Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Open bar pour la dépense publique

6a00d8341c715453ef0263e9512493200b-320wiEn 3 mois, le président de la république aura tenu au moins deux discours qui pèseront lourd dans l'héritage de son quinquennat. Le 16 mars, trouvant sans doute convaincant d'utiliser une rhétorique guerrière pour écraser un microbe, il annonçait sa décision de faire face à toutes les conséquences du virus "quoiqu'il en coûte".

La planche à billet allait sauver le pays, son économie, ses hôpitaux publics et les deux dernières années de sa présidence.

Trois mois plus tard, la séquence du confinement tirant à sa fin, il prononçait une nouvelle allocution, toujours trop longue , destinée à se décerner à lui-même un satisfecit qui ne fait cependant pas toujours l'unanimité des Gaulois supposés réfractaires. Dans notre démocratie, en effet, le peuple a toujours raison, sauf quand il a tort. En quelque 20 minutes on aura donc entendu parler d'un effort financier de l'État à hauteur de 500 milliards d'euros. Ceci était présenté comme la preuve de la solidité de notre État, et de notre modèle social.

Il y a quelque temps les bons esprits reprochaient volontiers au président des États-Unis son abus de la post-vérité. L'expression a connu quelques mois de succès. Elle est cependant devenue démodée à Washington. Enfoncés les Américains : à Paris maintenant c'est la contre-vérité qui prévaut.

Le Ministre de l'Action et des Comptes publics Gérald Darmanin intervenait, comme à son habitude avec beaucoup d'assurance et d'aplomb, dès le 18 mars, premier jour du confinement, au micro de Jean-Jacques Bourdin[1].

Le ton du personnage vaut le détour. Il se murmure à cet égard que l'intéressé aurait fait des offres de service pour remplacer, le cas échéant, le chef du gouvernement. Au moins, ceux qui affectent de craindre une dérive libérale peuvent dormir sur leurs deux oreilles. Plus encore qu'un Édouard Philippe, chez qui on peut déceler une pointe d'humour, et pire qu'un Bruno Le Maire, toujours prêt lui-même à dire et faire n'importe quoi, le premier magistrat de Tourcoing affectionne à jet continu un discours de bulldozer étatiste. Les questions quelque peu combatives de Bourdin cinglaient : "Manque de masques, manque de tests, manque de lits, manque de moyens dans les hôpitaux... Où passe l'argent public ?"En réponse, on apprenait que tout allait, sinon pour le mieux, car la perfection n'est pas de ce monde, mais qu'il convenait de ne pas "polémiquer".

On ne se situera donc pas ici sur le terrain des masques, des tests,  lits, des moyens dans les hôpitaux, car ces questions ont été débattues dans tous les médias depuis trois mois, souvent à tort et à travers ; elles font l'objet du questionnement des commissions parlementaires et très bientôt peut-être de procédures judiciaires. Et d'ailleurs Bourdin ne pose pas la question comme cela. Il ne fait que lui demander, en tant que responsable de "l'action et des comptes publics", où est passé l'argent des contribuables.

On ne lui fera pas grief non plus d'avoir évoqué un chiffrage de l'intervention étatique à hauteur de 45 milliards d'euros : comment prévoir vraiment jusqu'où on irait, en effet, alors même que le président avait risqué la phrase fatidique "quoi qu'il en coûte" ?

De cette interminable et péremptoire intervention on retiendra surtout une contre vérité inacceptable : [à la 11e minute de l'entretien] : "C'est parce que nos finances publiques étaient saines... qu'en temps de guerre nous pouvons dépenser sans compter". Et de se prévaloir d'une remise en ordre des finances publiques qui figurait, certes en bonne place dans le programme du candidat Macron en 2017, mais qui n'a pas été entamée en 2018, et à laquelle le gouvernement, et notamment Darmanin, ont explicitement renoncé en 2019. De ce fait, en 2020 la France étatique a abordé la crise avec des finances délabrées.

Dans son discours du 16 juin le président de la république a parlé de "500 milliards" de financements publics. Ce chiffrage se révèle totalement fantaisiste, et si l'on ose dire, heureusement : l'effort budgétaire de l'État sera sans doute de l'ordre de 57 milliards, dont plus de 30 milliards de financement du chômage partiel, le déficit prévisionnel de l'État est évalué à 222 milliards, celui de la sécurité sociale à plus de 50 milliards, la dette publique devrait dépasser 120 % du produit intérieur brut annuel.

N'en jetez plus la cour est pleine. Pas la peine d'en rajouter.

Certes, avec un Moscovici à la cour des Comptes cet open bar sera sans doute accueilli avec beaucoup plus de bienveillance que par un Didier Migaud. Ce sera champagne pour tout le monde. Au frais de la princesse. Au détriment de l'avenir.

JG Malliarakis 

Apostilles

[1] cf. enregistrement audio sur le site de RMC

https://www.insolent.fr/

Les commentaires sont fermés.