Fouillé depuis 1987, le site d’Amnya est reconnu par les scientifiques comme la forteresse préhistorique la plus septentrionale du continent eurasien découverte à ce jour. Cependant, l’existence d’une telle structure dans cette zone géographique n’est pas inhabituelle. En effet, selon la revue Antiquity, « il existe une longue histoire de fortifications de chasseurs-cueilleurs en Sibérie occidentale, qui s'étend de l'âge de pierre jusqu'à la conquête russe de la région aux XVIe et XVIIe siècles ».
Suites aux études faites sur le site d’Amnya, les archéologues découvrirent de nombreux restes et traces de palissades, de fossés et de maisons pouvant s’étendre sur une longueur de 13 à 41 mètres. Les scientifiques ont aussi retrouvé les restes de 45 poteries, de nombreux ustensiles en silex et en quartz ainsi que des armes et des pointes de flèches faites en ardoise. Ce territoire hostile à l’homme offrait aussi de nombreuses ressources pour les individus vivant ici. Les chercheurs ont pu déterrer ainsi les restes de plusieurs animaux. Parmi ceux-ci, des os de wapitis (cervidé), de rennes et de castors dont on peut penser qu’ils constituaient, avec les poissons pêchés dans une rivière proche, la base de l’alimentation des sociétés préhistoriques de la Sibérie.
Jusqu’ici, tout semble ne soulever ni interrogation ni stupéfaction ni constituer de découverte incroyable pour le monde archéologique. Cependant, jusqu’à de récentes études, le site avait été associé à une période chronologique remontant à quelques millénaires. Néanmoins les nouvelles découvertes archéologiques viennent remettre en cause cette idée. En effet, les fondations les plus anciennes du site révèlent en vérité que ce dernier aurait été habité il y a environ 8.000 ans.
Cet état de fait qualifierait ainsi la forteresse d’Amnya de plus ancien site d’habitation fortifiée au monde et bouleverserait notre conception de la société du chasseurs-cueilleur. En effet, le nomadisme de ces anciennes communautés empêchait les scientifiques d'imaginer l’existence d’un site aussi complexe à une telle datation pour ce type de société. La découverte d’armes s’ajoutant à la présence de palissades et de traces d’incendies sur les restes de bâtiments retrouvés prouve aussi l’existence de conflits entre les communautés résidant autrefois sur ce territoire.
Ce type de forteresse, érigé pour de telles raisons défensives, était souvent associé à l’émergence de l’agriculture au Proche Orient puis en Europe. Cette situation fait alors de la société préhistorique sibérienne un cas unique. Ainsi, selon la revue Antiquity, « Amnya […] témoigne d’un parcours autochtone sans précédent vers une différenciation sociopolitique dans une partie inattendue du monde. […] Amnya marque le début d’un phénomène unique et à long terme de sites défensifs de chasseurs-cueilleurs dans le nord de l’Eurasie, une tradition presque ininterrompue qui s’est poursuivie pendant près de huit millénaires jusqu’au début de la période moderne. » Le monde de la préhistoire semble ne pas avoir encore dévoilé tous ses mystères.
Eric de Mascureau
https://www.bvoltaire.fr/amnya-la-plus-ancienne-forteresse-du-monde/