’un an les élections régionales, dont la date a été fixée lundi au 27 septembre, le président catalan, Artur Mas, espère accélérer le processus vers une souveraineté irréversible.
Bien que le texte d’organisation des élections régionales se garde de toute référence à l’indépendance, le président espère une sorte de feu vert en vue d’obtenir à moyen terme la sécession de la région, qui pèse 20 % du PIB national.
Madrid, qui s’oppose farouchement au processus indépendantiste, n’a cessé, par l’intermédiaire des tribunaux, de faire avorter les différentes initiatives de l’Exécutif catalan, dont le référendum d’autodétermination.
Interdit par Madrid et sans valeur légale, le scrutin du 9 novembre 2014 avait obtenu 80 % de « oui » pour l’indépendance, pour 40 % de participation. Un bon score pour un scrutin libre.
Artur Mas, le président de la région, a assuré à l’avance que le décret d’organisation des élections régionales serait « juridiquement inattaquable », mais
Politiquement, l’élection constituera un plébiscite pour la liberté et la souveraineté de la Catalogne
a-t-il annoncé.
Les nationalistes catalans considèrent ce scrutin comme « plébiscitaire » : si la liste indépendantiste l’emporte, même avec une courte majorité, Artur Mas a prévenu qu’il n’y aura plus de retour en arrière ; les autorités catalanes se donneront alors six mois à Madrid pour « bâtir les piliers du nouvel État » (tribunal suprême, fisc, ambassades…).
« Nous sommes préparés », répète Artur Mas. Depuis plusieurs mois, son équipe travaille à la création d’une administration parallèle capable d’assurer le fonctionnement d’un futur État. Fin juillet, le gouvernement catalan a présenté son modèle d’administration fiscale en cas de sécession, et donné son aval à un décret-loi facilitant la transformation d’un institut de crédit public en une banque centrale de Catalogne. Il a aussi renforcé son réseau diplomatique afin de gagner à l’étranger des soutiens à sa cause.
De son côté, l’État central brandit l’article 115 de la Constitution, qui permet de transférer les prérogatives locales au niveau central : une humiliation pour les Catalans.
Nous ne tolérerons aucune propagande indépendantiste durant la campagne, nous exigeons le respect de la neutralité
a averti le chef du gouvernement, Mariano Rajoy, qui craint comme jamais un triomphe souverainiste. Une perspective réelle depuis que les partis indépendantistes de droite comme de gauche ont surmonté leurs divisions pour faire front commun aux régionales.
Leur liste, « Ensemble pour le oui », comprend le parti d’Artur Mas, Convergencia Democratica (CDC, conservateur), Esquerra Republicana (ERC, gauche), la deuxième force politique régionale, et d’influentes associations nationalistes ayant organisé des manifestations massives ces dernières années. Avec l’appui du petit parti anticapitaliste CUP, indépendantiste aussi, les formations de la liste comptent obtenir la majorité absolue au parlement régional, suffisante selon elles pour procéder à la séparation d’avec le reste de l’Espagne.
Pour saisir l’enjeu de ces élections du 27 septembre, il faut revenir en arrière. En 2010, le Tribunal constitutionnel espagnol a annulé, à la demande du parti conservateur espagnol, le PP, plusieurs dispositions essentielles du Statut de la région adopté en 2006 et qui donnait plus d’autonomie à la Catalogne. Cette décision a provoqué une poussée indépendantiste dans la région, qui est déjà une communauté autonome depuis 1978.
Elle dispose d’un gouvernement et un parlement propres. En outre, les autorités catalanes ont en charge les tribunaux, la police et l’éducation. La région qui pèse pour 20 % du PIB espagnol, ne dispose cependant pas de l’autonomie financière ; les catalans ont le sentiment de payer pour les autres et les coupes budgétaires ont encore accentué le sentiment séparatiste et celui d’être réprimés par le gouvernement central de Madrid.
Les Catalans ont fini par en avoir assez se voir bafoués et méprisés par leur État. Si l’on ne peut que les saluer pour cela (à quand le tour des Français ? ), il convient aussi de souligner que cette possible indépendance irait dans le sens des forces centrifuges qui visent à démanteler les Etats-Nations au profit des régions… une politique activement soutenue par Bruxelles.
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