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(Encore) trop tard : Moscovici, le lapin blanc du pays des merveilles

Moscovici
Il pourrait être l’enfant naturel de Cassandre et du lapin blanc d’Alice au pays des merveilles. Un lanceur d’alerte perpétuellement à la bourre. Il met en garde quand tout est déjà accompli, il est monsieur minuit et quart. « Trop tard », ces deux mots dont le célèbre général Douglas MacArthur disait qu’ils résumaient à eux seuls « les batailles perdues », pourrait être sa devise.

Il s’agit, bien sûr, de Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes, qui vient de présenter, ce lundi, un gros rapport et court dans tous les médias en clamant à qui veut l’entendre ses grandes inquiétudes quant à l’état de la dette. « Réduire notre dette est une ardente obligation. Ce n'est ni de gauche ni de droite : c'est d'intérêt général », prévient-il. « Qui que ce soit qui gouverne demain la France, le prochain gouvernement devra s'emparer de cette situation de finances publiques » car « un État endetté est un État paralysé ». Fort bien. Mais pourquoi diantre avoir attendu que les élections soient passées pour livrer cette bombe ? Qui peut croire un instant que ce rapport n’était pas prêt avant les élections (et avant la période de réserve électorale que la Cour des comptes s'est imposée à elle-même) ?

Comme l'immigration

Le scénario est, mutatis mutandis, le même qu'avec l’immigration : c’est seulement après le vote de la loi à l'Assemblée que Pierre Moscovici avait publié, en début d’année, le rapport de la Cour des comptes portant sur la « politique de lutte contre l'immigration irrégulière ». Il avait assumé alors ce report : « Ce n’est pas par volonté de dissimuler au Parlement et au grand public une information que j’ai été amené à proposer cette décision, c’est par une volonté de défendre l’impartialité, la neutralité de la Cour et sa réputation », avait-il déclaré. C’est donc sciemment qu’il avait décidé de soustraire les outils de réflexion et donc de décision aux députés. Il vient de recommencer avec les électeurs.

Pourtant, d’après Agnès Verdier-Molinié, dans Le Figaro« si la France avait eu une bien meilleure santé budgétaire et si le déficit 2024 n’était pas déjà pour l’État à 113 milliards d’euros à fin mai 2024, le Président [n’aurait probablement pas] décidé de dissoudre après les européennes ». Bref, le gouvernement sait pourquoi il dissout, mais les Français ne savent pas pourquoi ils votent. Or, le barrage républicain auquel on les a poussés a permis une victoire en trompe-l’œil du Nouveau Front populaire qui se sent pousser des ailes, rajoutant de la confusion à un état des lieux désastreux. L’instabilité politique et l’incertitude plombent toujours l’économie d’un pays. Surtout quand le parti qui s’estime légitime à prendre les manettes et menace de bloquer le pays s’il n'obtient pas satisfaction est prodigieusement inquiétant pour tous ceux qui, sans être milliardaires, ont un peu de bien, mobilier ou immobilier.

La petite musique préélectorale, jouée tant par les candidats eux-mêmes que par les intellectuels autour d'eux, était édifiante : augmentation des tranches de l'impôt sur le revenu, suppression de la loi sur les squats, instauration d’un héritage pour tous à 25 ans à hauteur de 120.000 euros en étêtant les droits de succession actuels (Thomas Piketty), possibilité de recourir sous la contrainte à la confiscation de l’épargne pour éponger ladite dette (Sandrine Rousseau), dénigrement de la maison individuelle et de la famille, réputées « fascistes » (Geoffroy de Lagasnerie)… De ce fait, « le cocktail à venir est désormais très dangereux », prévient Agnès Verdier-Molinié : « fuite des capitaux et de ceux qui paient les impôts et crise des finances publiques ».

Madoff et Ponzi

La dette publique, comme celle de Madoff, est une pyramide de Ponzi : si tout ce qui paie d'impôts dans notre pays tire sa révérence et se retire sur la pointe des pieds, le système, déjà branlant, s’écroule comme un château de cartes. Sauf que pour (peut-être) éviter ce désastre, il aurait fallu savoir tout cela avant le vote, pour n'en pas créer les conditions. Les Français l’ignoraient. Pierre Moscovici le savait.

Gabrielle Cluzel

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