La question que j’abordais hier quant à l’évolution de l’appartenance religieuse donne lieu à bien des développements. Ainsi la philosophe Chantal Delsol publie un essai intitulé La fin de la chrétienté (Éditions du Cerf). Pour elle, chrétienté n’équivaut pas à christianisme.
Car le christianisme, s’il est en régression en Europe, continue à se développer dans le monde. La chrétienté, expliquait-elle dans le Figaro d’hier, nous renvoie à un type de civilisation qui se caractérise par un certain état des mœurs et la législation d’un pays. Ce qui vient de se passer en Suisse [ndlr. adoption pour les couples de même sexe] et dans la minuscule république de San Marin [ndlr. légalisation de l’avortement] corrobore largement les propos de la philosophe. Désormais, la législation de ces pays, qui était encore en décalage avec les pays d’Europe, signifie un décrochage manifeste par rapport à la morale chrétienne. Mais la fin de la chrétienté n’est que la résultante de la régression religieuse du continent.
Reste que cette régression nous renvoie à un tout nouveau paysage civilisationnel, qui se déploie en posant bien des énigmes aux sociologues et aux historiens du présent. Chantal Delsol remarque, à juste titre, que la notion d’athéisme ne convient sûrement pas pour définir ce nouveau paysage : « À la religion d’Occident se substituent peu à peu ses ersatz, ses succédanés, ses échos. » Guillaume Cuchet, que je citais hier, s’est employé à explorer ce nouveau paysage, en s’intéressant aux générations qui ont décroché du catholicisme. Ceux-là appartiennent à la deuxième, voire à la troisième génération qui ont reçu la rupture en héritage.
Ceux-là sont très loin de leurs parents et de leurs grands-parents. Du moins, observait le cardinal Lustiger, ont-ils la possibilité de redécouvrir le christianisme comme une absolue nouveauté.
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 29 septembre 2021.