Une candidate aux élections législatives se présente avec le soutien d’Éric Zemmour et de Marine Le Pen. Marie-France Lorho, députée sortante de Vaucluse, présente en effet l’unique particularité de revendiquer le soutien de trois partis : Reconquête, RN et Ligue du Sud (le parti fondé par Jacques Bompard, ancien maire d'Orange). Pour comprendre cela, il faut remonter aux lendemains du second tour de l’élection présidentielle.
Aucune alliance, aucun accord ne peut exister entre le RN et Reconquête. Après avoir appelé à voter sans négociation pour Marine Le Pen au second tour, Éric Zemmour s’en était violemment pris à la candidate du RN au soir de la réélection d’Emmanuel Macron en fustigeant la défaite qui frappe le nom Le Pen. Depuis, les quelques ponts que certains estimaient constructibles se sont brisés sèchement. Le cas Philippe Vardon a été en cela révélateur. Le cadre du Rassemblement national, figure régionale en PACA, réputé proche de Marion Maréchal en a fait les frais en adressant au président de son parti un courrier rendu public lui demandant d’autoriser les alliances entre le parti d’Éric Zemmour et celui de Marine Le Pen. La réponse du siège ne s’est pas fait attendre : Vardon s’était vu retirer son investiture et a vu se présenter à sa place un candidat RN issu de ses propres rangs. Si le RN a assuré que l’éviction de Vardon trouvait son explication dans des problèmes de ressource humaine au sein de la fédération locale, le message était clair : le RN gagnera sans le concours d’Éric Zemmour et de ses partisans.
Orange : l’union née des divisions
Si le soutien par Reconquête de la candidate Ligue du Sud Marie-France Lorho n’est pas une surprise, Jacques Bompard ayant été l’un des premiers a appeler de ses vœux la candidature d’Éric Zemmour, il fallait néanmoins convaincre le RN malgré les antagonismes réels entre les Le Pen et les Bompard.
L’ancien maire d’Orange (1995-2021) et patron de la Ligue du Sud n’en finit plus d’étonner. Pourtant cofondateur du Front national en 1972, Jacques Bompard se brouilla très durement avec Jean-Marie Le Pen à qui il reprochait son peu d’intérêt pour les questions locales mais aussi et surtout son autoritarisme. Claquant la porte du parti à la flamme en 2005 suite à son éviction du bureau politique, il rejoignit le MPF de Philippe de Villiers, qu’il quitta à son tour en 2010 pour fonder son parti la Ligue du Sud. Retranché à Orange, Jacques Bompard aura depuis 2005 eu à affronter des candidats FN puis RN contre lui. Ainsi en 2020, ce fut son ancien directeur de cabinet qui le défia aux élections municipales avec le soutien du RN. Au vu de ce passif, comment expliquer que le RN soutienne l’ancienne suppléante de Bompard ?
« Je n’ai pas le passif des Bompard et de la Ligue du Sud avec le Rassemblement national », analyse Marie-France Lorho. Pour celle qui siège avec les non-inscrits aux cotés des députés du RN, l’envoi par le RN d’un candidat parachuté depuis Paris face à elle était pourtant acté. « Avec l’aide de mon collègue et ami Sébastien Chenu [député RN et membre de la commission des investitures, NDLR], j’ai proposé au RN de soutenir ma candidature, d’autant que mon suppléant n’est autre que le maire RN de Camaret, Philippe de Beauregard. » Une proposition acceptée par le parti de Marine Le Pen qui a retiré son candidat et choisi de soutenir celle de Marie-France Lorho, mettant de côté ses antagonismes avec le clan Bompard qui aura, de son côté, accepté lui aussi de soutenir le même candidat que Marine Le Pen. Une candidate qui ne cache pas sa satisfaction : « Je suis très contente, très fière d’avoir réussi à acter l’union des droites dans ma circonscription. Cela faisait des années que la droite en parlait pour qu’à la fin, seule la gauche parvienne à la faire. »
Quid de la réaction de Marine Le Pen lorsque Lorho lui apprend qu’elle est aussi soutenue par Zemmour ? « Mets toutes les chances de ton côté », lui a simplement rétorqué Marine Le Pen lors d’une conversation téléphonique, le 2 mai dernier. « Finalement, Paris circonscrit à une circonscription une alliance qui aurait dû se faire au moins au niveau régional », souffle un élu local provençal. Nul doute que Philippe Vardon approuvera !