Breizh-info : L’immigration en provenance de pays du tiers-monde est un phénomène relativement récent en Espagne, en comparaison avec la France et l’Allemagne.
José Antonio Fúster : Au milieu de la décennie 1990, nous avions seulement environ 3 ou 4 % d’étrangers vivant en Espagne. La plupart d’entre eux étaient des citoyens britanniques fuyant la pluie de leur île afin de jouir du soleil ibérique.
Deux cités espagnoles se trouvent en Afrique, Ceuta et Melilla, et les frontières entre ces villes et le Maroc étaient, dans les années 1970 et 1980, hautes d’un mètre et personne ne sautait par-dessus. Nous devons demander au Royaume du Maroc pourquoi des ressortissants de ce pays franchissent cette barrière, qui est désormais haute de plusieurs mètres et surmontée de fils de fer barbelés, et pourquoi ce pays utilise l’immigration en tant qu’arme politique.
Les élites mondialistes d’Europe et des États-Unis estiment que nous devons, en tant que nation, liquéfier notre identité. L’hiver démographique frappe frontalement l’Espagne catholique qui est le pays d’Europe qui a le moins d’enfants par femme.
Breizh-info : Est-ce pire qu’en Italie ?
José Antonio Fúster : Oui, c’est pire qu’en Italie, au Portugal et en France. Si nous acceptons l’idée que nous avons besoin de migrants car le nombre d’habitants et de jeunes est en déclin, alors nous avons la possibilité d’accueillir des individus issus des 600 millions de personnes dans le monde qui parlent espagnol et qui sont comme nous. Elles sont hispanophones et pensent comme nous. Je suis un frère pour un Argentin, un Bolivien, un Équatorien, … Ils ont peut-être une autre couleur de peau, mais cela n’a pas d’importance. Ils connaissent le concept de la nation et de l’État de droit. Leur culture est la nôtre. Notre culture est la leur. En conséquence, ils peuvent venir en Espagne et s’assimiler très facilement. 90 % du chemin de leur intégration est déjà parcouru. Ils sont prêts pour le travail. Pendant ce temps, nous avons en Espagne deux millions de personnes, principalement des musulmans, qui ne sont pas intégrées et qui sont très loin de l’être. Certains prétendent que des musulmans sont insérés. Bien entendu, mais le pourcentage des personnes qui le sont est faible, mais avec toutes les données et recherches dont nous disposons dans d’autres pays, car en Espagne celles-ci sont quasi-inexistantes, nous savons que l’intégration a une limite. Quelle est la limite ? Ce ne sont pas les immigrés qui doivent la déterminer, mais nous. Nous ne devons pas nous laisser imposer leurs choix qui consistent à prétendre : « Ceci est notre culture ! », « L’Espagne n’est pas notre nation ! », « Nous décidons de la façon dont nos enfants doivent être éduqués ! », « Les femmes ne sont pas égales aux hommes ! », … Certains prétendent que cela correspond aux traditions et coutumes de ces immigrés et que nous devons les respecter. Non ! Si nous avons besoin de migrants, nous avons à notre disposition un énorme marché composé de personnes facilement intégrables. Pourquoi avons-nous cette politique de frontières ouvertes depuis l’Afrique ? Quels intérêts servons-nous ? Quels intérêts globaux défendons-nous ? Pas les nôtres, mais ceux de Bruxelles, de Washington et même éventuellement de Péking, et certainement pas ceux de Madrid. Nous estimons que les Espagnols doivent protéger leur sol et l’hispanité.
Breizh-info : Les immigrés sont-ils plus présents dans certaines parties de l’Espagne que dans d’autres ?
José Antonio Fúster : Cela constitue un autre problème que nous devons résoudre. Au cours des années 1980 et 1990, en Catalogne, une forte émigration en provenance d’autres régions d’Espagne a eu lieu car cet endroit est plus industrialisé que les autres. Ce mouvement de population s’est fait à l’encontre des idées séparatistes visant à créer des structures d’une future nation catalane. Si vous avez 1,5 million d’Andalous en Catalogne, ils ne vont pas devenir de vrais Catalans, mais être des Andalous vivant en Catalogne. En conséquence, les politiciens séparatistes catalans ont déclaré ne pas vouloir plus d’Andalous : « Nous préférons des Marocains ! » Et, désormais, plus de 700.000 Marocains vivent en Catalogne. Et maintenant, les séparatistes disent que nous avons un problème, car les migrants marocains n’acceptent pas l’identité catalane, ni éventuellement l’identité espagnole. Les séparatistes ont maintenant compris que la religion constitue un facteur-clé de l’intégration, même pour ceux qui n’ont pas la foi. La culture et la tradition religieuse des migrants sont une clé importante dans le domaine de l’intégration et maintenant l’immigration musulmane est avant tout implantée à Barcelone, Alicante, Valence, soit dans les grands villes côtières, et à Madrid et à Bilbao. Les immigrés musulmans créent d’énormes problèmes de sécurité. Deux décennies auparavant, à Madrid, un meurtre survenait de temps à autre. Désormais, aucun jour ne se passe sans qu’un individu ne poignarde ou ne tue un autre, ou ne lui tire dessus avec une arme à feu. La sécurité est devenue la question principale dans les grandes villes d’Espagne. Barcelone est un lieu qui n’est plus sûr. C’est terrible. Nous parlons d’une des villes les plus libres, qui a une culture de joie et de loisirs. La situation est la même à Paris. J’ai étudié là-bas à la fin des années 1980 et je ne reconnais plus cette ville. Je ne m’y sens plus en sécurité, sauf lorsque l’armée est présente en nombre dans les rues. Mais cela ne peut pas être qualifié réellement de sécurité. Pourquoi avons-nous à Paris un tel problème en la matière ? Vous connaissez la réponse et je la connais aussi.
