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Italie : la réforme constitutionnelle, pari politique de Giorgia Meloni

En plus des dossiers migratoires, énergétiques, géopolitiques, économiques et judiciaires – avec une réforme de la magistrature qui se fait attendre –, Giorgia Meloni entreprend aujourd’hui de s’attaquer à la réforme des institutions, une de ses promesses de campagne à laquelle elle se dit particulièrement attachée. Le projet de loi de réforme constitutionnelle, porté par le ministre des Réformes institutionnelles et de la Simplification réglementaire Elisabetta Casellati (Forza Italia, groupe PPE au Parlement européen), a été voté à l’unanimité en Conseil des ministres : il ne semble donc pas y avoir de dissension dans la coalition gouvernementale sur ce sujet.

De quoi s’agit-il ?

Le gouvernement italien entend mettre en place ce qu’on appelle le premierato, l’élection au suffrage universel direct du président du Conseil des ministres (Premier ministre), alors qu’il était jusque-là nommé par le président de la République selon des majorités parlementaires de circonstance, ce que Giorgia Meloni appelle « la saison des renversements, des jeux de palais, des transformismes, des majorités arc-en-ciel et des gouvernements techniques ».

Y mettre fin, c’est, veut-elle croire, garantir aux citoyens « le droit de choisir par qui se faire gouverner » et assurer une certaine légitimité démocratique au président du Conseil, élu au suffrage universel concomitamment aux élections législatives.

Autocrate ! fustigent ses opposants de gauche. Mais ce n’est pas le gouvernement d’un seul, qui serait ici privilégié, plutôt le programme politique d’une majorité parlementaire, puisque le président du Conseil peut changer une fois en cours de législature, à la condition de venir du même camp politique. Cette réforme constitutionnelle obligerait également à une refonte de la loi électorale, car le projet de loi prévoit une prime à la majorité établie sur une base nationale lors des élections législatives. Enfin, la possibilité de créer des « sénateurs à vie », particularité italienne, - ils sont, jusque-là, nommés par le président de la République et ils ont, dans l’histoire parlementaire, pu faire basculer un vote - seraient supprimés.

68 gouvernements en 75 ans

« Au cours des 75 dernières années de l’Histoire républicaine, nous avons eu 68 gouvernements avec une durée de vie moyenne d’un an et demi », explique-t-elle. « Entre 2000 et 2020, nous avons eu neuf présidents du Conseil avec douze gouvernements différents » quand la France comptait quatre présidents de la République et l’Allemagne trois chanceliers.

Cette instabilité a grandement fragilisé l’Italie : « On privilégiait la gestion des affaires courantes aux investissements de long terme », argumente Meloni. « La stabilité de notre point de vue est la condition pour construire une stratégie et avoir une crédibilité, sur le plan national comme sur le plan international. » Cette stabilité, si la réforme est mise en place, serait un gage de croissance, ajoute-t-elle.

Le déploiement d’une politique sur un horizon législatif de cinq ans est effectivement un leitmotiv de Giorgia Meloni et de la droite italienne dans son ensemble car il signerait le retour de la politique, articulée, cohérente, qui n’est plus réactive ou brinquebalée selon les couleurs des coalitions au pouvoir (les majorités arc-en-ciel) mais de moyen ou long terme, imaginative, prospective, constructive. Bien loin d’une gouvernance de l’extrême centre, où s’effacent peu à peu les singularités des nations. « C’est une priorité, insiste-t-elle. C’est fondamental. Justement parce que nous sommes un gouvernement stable et fort, nous avons la possibilité de réfléchir à l’après. »

Très prudente, Giorgia Meloni, à la différence de Matteo Renzi, étoile fulgurante de la politique italienne dont la carrière s’est fracassée sur un référendum constitutionnel, n’entend pas lier le sort de son gouvernement au succès de cette réforme qu’elle qualifie pourtant de révolutionnaire. « Je suis très fière de cette réforme, dit-elle. Je crois (trouver) un large consensus au Parlement, et si ce n’était pas le cas, nous demanderons aux Italiens ce qu’ils en pensent avec un référendum. »

Matteo Renzi (centre gauche) a tout de suite annoncé qu’il soutenait le projet, mais pas sans examen précis et amendements éventuels au texte proposé. Des navettes entre le palais Chigi, siège de la présidence du Conseil, et le palais du Quirinal, où se trouve la présidence de la République, auront lieu également. L’opposition de gauche crie déjà son désaccord. Même si la coalition gouvernementale est solide, la partie n’est pas gagnée. En cas d’échec, la coalition au pouvoir sortirait grandement fragilisée.

Marie d'Armagnac

https://www.bvoltaire.fr/italie-la-reforme-constitutionnelle-pari-politique-de-giorgia-meloni/

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