Le huis clos de douze heures s’est terminé ce jeudi à 3 heures du matin. Les rencontres de Saint-Denis, menées par Emmanuel Macron, pourraient « marquer l’histoire politique », a estimé Olivier Véran, le porte-parole du gouvernement : la Macronie n’a jamais eu peur des mots, ni des mascarades liées à la perpétuation de la politique-spectacle. L’ « initiative politique d’ampleur », promise par le chef de l’Etat pour la fin août, aura surtout été l’occasion pour le président de se replacer au centre du débat politique, dans une mise en scène d’union nationale. Reste l’image symbolique d’une classe politique physiquement claquemurée dans un entre soi qui l’isole le plus souvent du monde réel et de la vie des gens ordinaires.
Comme l’explique le sociologue Michel Maffesoli dans son nouvel essai (1) « (…) la doxa du pouvoir politique et économique n’est plus en phase avec les aspirations populaires, avec l’imaginaire populaire, avec la puissance populaire. Il n’y a donc plus d’accord entre les élites et le monde tel qu’il est. Ils sont repliés sur eux-mêmes, avant tout attentifs à préserver leur pouvoir, perclus d’une arrogance folle qui les rend aveugles au monde tel qu’il est ». Le curieux projet, défendu par Veran, d’instituer un « préférendum », procédure qui simulerait un dialogue avec les citoyens, illustre la réticence des macroniens à se confronter à l’avis des Français oubliés.
Une insincérité entache l’initiative présidentielle. Si Macron plaide pour la « concorde » et le « rassemblement », dans une dramatisation dont il a le secret, il définit parallèlement le périmètre de l’ « arc républicain » en y excluant le RN et l’extrême gauche. Certes, les partis représentés à l’Assemblée ont tous accepté, raisonnablement, de jouer néanmoins le jeu du dialogue. Mais les déceptions risquent d’être grandes, dans cet état d’esprit présidentiel d’exclusion idéologique. D’autant que, sur l’immigration, le président s’est déjà engagé sur une poursuite du processus qu’il dit en même temps vouloir « réduire ». C’est lui qui a signé le Pacte de Marrakech qui fait l’éloge de la société ouverte et diversitaire. Dans le Figaro Magazine du 4 août, Macron assure faussement : « Nous avons toujours été un pays d’immigration et nous continuerons de l’être ». Sa « politique de peuplement » sera poursuivie par la « répartition des difficultés », c’est-à-dire par l’installation des migrants sur l’ensemble du territoire national. Comment le président peut-il prétendre « faire nation », ce nouveau cliché masquant le délitement de la France, tout en poursuivant sa politique du déni d’une crise existentielle, civilisationnelle, et tout en louant la souveraineté européenne ? Dans ce huis-clos de Saint-Denis, proche du gisant de Charles Martel abrité dans la basilique des rois de France, la France silencieuse a été priée de rester à la porte. C’est elle qu’il faut entendre.
(1) Le Grand Orient, Les lumières sont éteintes, Editions Guy Trédaniel
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