À nouveau, ce 30 mai au matin, les communicants officiels se gargarisaient de la ré industrialisation vantée par Macron. Prenant un exemple presque anodin, celui d'un investissement sud-coréen à Corbeil-Essonnes l'impayable Le Maire voulait voir dans cet exemple une "stratégie" d'attractivité de la France. Certains esprits chagrins ne manquent pas cependant d'envisager les choses différemment. Et notre précédente chronique rappelait certains dangers inhérents à une telle politique d'appel aux capitaux extérieurs.[1]
Dès 1965, alors que régnait une sorte d'optimisme quant aux perspectives économiques du pays, la revue nationaliste de Henry Coston consacrait un numéro spécial au dossier des investissements étrangers jugeant le processus de nature à livrer "la France à l'encan"... Un demi-siècle plus tard l'industrie française ne crée plus que 12 % du produit intérieur et ce que nous consommons, y compris dans notre assiette, provient de plus en plus d'importations, chaque année plus importantes que nos exportations.
Depuis avril, on s'est plu à saluer successivement quatre implantations dans la région des Hauts-de-France d'usines baptisées du néologisme [franglais] de "gigafactories". Elles seront spécialisées dans la fabrication de batteries pour les véhicules électriques. Excellentes nouvelles sera-t-on sans doute légitimement amené à penser. Le franco-allemand Automotive Cells Company s'implante à Douvrin, nonobstant la contre-manifestation de la CGT ; le groupe taïwanais ProLogium, spécialisé dans la batterie solide, s'installe à Dunkerque ; le chinois Envsion et le japonais Nissan à Douai. Signalons enfin le projet Verkor à Dunkerque : cette entreprise 100 % française développera la technologie lithium-ion. On se félicitera même que la multinationale française Imerys envisage dans cette perspective d’ouvrir l’une des plus grandes mines européennes de lithium dans l’Allier. Une telle filière est supposée offrir un taux élevé de recyclabilité. Or, un tel avantage se présente comme décisif en regard des prévisions assez monstrueuses de 700 000 tonnes de batteries à recycler dès 2035.[2]
Doit-on, cependant, considérer comme une fausse note de s'interroger sur l'expérience douloureuse d'autres opérations industrielles transnationales, dans un pays où règne un climat social et culturel imprégné de marxisme et d'étatisme ?
L'État central parisien est endetté à hauteur de plus de 2 900 milliards d'euros. Ce sous-jacent est devenu éclatant, au moment même où le pouvoir macronien mobilisait le château de Versailles pour une opération communicante. Celle-ci a été intitulée, au mépris de la Loi Toubon de 1994, "Choose France". Le préteur étranger venant au secours de projets politiques risque fort d'ailleurs de se révéler ... chinois. "L'usine du monde", en effet, est largement devenue le banquier de la planète. L'Eximbank de Pékin a accumulé au gré de ses exportations plus de capitaux que le Fonds monétaire international.
Ainsi, avec 133 milliards de dollars d'investissements directs à l'étranger en 2020, la Chine a pu se hisser désormais au premier rang mondial, devançant le Japon et les Etats-Unis.
Macron a cru pouvoir nommer son opération Choose France : il eût été plus réaliste de l'appeler en chinois : "Xuǎnzé Fàguó".
À suivre...
JG Malliarakis
[1] cf. L'Insolent du 27 mai "La France à l'encan"
[2] cf. article de Vincent Verier, "Véhicules électriques : 700 000 tonnes de batteries à recycler en 2035", in Le Parisien, 12 août 2019
Sur les origines du déclassement on lira avec profit
"La Révolution française" par Charles Freppel
que l'on peut commander directement sur le site des Éditions du Trident.
https://www.insolent.fr/2023/05/reindustrialisation-ou-france-a-lencan.html