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Quand les Polonais catholiques sont sceptiques..

Vous n’aurez guère entendu parler des élections polonaises et pour cause ! On savait depuis un certain temps que ces élections verraient la victoire des « conservateurs catholiques eurosceptiques ». À quoi bon en parler ?

La droite a gagné. Oui, la droite. On a trop voulu nous faire croire qu'être de droite consistait à appliquer des idées de gauche - les seules possibles ! - avec des nuances libérales. Or ces conservateurs catholiques honnis - des gens capables de récuser tout à trac l'Union européenne, la monnaie unique, la COP21 et l'avortement (entre autres...) - sont les représentants réels de la droite,dans un sens initial, qui pour nous n'appartient plus qu'aux livres d'histoire. Et encore...

Ce résultat est pourtant dans la logique de l'élection présidentielle qui, au printemps dernier, a porté Andrzej Duda, jeune député catholique, à la magistrature suprême.

La gauche aux élus absents

Le porte-parole de la présidence n'a pas tardé à souligner que la Pologne se trouvait désormais dans une « nouvelle situation politique ».

Si l'on analyse les chiffres sortis des urnes lors de ces élections, cette nouvelle situation apparaît clairement. Le parti Droit et Justice (PiS), de l'ancien président Lech Kaczynski mort en 2010 dans une catastrophe aérienne, obtient, avec 37,6 % des voix, 235 des 460 sièges de la nouvelle Assemblée, soit la majorité absolue. Une telle situation ne s'était jamais présentée depuis la fin du communisme en 1989. Et auparavant, sous l'emprise du Parti communiste, on ne peut pas dire qu'elle releva vraiment de l'exercice démocratique...

La Plate-forme civique (PO), c'est-à-dire le parti de droite libérale centriste, qui est celui de l'actuel président du Conseil européen Donald Tusk, n'a donc pas résisté à ses huit années de gouvernement. Elle n'obtient que 24,1 % des voix, soit 138 sièges.

Le mouvement anti système du rockeur Pawel Kukiz, le parti Nowoczesna (Moderne) du néo-libéral Ryszard Petru, et le parti paysan PSL, allié des libéraux sortants, se partagent, dans cet ordre, les sièges restants.

Et la gauche ? C'est bien simple, la gauche, dont le candidat à la présidentielle n'avait déjà obtenu que 2,5 % des voix, n'a aucun élu, aucun député ! Autrement dit, la Pologne, refroidie notamment par le spectacle des pays européens empêtrés dans le socialisme, a signifié à la gauche son congé.

Imaginons un instant ce que signifie une Assemblée où l'extrême gauche serait tenu par des libéraux centristes plutôt classés à droite. C'est un peu comme si, en France, l'extrême gauche parlementaire s'arrêtait à Hervé Morin et Jean-Louis Borloo. Pas de Manuel Valls, pas de Jean-Luc Mélenchon, pas de François Hollande ; pas même de François Bayrou. Refermons la parenthèse : il n'y a pas, chez nous, de conservateurs catholiques...

Mais l'on comprend que la gauche européenne ait tiqué, dénonçant, parce que décidément elle manque d'originalité, le populisme, la peur des migrants, etc. Il est vrai que, de Bruxelles à Paris, en passant par quelques autres capitales européennes, on peut se prévaloir d'avoir magistralement résolu la crise migratoire !

Crispations en vue

Au-delà de cette opposition à l'idéologie, le PiS devrait relâcher les liens de la Pologne avec l'Union européenne. Comme le souligne, un politologue local, les Polonais n'aiment pas qu'on leur impose leur politique de l'extérieur, de l'étranger : « Pour un Polonais, un étranger, c'est d'abord un occupant, un envahisseur, soit allemand, soit russe. »

L'une des premières décisions prévue, annoncée, sera de démanteler le bureau qui devait préparer l'entrée du pays dans la zone euro. Adieu donc à la monnaie unique...

Autre domaine sur lequel la Pologne risque de faire grincer bien des dents : le réchauffement climatique. Le moins que l'on puisse dire, c'est que le président Duda n'a rien d'un climato-maniaque comme François Hollande. Et, dans la perspective de la COP21 à Paris, il a déjà pris ses distances.

Andrzej Duda vient ainsi de déclarer que la Pologne opposait son veto à l'amendement de Doha au protocole de Kyoto sur les émissions de gaz carbonique. « Contraindre la Pologne à un accord international affectant l'économie, avec le coût social qui y est associé, doit être précédé d'une analyse détaillée sur son impact économique et juridique... Ces effets n'ont pas été suffisamment clarifiés », a-t-il souligné.

La Pologne n'entend donc pas démanteler son industrie du charbon pour les beaux yeux des grands prêtres de la religion climatique.

Au surlendemain de ces résultats et déclarations, le président Andrzej Duda était en visite à Paris, où il a bien entendu rencontré son homologue François Hollande. Il a beaucoup été question, semble-t-il, d'accords et de soutiens réciproques. Mais, derrière les sourires des photographies officielles, et la retenue des propos, on a pu percevoir, presque vibrante, l'inquiétude du président français.

Olivier Figueras monde&vie 2 novembre 2015

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