Bruno Gollnisch, qui partageait avec Jacques Chirac l’amour de la culture japonaise, réagit à la mort de l’ancien président de la République.
Au micro de Boulevard Voltaire, il compatit « à la peine de son entourage » mais évoque également les combats politiques qui les ont opposés.
Vous êtes à Kyoto, au Japon. Jacques Chirac appréciait énormément la culture de ce pays. C’était un point que vous aviez en commun.
Jacques Chirac est très souvent venu incognito au Japon. Il est d’ailleurs assez étonnant que cela n’ait pas suscité davantage d’intérêt de la part des commentateurs. Il était amateur de la culture japonaise. Il en avait compris certains aspects, contrairement à Nicolas Sarkozy.
Quand on parle de Jacques Chirac à un membre du Rassemblement national, on ne peut s’empêcher d’évoquer ce 21 avril 2002. Comment aviez-vous jugé la réaction de Chirac vis-à-vis de l’arrivée de Jean-Marie Le Pen au second tour ?
Je me souviens très bien de cette période, puisque j’étais directeur de campagne de Jean-Marie Le Pen. Compte tenu de mes convictions chrétiennes, je souhaite le salut de son âme. Je compatis à la peine de sa famille, de son entourage et de ses amis.
Il est bien évident que, sur le plan politique, je juge très sévèrement l’inaction de Jacques Chirac. Il était à la tête du RPR, devenu ensuite l’UMP, puis Les Républicains. Ce mouvement gaulliste a constamment piqué les voix des électeurs de droite pour ne pas faire la politique qu’ils souhaitaient. Jacques Chirac était un commentateur imperturbable assez majestueux. Il habitait convenablement sa fonction en apparence, mais il commentait les problèmes du pays, la fracture sociale, l’immigration insupportable sans jamais porter aucun remède. Il est resté totalement prisonnier de cette espèce de cercle invisible que la gauche avait dressée autour des hommes de droite, ou du moins qu’ils se prétendaient être.
Comment les Japonais ont-ils réagi lorsqu’ils ont appris la mort de Jacques Chirac ? Observez-vous une émotion internationale ?
Pour le moment, rigoureusement rien. Il est 22 heures, au Japon. L’immense majorité des Japonais ne connaît rien à la politique française, pas plus que les Français ne connaissent quelque chose à la culture japonaise. Si on annonçait, en France, le décès de M. Nakasone ou de tel ancien Premier ministre japonais, je ne crois pas que cela susciterait énormément d’émotion dans la population. Cela étant, la télévision va en faire état. J’aurai les réactions seulement dans quelques jours, lorsque je rencontrerai des membres de l’élite politique japonaise. Ils me feront part de leur sentiment.
Le décès de Jacques Chirac est-il la fin d’une époque ?
C’était un adversaire particulièrement injuste. Encore une fois, cet homme a fait croire aux Français qu’il allait résoudre les problèmes de l’insécurité, de l’immigration et de la perte des valeurs traditionnelles au travers de son ministre de l’Intérieur, Charles Pasqua. En réalité, il a érigé une barrière infranchissable à l’égard des gens du Front national.
Il est devenu Premier ministre en 1986 en profitant du rejet, par la majorité des Français, du gouvernement socialo-communiste et de la présidence Mitterrand.
En réalité, de toutes les réformes qu’il avait annoncées, il a uniquement réalisé la réforme du Code électoral dans l’unique but d’obtenir la fin (ce qu’il a d’ailleurs obtenu) de la représentation politique du Front national au Parlement. J’ai des souvenirs très précis de cette époque, puisque j’étais moi-même jeune député à l’Assemblée nationale. C’est la seule réforme qu’il ait faite à ce moment-là.
En 2002, son refus de débattre avec Jean-Marie Le Pen sous les prétextes habituels, « On ne débat pas avec la haine, etc. » Je disais, à l’époque, que ces prétextes étaient méprisables.
Comment mon jugement aurait-il pu changer ? C’était tout à fait contraire à la tradition démocratique de la France.