Volodymyr Zelensky s’est adressé au Parlement. Mercredi, peu après 15 heures, députés et sénateurs s’étaient réunis pour écouter le président ukrainien, intervenant via un écran géant.
Pas de place pour les questions ou le débat ! Le président ukrainien s’est contenté de prononcer pendant un peu plus de douze minutes un discours parfaitement préparé, remplissant tous les critères de la « comm » moderne.
Après avoir évoqué les crimes commis par l’armée russe et invité – forcé ? – son auditoire à se lever pour respecter une minute de silence en mémoire des victimes, il a donc vanté les mérites de la France tout en lui demandant de faire davantage. Pour résumer son propos, la devise « liberté-égalité-fraternité » est une source d’inspiration pour les Ukrainiens mais il faut désormais les aider à l’appliquer chez eux face à l’envahisseur tandis que les ruines de Marioupol rappellent celles de Verdun.
Par ailleurs, Volodymyr Zelensky n’y est pas allé par quatre chemins, faisant de nombreuses demandes et autres appels du pied.
Il a notamment souligné que c’est sous la présidence française de l’Union européenne que devra être prise la décision au sujet de la demande d’adhésion de l’Ukraine à l’UE. Il a également réclamé « plus de soutien », notamment des armes et des chars, et demandé le départ des dernières entreprises françaises encore actives en Russie, à commencer par Renault, Leroy Merlin et Auchan.
Des réactions
Au micro de Public Sénat, Bruno Retailleau, sénateur LR de la Vendée, a évoqué un moment « historique » et « très touchant ». A ses yeux, les choses sont claires, « nous devons fournir des armes ». Une position que ne partage pas Nicolas Dupont-Aignan.
S’il valide l’idée d’apporter de l’aide humanitaire à l’Ukraine, le député refuse d’envoyer des armes, précisant qu’il fallait « créer les conditions de la paix, pas les conditions de la guerre ». Celui qui est aussi candidat à l’élection présidentielle et a reçu le soutien de Florian Philippot est allé plus loin en évoquant « un discours extrêmement dangereux » qui pourrait déboucher sur « un engrenage dramatique pour le continent ». Le risque semble effectivement réel. Nicolas Dupont-Aignan propose la neutralité de l’Ukraine ainsi que l’autonomie constitutionnelle du Donbass, comme l’exige la Russie. Les détracteurs du souverainiste ne se sont donc pas privés pour lui faire remarquer que l’Ukraine, elle aussi, tentait de défendre sa souveraineté.
Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon, tous deux pointés du doigt pour leur position mesurée – d’aucuns préciseraient « juste » – envers la Russie, étaient bien présents dans l’hémicycle mais n’ont pas surréagi, privilégiant leur campagne électorale.
Dans les heures suivant l’intervention du président ukrainien, l’entreprise Renault a annoncé qu’elle suspendait dès à présent les activités de son usine de Moscou, tout comme le laboratoire pharmaceutique français Sanofi. Leroy Merlin, en revanche, poursuivra ses activités, craignant une faillite et une expropriation qui renforcerait les moyens financiers de la Russie si elle rompait ses engagements.
L’émotion est-elle la réponse à toutes les questions politiques ?
Louis Marceau
Article paru dans Présent daté du 24 mars 2022