Le projet de noyau dur quasi fédéral autour de l’axe franco-allemand a du plomb dans l’aile.
Macron voulait, notamment, un ministre des Finances et un budget commun pour la zone euro, mais il ne peut rien faire sans Angela Merkel. Or, celle-ci vient d’être reconduite à la tête d’une nouvelle grande coalition qui n’est plus si grande que cela, puisque seuls 364 députés au Bundestag ont voté la confiance, sur un total de 709 : une majorité de seulement neuf voix ! Pourtant, sa « grande » coalition dispose, en principe, de 399 sièges sur 709, ce qui est déjà bien moins qu’il y a quatre ans, quand elle avait 504 sièges sur 631. Dans sa première interview après le vote de la confiance, Mme Merkel, bien qu’affaiblie après avoir mis 171 jours à former son gouvernement, a affirmé vouloir faire revenir à la CDU les électeurs perdus au profit de l’AfD.
Entre soutenir les ambitions européennes du Président français et faire revenir l’aile droite de son électorat, Mme Merkel va devoir choisir. La première visite officielle de la chancelière était, certes, pour Paris, où elle a rencontré Emmanuel Macron, mais sa deuxième visite officielle sera pour Varsovie dès lundi, et c’est plutôt le signe de sa volonté de ménager la chèvre et le chou au sein de l’Union européenne.
L’autre grand pays sur lequel Emmanuel Macron pouvait compter pour soutenir ses projets pour l’Europe, c’était l’Italie. Inutile de dire qu’après les élections du 4 mars, le Président français ne peut plus vraiment compter sur cet allié. Si les vues de la coalition des droites emmenée par la Ligue (ex-Ligue du Nord) devaient l’emporter, Rome défendrait, comme le fait désormais Vienne, les mêmes positions que les capitales du groupe de Visegrád : pas d’abandon supplémentaire de la souveraineté, rôle accru des Parlements nationaux dans les processus de décisions de l’Union européenne, pas d’Union européenne à deux vitesses, meilleur respect des identités et des souverainetés nationales, arrêt de l’immigration et renvoi, chez eux, des immigrants arrivés illégalement en Europe, remplacement des politiques immigrationnistes par des politiques natalistes… En bonus : le rétablissement des contrôles aux frontières à l’intérieur de l’espace Schengen et peut-être le rétablissement de la lire comme monnaie nationale de l’Italie.
Les quatre pays du groupe de Visegrád (Pologne, Hongrie, Tchéquie et Slovaquie) sont, en outre, soutenus par la plupart des pays de l’ancienne Europe de l’Est. Réunis le 2 mars à Budapest, les présidents des Parlements du V4 ont redit leur condamnation commune des attaques de la Commission européenne contre la Pologne. Le Premier ministre hongrois Viktor Orbán a clairement dit que si Varsovie devait céder aux pressions européennes, il serait beaucoup plus difficile aux autres pays de la région de rejeter les politiques immigrationnistes et fédéralistes qu’on voudrait leur imposer depuis Bruxelles. Lors d’un sommet à Vilnius, en Lituanie, le 9 mars dernier, les Premiers ministres des trois pays baltes ont aussi fait savoir qu’ils voteraient contre la procédure de sanction lancée en décembre par la Commission contre la Pologne.
Pour revenir aux ambitions du Président français pour l’Union européenne, le 6 mars dernier à Helsinki, en Finlande, huit pays du nord de l’Europe ont exprimé leur opposition à un ministre des Finances et à un budget pour la zone euro. Il s’agit de l’Irlande, des Pays-Bas, du Danemark, de la Suède, de la Finlande et des trois pays baltes. Pour ce qui est de la création d’un Fonds monétaire européen, ils s’y sont dit favorables, à condition que celui-ci reste sous le contrôle des États membres et pas du Parlement européen, comme le voudrait la Commission.
Les projets d’Emmanuel Macron pour l’Union européenne n’ont donc aucune chance d’aboutir. Et c’est tant mieux.
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