Le site Contribuables associés avait fait le calcul : en 2019, les Français laborieux donnaient 203 jours de l’année à l’État ; sur chaque euro gagné, 55,60 centimes étaient prélevés par le fisc. Un régime sévère qui donne à tous la légitimité de se poser la question : où va l’argent ?
Si chacun admet contribuer au bien commun en finançant un service public digne de ce nom, peu d’entre nous imaginent participer au soutien d’un secteur moins indispensable comme la presse nationale et régionale qui, en réalité, vit sous perfusion de l’État. En France, les aides aux médias sont prolifiques et multiples : à côté des subventions directes, la profession bénéficie d’aides indirectes mal connues des contribuables comme les aides postales, des abattements de cotisations sociales, des taux super réduits de TVA, des réductions d’impôts réservées aux journalistes…
Le quotidien La Lettre A s’est procuré les données 2019 des aides à la presse et leur répartition. Il a ainsi pu établir le palmarès des médias les plus gâtés grâce aux 225 millions de subventions accordées. Le mieux loti : le journal Le Parisien, pour 13,6 millions d’euros d’aides, puis la société du Figaro, qui tire son épingle du jeu avec un pactole de 6,57 millions d’euros. La société du Monde (5,6 millions), Les Échos (1,6 million), Libé (5,9 millions), La Croix (4,7 millions) s’en tirent avec de coquettes sommes. Stupéfiant, pour un organe de parti qu’on aurait cru moribond, L’Humanité a réussi à obtenir pas moins de 3,14 millions de subventions. La presse régionale, elle aussi, profite des largesses de l’État : Ouest-France, Le Dauphiné libéré, La République des Pyrénées, Le Progrès et Paris Normandie sont les mieux classés sur le podium.
La Lettre A ne fait pas état de tout l’argent public déversé à la presse au sens large. L’audiovisuel français pèse encore bien plus lourd sur le contribuable. À titre d’exemple, en 2010, c’est 1,8 milliard d’euros qui auront été dépensés, tous médias confondus. Et l’année 2020 s’annonce passionnante puisque, face aux difficultés rencontrées par les éditeurs de presse pendant la pandémie, Roselyne Bachelot a débloqué une aide exceptionnelle de 666 millions d’euros d’aides sans que même Libé n’obtienne de réponse sur la répartition de cette manne.
Un débat qui fait rage, justement, depuis que le ministre de la Culture a décidé de s’attaquer au dossier. Gouvernement et syndicat s’accordent pour plaider pour plus de transparence, de simplification et de justesse. Roselyne Bachelot souhaite récompenser le professionnalisme et ne soutenir que les « vrais journalistes ». Le Syndicat national des journalistes, lui, voudrait aller plus loin et conditionner les aides à ceux qui « luttent contre les discriminations hommes-femmes. Différentes exigences sociales et éthiques pour que les aides reviennent à des entreprises vertueuses sur le plan social et déontologique. »
Tout un programme connu d’avance auquel le désamour déclaré des Français pour leurs médias devrait mettre un point final. Car pendant ce temps-là, le contribuable cocu est toujours tenu de mettre la main au portefeuille pour des titres de presse qu’il n’aurait même jamais eu l’idée d’acheter. Et dire que, selon la définition communément admise, l’attribution d’une subvention devrait respecter les principes d’intérêt général, d’utilité publique et être équitable pour tous ! Comme disait Coluche : « En démocratie, les hommes naissent libres et égaux mais certains sont plus égaux que d’autres… » Il n’avait pas tort.
Source : https://www.bvoltaire.fr/