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CEDH : des terroristes étrangers invoquent les droits de l’homme pour rester en Europe

CEDH : des terroristes étrangers invoquent les droits de l’homme pour rester en Europe

N’est-il pas paradoxal de voir des terroristes de Daech invoquer les « droits de l’homme » pour être autorisés à rentrer en Europe, ou pour ne pas en être expulsés, alors même qu’ils en détestent la culture et l’ont combattue, au point de se rendre coupables de crimes de guerre et de génocides ? De tels cas se multiplient devant la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH).

L’ECLJ est intervenu dans deux d’entre eux, afin de porter une interprétation des droits de l’homme qui ne soit pas naïve, tout en restant ferme sur les principes.

À cette occasion, l’ECLJ vient de publier un nouveau Rapport sur les conditions du retrait de la nationalité des terroristes.

Dans l’une de ces affaires, un ancien combattant de Daech, issu d’un couple mixte danois et tunisien, conteste la déchéance de sa nationalité danoise et son expulsion vers la Tunisie, dont il est ressortissant. Dans l’autre, un Irakien conteste son expulsion vers l’Irak pour avoir organisé le financement d’une organisation terroriste irakienne depuis l’Allemagne, où il vit avec son épouse turque et leurs enfants (de double nationalité allemande et turque).

Par ces affaires, la CEDH doit donc se prononcer sur deux questions importantes :

  1. Un État européen peut-il retirer sa nationalité puis expulser hors d’Europe un terroriste ayant jusqu’alors une double nationalité ?
  2. Un État européen peut-il expulser un terroriste étranger ayant fondé une famille binationale sur son territoire ?

Dans ses observations écrites (consultables ici et ), l’ECLJ a notamment rappelé ce en quoi consiste le lien de « nationalité » entre une personne et une nation : elle n’est pas un droit, ni une simple formalité administrative, mais l’expression d’un lien d’appartenance. L’ECLJ a également rappelé les motifs pour lesquels il doit être possible d’expulser un terroriste étranger.

Par leurs actes, les terroristes de Daech brisent eux-mêmes leur lien d’appartenance avec un peuple européen ou manifestent l’inexistence d’un tel lien. Dans leur cas, « la déchéance de la nationalité ne fait que traduire, en droit, une réalité factuelle et matérielle : celle d’une personne qui est étrangère par tout son être » (Bertrand Pauvert, entretien vidéo pour l’ECLJ).

Lorsque les djihadistes ont une seule nationalité, les États européens ne peuvent les en priver que s’il est raisonnable de penser qu’ils peuvent acquérir une autre nationalité (voir CEDH, K2 c. Royaume-Uni, n° 42387/13, 7 février 2017). Le droit international et européen laisse en revanche une large marge d’appréciation aux États pour retirer leur nationalité aux terroristes binationaux, c’est-à-dire disposant déjà d’une autre nationalité.

Pourtant, la déchéance de nationalité est peu utilisée. En France, par exemple, seules 13 déchéances de nationalité ont été prononcées à la suite d’actes de terrorisme en vingt ans (1996 – 2016). Ce choix politique est dangereux. En effet, les djihadistes qui gardent leur nationalité ont un « droit au retour » en Europe, et le droit de ne pas en être expulsés. Au contraire, le retrait de la nationalité des binationaux facilite leur expulsion en tant qu’étrangers. Comme tout étranger, un djihadiste n’a pas un droit à vivre dans un pays dont il n’est pas, ou plus, ressortissant.

Dans ses observations à la Cour européenne, l’ECLJ a précisé que la possibilité pour un État d’expulser des terroristes étrangers poursuit plusieurs objectifs légitimes prévus par la Convention : protéger la sécurité nationale, prévenir de nouvelles infractions pénales du même ordre, ou encore défendre les droits des potentiels victimes. Plus encore, les États ont le devoir de protéger la population contre les menaces terroristes, préservant ainsi des biens communs comme l’ordre public, la concorde nationale ou encore l’esprit civil et civique.

Au-delà des cas d’espèce, l’ECLJ a formulé des propositions à la Cour pour trancher des litiges sur les expulsions d’étrangers criminels.

Certes, la jurisprudence actuelle montre que la CEDH appréhende la situation individuelle des étrangers et de leur famille et le danger qu’ils représentent pour la sécurité. La capacité d’un étranger menacé d’expulsion à s’intégrer est ainsi appréciée. Mais, la capacité de la société à intégrer cet étranger est totalement omise. Or, entre une personne étrangère et une société, la volonté d’intégration doit être mutuelle, à l’image d’un contrat bilatéral.

Après avoir évalué la volonté d’un étranger menacé d’expulsion d’honorer ce contrat, il est important d’évaluer aussi celle de la société. C’est pourquoi, l’ECLJ a proposé à la Cour de compléter sa démarche habituelle, afin d’y intégrer les droits de la société.

https://www.lesalonbeige.fr/cedh-des-terroristes-etrangers-invoquent-les-droits-de-lhomme-pour-rester-en-europe/

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