Breizh-info : Vox gouverne désormais, en coalition, dans six régions du pays. Quelle politique désirez-vous introduire ? Dans quels domaines désirez-vous appliquer vos idées ?
José Antonio Fúster : Pour nous, l’immigration, la culture, l’agriculture et la souveraineté sont des domaines importants. Nous devons prendre les décisions à propos des sujets qui nous concernent. Nous désirons que l’espagnol remplace le catalan dans les Îles Baléares. Des Catalans ont prétendu que le langage parlé dans ces îles est du catalan. Nous combattons cette situation. La langue commune des Espagnols doit être préservée car elle est un trésor national. Elle n’appartient pas seulement à Madrid, ni aux Espagnols, mais à tous les hispanophones de la planète. Nous devons récupérer cela, retrouver le droit des parents d’éduquer les enfants dans leur langue maternelle. Vous désirez parler le catalan ? D’accord ! Mais, si en Espagne un seul père désire que son enfant étudie l’espagnol, alors cela doit être possible. En France, la langue française est tout et représente l’identité du pays. Vox désire rétablir cela. Éric Zemmour parle de « reconquête ». Vox a pour objectif de reconquérir tout ce que nous avons perdu à cause de la paresse et du lavage de cerveau du Parti Populaire. Et nous savons que, sur certains points, le Parti Populaire est d’accord avec nous.
Breizh-info : Comment expliquez-vous qu’auparavant l’immigration ne touchait pas l’Espagne ?
José Antonio Fúster : La raison est que la France, l’Allemagne, l’Italie, … comptent désormais de nombreux migrants. De plus, les gouvernements socialistes et conservateurs en place en Espagne ont lancé un appel à ces derniers afin qu’ils viennent. Autrefois, ils traversaient le détroit de Gibraltar, arrivaient en Espagne et prenaient un bus vers l’Allemagne ou vers la France où ils avaient de la famille, des relations et des réseaux. Mais les politiciens catalans ont créé pour eux des connections en Catalogne. Les immigrés ont des contacts à Madrid et y restent. Nous devons donner un coup de pied dans la fourmilière. Nous devons mettre fin à cela. Nous avons perdu beaucoup de temps. Vox déclare : « Regardez ce qui se passe en France et ne faites pas la même erreur. » Nous avons deux millions de musulmans et deux ou trois millions de personnes originaires du continent américain et il y a des tensions entre eux. Les Américains s’intègrent. Ils veulent la sécurité, la liberté, la paix, étudier, avoir de bons emplois, … et les musulmans désirent d’autres choses.
Breizh-info : Quelle est la position de Vox à propos de la guerre en Ukraine ?
José Antonio Fúster : La guerre en Ukraine est une situation très complexe. Bien entendu, nous sommes toujours en faveur de la liberté et de la souveraineté de la nation. L’Ukraine a le droit d’exister. Nous détestons cette guerre. Elle porte atteinte à la sécurité de pays que nous aimons, comme la Pologne, la Hongrie et d’autres pays de l’Est de l’Europe. Mais ne pensez pas, contrairement à ce que les médias occidentaux affirment tous les jours, que la Russie est isolée. La Russie n’est pas seule. Elle a été soutenue, par exemple, par les sociaux-démocrates allemands en acquérant le gaz. En Espagne, nous achetons plus que jamais le gaz russe. La Russie entretient un lien fort avec la Chine, avec l’Inde, avec de nombreux pays d’Afrique, avec le Sahel. La France est touchée par l’influence de la Russie et de la Chine au Sahel. Des régimes socialistes d’Amérique latine sont en faveur de la Russie et reçoivent de l’argent de la Russie et de la Chine. Ce n’est pas une guerre du monde contre la Russie. Cette dernière a de nombreux amis et alliés sur la planète. Nous ne sommes pas un d’entre eux. Nous sommes en faveur de la paix. Chaque pays a le droit de subsister. L’Ukraine a le droit d’exister !
Breizh-info : Vox est-il en faveur de l’appartenance de l’Espagne à l’OTAN ?
José Antonio Fúster : Ce débat est intéressant et a lieu à l’intérieur de Vox. Certains sont atlantistes et d’autres non. Au sein du parti, nous ne sommes pas d’accord sur tout. Nous discutons. Notre formation politique n’est pas une religion, ni un culte. Nous avons un laboratoire d’idées, la fondation Disenso. Nous débattons beaucoup à propos de ce genre de choses. Parfois nous ne concluons pas.
Propos recueillis par Lionel Baland
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