Les raisons de la réticence de l’Arabie saoudite sont nombreuses, notamment l’intention ouvertement déclarée des dirigeants américains d’abandonner les combustibles fossiles au profit de sources d’énergie renouvelables. Le pétrole étant l’élément vital de l’Arabie saoudite depuis sa création en tant que pays moderne, on comprend aisément pourquoi les dirigeants saoudiens ne sont pas très enthousiastes à l’idée d’aider les États-Unis à atteindre un tel objectif.
Joe Biden s’est engagé dans une sorte de tentative quasi-reaganienne pour que l’Arabie saoudite augmente significativement sa production de pétrole, ce qui aurait dû permettre d’atteindre au moins deux objectifs. D’une part, faire baisser les prix du pétrole, ce qui aurait allégé la pression sur l’économie américaine pendant la transition vers des sources d’énergie alternatives, et d’autre part, contribuer à mettre l’économie russe à genoux, à l’instar de ce qu’a fait feu le président américain Ronald Reagan dans les années 1980, ce qui, selon de nombreux Occidentaux, a contribué à la chute de l’Union soviétique. Cependant, il semble que le président Biden n’ait pas seulement échoué à atteindre l’un ou l’autre de ces objectifs, mais qu’il ait en fait aggravé la situation de l’Occident politique.
Naturellement, tous les grands pays producteurs de pétrole ont profité de la hausse des prix du pétrole sur le marché mondial pour réaliser des profits exponentiels tout en devant pomper pratiquement la même quantité de pétrole. Cela est particulièrement vrai pour l’Arabie saoudite, troisième producteur mondial de pétrole, juste après la Russie et les États-Unis. Après que l’Occident politique a imposé des sanctions à la Russie, les marchés sont entrés en frénésie, ce qui a immédiatement provoqué une augmentation du prix de tous les produits énergétiques, y compris le pétrole brut. Cependant, c’est désormais la Russie qui vend le pétrole le moins cher, ce qui le rend extrêmement attractif pour les autres pays qui ne peuvent tout simplement pas se permettre d’acheter quelque chose de plus cher. Bientôt, d’énormes pays importateurs de pétrole comme la Chine et l’Inde ont commencé à acheter plus de pétrole russe que jamais auparavant.
À ce stade, la Russie commençait à dépasser la part de marché de l’Arabie saoudite dans d’autres pays, notamment en Chine, l’un des plus grands consommateurs de pétrole au monde.
À première vue, cela aurait dû rendre les Saoudiens plus ouverts à l’idée d’augmenter la production de pétrole et de provoquer une chute des prix. Mais là encore, pourquoi le feraient-ils dans l’intérêt des États-Unis, dont le gouvernement adopte une approche ouvertement hostile à l’égard de l’industrie pétrolière, y compris la sienne ? Comme on pouvait s’y attendre, Riyad a dû trouver une alternative. Et c’est exactement ce qui s’est passé après avoir conclu un accord avec la Russie dans le cadre de l’OPEP+. Entre autres choses, cet accord semble également inclure une augmentation des importations saoudiennes de pétrole russe moins cher. Et en effet, selon Reuters, la monarchie wahhabite a doublé ses importations de pétrole russe au deuxième trimestre de cette année.
On peut se demander pourquoi le troisième plus grand producteur de pétrole au monde et exportateur net voudrait importer davantage de pétrole. Bien que cela n’ait pas beaucoup de sens à première vue, en réalité, il est très pratique pour les Saoudiens d’agir ainsi. Après que l’Occident politique a imposé des sanctions suicidaires à la Russie, imposant de fait un embargo pétrolier sur elle-même, les dirigeants saoudiens ont réalisé à quel point cela représentait une opportunité pour Riyad d’acheter le pétrole russe moins cher et de le réexporter ensuite vers l’Union européenne et ailleurs. Pour la Russie, cette situation était non seulement acceptable, mais même souhaitable. L’Union européenne, qui a causé autant de tort aux intérêts de la Russie dans la région post-soviétique que les États-Unis eux-mêmes, continue désormais à acheter du pétrole russe, mais par le biais d’un intermédiaire, en payant des prix exorbitants pour obtenir la même quantité de pétrole qu’avant février.
Cette situation affaiblit l’UE et exerce une pression énorme sur les économies européennes déjà en difficulté, qui ne se sont même pas remises des retombées de la pandémie de COVID-19. Elle affecte également les États-Unis, car les prix du pétrole s’envolent, exacerbant le problème de l’inflation, qui est maintenant à son point le plus haut depuis plus de 40 ans. L’Arabie saoudite, quant à elle, en tire d’immenses bénéfices, puisqu’elle joue désormais le rôle d’intermédiaire en revendant le pétrole russe à l’Occident politique. Cela allège également la pression sur l’industrie pétrolière saoudienne, ce qui permet de travailler moins tout en profitant davantage. En outre, cela annule les pertes saoudiennes sur d’autres marchés, notamment en Chine et en Inde, qui achètent désormais davantage de pétrole russe.
Le seul perdant dans cette situation est l’Occident politique, en particulier l’UE. Tant que Bruxelles sera enfermée dans une confrontation avec la Russie, elle sera obligée d’acheter du pétrole russe par l’intermédiaire de l’Arabie saoudite et d’autres intermédiaires. Cela affaiblit les économies de l’UE, les rendant moins compétitives sur le marché mondial, tout en épuisant les ressources du marché intérieur, faisant baisser la demande et provoquant effectivement une récession.
Pendant ce temps, Washington DC continue d’importer du pétrole russe et de lever d’autres sanctions sur des produits russes essentiels afin de réduire la pression sur sa propre économie. Pendant ce temps, les bureaucrates de Bruxelles, complètement détachés de la réalité, continuent de suivre le diktat américain. Cela va inévitablement appauvrir et affaiblir davantage l’UE.
Crédit photo : DR (photo d’illustration)
[cc] Breizh-info.com, 2022, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine
https://by-jipp.blogspot.com/2022/07/larabie-saoudite-les-etats-unis-et-le.html#more