Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Pluralisme dans les médias : l’enfer pavé de bonnes intentions

lafon.png

À la demande des sénateurs socialistes Sylvie Robert et David Assouline, une commission d’enquête sur la « concentration des médias en France » a été lancée en novembre dernier.

Le centriste Laurent Lafon, nommé président de cette commission, explique, dans une courte vidéo publiée sur le site du Sénat, qu’il s’agit de mener une « ré-interrogation des principes de diversité et de pluralisme » dans les médias. Une noble cause qui aurait de quoi en réjouir plus d’un, notamment lorsqu’on pense au déferlement de slogans, tels que #pasmaredevance (pour « pas ma redevance »), qui fleurissent sur les réseaux sociaux, pour pointer du doigt des discours largement orientés sur les canaux de l'audiovisuel public.

Alors que la commission d’enquête bat son plein, Laurent Lafon s’est exprimé sur le sujet, le 24 février, expliquant que « les auditions ont montré que le sujet de l’information de qualité dans les médias audiovisuels est une question centrale pour la démocratie. Je propose donc d’instaurer dans les conventions des chaînes généralistes et d’information une obligation d’investir un certain pourcentage du chiffre d’affaires dans l’information, comme cela se fait déjà pour l’investissement dans la création audiovisuelle et cinématographique. » L’élu du Val-de-Marne ajoute encore qu’il serait bon de « promouvoir l’information de qualité produite par des journalistes et mettre en valeur des émissions d’enquêtes et de reportages ». Sur le papier, le projet est convaincant : des médias qui informent au moyen d’enquêtes et de reportages, voilà qui semble tout à fait correspondre à la mission des journalistes. Sur le papier...

Car certains journalistes ont été sur le terrain et pour en rapporter la réalité : c’est le cas des équipes de « Zone interdite », qui se sont déplacées à Roubaix afin d’y enquêter sur la montée de l’islam radical. Des images fortes, trop fortes pour la sensibilité de certains, semble-t-il, car la journaliste Ophélie Meunier, qui présente l'émission, a été victime d’une vague de menaces de mort et placée sous protection policière. Heurtée par le reportage diffusé par M6, une équipe de France.tv s’est déplacée à Roubaix afin de se faire sa propre idée. Le résultat est sans appel : cette petite ville des Hauts-de-France est un havre de paix où Francine, Hubert ou encore Gérard, le curé, coulent des jours heureux. Une découverte réconfortante qui a permis à l’équipe de la chaîne publique de redorer le blason de la ville et de titrer son reportage : « Retour à Roubaix, loin des clichés ». Faire des reportages, c’est bien. Éviter d’en occulter la moitié dérangeante, c’est mieux.

Outre cette volonté de faire la part belle aux reportages, le président de la commission alerte sur l’accroissement des débats au détriment de la parole journalistique : « Nous constatons aujourd’hui la montée en puissance de débats dans lesquels les intervenants qui ne sont pas journalistes délivrent des opinions. Je n’oppose pas le débat et l’information, mais il faut éviter la confusion des genres », s’inquiète-t-il. Une attaque déguisée contre  ? En aucun cas, se défend-il. Même si, il faut bien le reconnaître, « on peut constater que CNews ne fait pas assez de place à l’information ». De son côté, le président du groupe socialiste au Sénat fait moins de manières pour partager le trouble que lui causent les médias du groupe Bolloré, CNews et Europe 1 : « Je suis un auditeur d’Europe 1 depuis ma plus tendre enfance. Aujourd’hui, je m’inquiète. Je suis pour la liberté d’expression mais si elle aboutit à une concentration de l’expression, il y a un problème pour la démocratie »alerte ainsi Patrick Kanner.

Peut-être serait-il opportun de rappeler que Laurent Lafon, vaillant défenseur d’une information plurielle, a fait de la suppression de la petite chaîne propriété de l'État russe RT France un combat personnel, ces derniers jours, menaçant, au micro d’Europe 1, de « faire usage, sans délai, des outils juridiques dont [il] dispose et qui peuvent aller jusqu'à demander la suspension de sa diffusion ». Bien sûr, comme son collègue Patrick Kanner, il est pour la liberté d’expression, mais…

Marie-Camille Leconte

https://www.bvoltaire.fr/pluralisme-dans-les-medias-lenfer-pave-de-bonnes-intentions/

Les commentaires sont fermés.