C’est la deuxième fois que Manfred Weber prend rendez-vous avec la présidente du Parti des conservateurs et réformistes européens (ECR, 63 députés européens). Lors de la campagne électorale italienne, il s’était également prononcé en faveur de la coalition de centre droit italienne dont le parti Forza Italia, membre également du PPE, fait partie. C’est donc un rapprochement remarqué et commenté de l’autre côté des Alpes. Selon l’agence de presse italienne adnkronos, qui cite des sources gouvernementales italiennes, ce rapprochement est à l’œuvre depuis longtemps, depuis que Robeta Metsola (PPE) a été élue à la tête du Parlement européen grâce, notamment, aux voix de l’ECR Party.
L’objectif est de bâtir une liste électorale commune ECR-PPE pour les élections européennes de 2024. Raffaele Fitto, un proche de Meloni, ministre des Politiques européennes dans son gouvernement, membre de Fratelli d’Italia mais aussi ex-membre de Forza Italia et donc du PPE, veut agir en ce sens. Il entretient de bons rapports avec Manfred Weber.
Il est également évident que les excellents résultats de la droite italienne aux dernières élections, la solidité de la coalition au pouvoir mais aussi le scandale du Quatargate et ses nombreux élus de la gauche européenne impliqués pousse la direction du PPE à redresser la barre à droite : une sorte d’alignement des planètes politique pousse à ce rapprochement. Comme l’explique Nicola Procaccini (Fratelli d’Italia, ECR) à adnkronos, « le dialogue entre conservateurs et populaires se poursuit et se renforce également grâce au fait que les deux forces politiques se consolident dans leurs nations respectives. Le vote de 2024 sera la dernière chance d’avoir un Parlement européen qui mette l’Union sur les rails que nous avons toujours souhaité : un modèle d’Europe qui n’humilie pas les nations mais les prenne en considération ; qui traite moins de choses mais plus importantes. Faire moins, faire mieux : cela a toujours été notre devise.« »
Sur ce thème de l’alliance PPE-ECR, Manfred Weber a également rencontré Antonio Tajani, ministre des Affaires étrangères, membre de Forza Italia (et donc du PPE), et téléphoné à Silvio Berlusconi : tous deux appellent cette alliance de leurs vœux pour renverser la « majorité Ursula » et détacher le PPE de l’attraction fatale de la gauche.
Ce rapprochement sera-t-il le début d’une recomposition politique à l’échelle européenne ? Fait marquant, le groupe parlementaire européen Identité et Démocratie (ID, 64 députés européens) dont font partie les élus du Rassemblement national mais aussi ceux de la Ligue de Matteo Salvini ne semble pas inclus, pour le moment, dans ce projet d’union des droites. En revanche, il se murmure qu’une liste unique italienne, reprenant la coalition victorieuse aux dernières élections, serait dans les cartons.
Cette recomposition suit, en réalité, celle de la droite italienne : aux élections européennes de 2019, la Ligue de Matteo Salvini remportait 28 sièges et Fratelli d’Italia 5 sièges. Le rapport de force s’est inversé : c’est désormais Giorgia Meloni qui se retrouve leader de la droite italienne.
La route est encore longue jusqu’aux élections européennes. L’Italie, la France et l’Europe devront traverser une période de grande crise, notamment économique et sociale. Les obstacles à cette alliance ne manqueront certes pas, notamment parmi les plus modérés des partis membres du PPE. Giorgia Meloni entend transposer cette stratégie d’union des droites, gagnante en Italie, au niveau européen. Et il semble que Manfred Weber voie également un intérêt majeur à se débarrasser de la majorité « Ursula », réplique à l’échelle de l’Europe d’une Macronie dévastatrice en France.
Marie d'Armagnac
https://www.bvoltaire.fr/vers-une-recomposition-des-droites-europeennes-autour-de-giorgia-meloni/