Dans un entretien accordé au site sputnik fin décembre, Marine Le Pen prédisait que la bulle favorable à François Fillon (allait) éclater. Force est de constater qu’il est en tout cas à la peine en ce début d’année dans les enquêtes d’opinion. Selon le tout dernier sondage Odoxa réalisé pour France 2, 57 % des personnes interrogées disent avoir une mauvaise opinion de François Fillon, lequel est en recul de 12 points par rapport à novembre dernier. Cette même enquête indique cependant qu’il ferait un « meilleur président » que Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon et Manuel Valls, mais une majorité des sondés estime en revanche qu’il ferait un « moins bon président de la République » qu’Emmanuel Macron. Ce dernier est plus que jamais la bête noire d’un PS qui doute de son avenir. Reste que les Français ont logiquement du mal à percevoir les différences essentielles entre MM. Valls et Macron. S’appliquent à tous deux ce que Aquilino Morelle, l’ex conseiller de François Hollande, dit aujourd’hui du chef de l’Etat au Parisien . A savoir que «François Hollande est le représentant d’une gauche libérale, européiste, parfaitement à l’aise avec la mondialisation libérale, à l’essor de laquelle elle a d’ailleurs très activement participé. Pour les représentants de cette gauche-là, l’économie aurait définitivement pris le dessus, la politique ne pourrait plus grand-chose, sinon agir à la marge.»
Prime à la nouveauté ou lame de de fond, tout cela se décantera dans les semaines à venir, les observateurs constatent que les réunions publiques d’Emmanuel Macron font le plein, contrairement à celles de M. Valls…par ailleurs donné perdant au second tour de la primaire socialiste face à Arnaud Montebourg dans le tout récent sondage Kantar Sofres-OnePoint pour RTL, Le Figaro et LCI.
Interrogé par les lecteurs du Parisien ce lundi 9 janvier, Manuel Valls, tout à sa stratégie visant à apparaître comme le candidat légitime du peuple de gauche (et des minorités en martelant un discours multiculturaliste), concentre ses attaques sur le « projet dur, thatchérien » de François Fillon. Il a estimé que la mise en avant par le candidat de la droite de sa foi catholique, alors que « la religion relève de l’intime » , « c’est faire monter les communautarismes .» Invité le 3 janvier dernier du journal de 20h de TF1, M. Fillon s’était dit «gaulliste et de surcroît chrétien», la preuve disait-il qu’il ne prendra «jamais de décision contraire à la dignité humaine».
Une profession de foi qui n’a pas convaincu Philippe de Villiers qui a déclaré au Figaro la semaine dernière que M. Fillon est «un piètre candidat en campagne» et qu’il «ne sera pas présent» au deuxième tour de la présidentielle. Il juge aussi sévèrement sa déclaration sur sa foi chrétienne, un vulgaire coup de communication: «Il s’en remet à Anne Méaux pour lui souffler des idées de marketing, comme elle le fait pour les grands chefs d’entreprises ». Présidente de la société de communication Image 7 créée en 1988, conseillère de M. Fillon, ancienne militante d’extrême droite (Occident, Ordre Nouveau, Gud, PFN…), Mme Méaux a suivi la même trajectoire qu’un Alain Madelin ou d’un Gérard Longuet en ralliant les rangs de la droite libérale dés l’élection de Giscard d’Estaing en 1974.
François Fillon est surtout comptable, note Bruno Gollnisch, d’un bilan lors de son passage à Matignon que beaucoup se chargeront de rappeler au cours de cette campagne: 600 milliards de dettes de 2007 a 2012, un million de naturalisés, l’entrée de plus d’un million d’immigrés supplémentaires, l’absence de lutte contre le communautarisme, l’aveuglement devant la montée du fondamentalisme salafiste dans les banlieues…
Dans l’entretien qu’il a accordé hier à des médias Français (France info, RTL et LCP) le président de la République arabe syrienne, Bachar al-Assad, relève une évidence en notant la position certes plus équilibrée de François Fillon au sujet de l’attitude qui devrait être celle de notre diplomatie vis-à-vis de la guerre qui ravage la Syrie et de son gouvernement légal. «Sa vision (celle de M. Fillon, NDLR) concernant les terroristes, ou disons la priorité du combat contre le terrorisme sans s’ingérer dans les affaires des autres pays, est bienvenue», se félicite-t-il tout en rappelant prudemment que «nous avons appris dans cette région, ces dernières années, que beaucoup de responsables disent des choses et font le contraire».
François Fillon est connu pour ses prises de position fluctuantes selon les moments et les époques et Guillaume Faye , comme M. de Villiers, ne croit pas en la capacité du champion de la droite libérale, soutenu par Bilderberg, à incarner une alternative, y compris dit-il en matière de politique étrangère. Il pointe ses ambiguïtés et ses reculades sur la Russie de Vladimir Poutine: «François Fillon avait pris partie pour la Russie en reconnaissant que c’est le parlement ukrainien qui refuse de voter l’accord sur l’autonomie des parties orientales russophones de l’Ukraine. Mais très rapidement, il a reculé (…). Si M. Fillon est élu, on peut parier qu’il trouvera un prétexte pour changer d’option et ne pas exiger une levée des sanctions de l’UE contre la Russie.»
Il a d’ores et déjà «fait cette déclaration d’allégeance humiliante à Washington, empreinte d’une russophobie bas de gamme : l’intérêt de la France n’est évidemment pas de changer d’alliance en se tournant vers la Russie plutôt que les États–Unis. (…) Nous sommes les alliés des États–Unis, nous partageons avec les États–Unis des valeurs fondamentales que nous ne partageons pas avec les Russes et nous avons une alliance de sécurité avec les États–Unis, donc nous n’allons pas la remettre en cause (débat télévisé du 24 novembre l’opposant à Alain Juppé). Quelle soumission… Et en même temps, le pseudo pilote de course parle de retisser un lien avec la Russie et l’amarrer à l’Europe. Il juge la politique de Hollande absurde qui conduit Moscou à se durcir, à s’isoler, à actionner les réflexes nationalistes. Il affirme que la Russie, puissance nucléaire, est un pays dangereux si on le traite comme nous l’avons traité depuis cinq ans . Propos contradictoires, où l’on change d’avis comme de chemise sans affirmer une véritable position». Quand on subordonne le marketing aux convictions…