À défaut de pouvoir empêcher le succès de ses Mémoires, une certaine presse, qui n’est pas la plus objective, s’en prend aux lecteurs de Jean-Marie Le Pen en utilisant des procédés que la défunte Stasi n’aurait pas reniés. C’est ainsi que, dans sa version numérique du 2 mars, un quotidien recense « ce que les lecteurs de Jean-Marie Le Pen ont également acheté », d’après les indications données par le site Amazon.
Dans un bandeau initial, ces cinq titres : Autres pamphlets, de Louis-Ferdinand Céline, Le Grand Remplacement, de Renaud Camus, Le Suicide français, d’Éric Zemmour, L’Ordre et le Désordrede Charles Maurras, Mon Testament politique et privé, d’Adolf Hitler. Un échantillon sans doute destiné à insinuer que les lecteurs de Le Pen sont tous d’incorrigibles fachos.
Pour paraître faire un travail de journaliste, l’auteur de ce brillant article déclare avoir contacté Amazon, qui « n’a pas souhaité répondre à [ses] questions sur le fonctionnement de ces recommandations ». En revanche, il n’hésite pas à affirmer péremptoirement que « les thèmes défendus par l’homme politique controversé depuis des décennies semblent coller à ceux de ses lecteurs ».
Et de préciser que Charles Maurras est un « antisémite d’extrême-droite assumé et Vichyste notoire », que même Marine Le Pen a pris ses distances avec les thèses de Renaud Camus, que son père qualifie la torture en Algérie d’« interrogatoires spéciaux » et autres amabilités pour discréditer ce ramassis de factieux.
Il n’oublie pas d’écorcher L’Histoire de France de l’historien Jean-Christian Petitfils, cher « aux adeptes de l’identité nationale ». Bizarrement, il ne cite pas Notre patrie, de Charles Péguy, De Lattre, d’Ivan Cadeau, ni L’Archipel du goulag, d’Alexandre Soljenitsyne. Encore moins Rivière sans retour, film avec Robert Mitchum. Sans doute ces exemples ne s’adaptaient-ils pas suffisamment à sa démonstration simpliste ?
Ce n’est pas parce qu’on lit un ouvrage d’Hitler qu’on est nazi, tout comme on n’est pas nécessairement marxiste parce qu’on lit Marx. Quant à Maurras, dont il rappelle avec délectation qu’il a été retiré du Livre des commémorations 2018, l’auteur de l’article ne l’a manifestement pas lu. Sans quoi il saurait qu’il fut profondément anti-allemand et hostile aux collaborationnistes.
Ce qu’il y a de sûr, c’est que l’emploi de citations hors contexte ou de formules assassines ne suffit pas à faire un bon journaliste. Ce type de papier est un exemple de ce qu’il ne faut pas faire si l’on veut garder quelque crédit : sectarisme, désinformation, amalgame, insinuation, voire délation. Tous procédés qui sont plus le propre des régimes totalitaires que de la liberté de l’esprit.
La curiosité intellectuelle, ça existe ! Elle vaut toujours mieux que l’adhésion aveugle à la pensée unique, qui dispense de penser et de réfléchir.
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