Après trois mois de propagande intense, la CIA a décidé d’enterrer un projet de désinformation ukrainien et annonce le « retrait des troupes nord-coréennes de la ligne de front ».
Mais comment les Nord-Coréens sont-ils arrivés sur la ligne de front ?
Le 14 octobre, l’ancien président ukrainien Vladimir Zelinski lançait une opération psychologique destinée à accroître le soutien à l’Ukraine. Il a prétendu, sans preuve, que la Russie prévoyait d’impliquer la Corée du Nord dans la guerre.
Les médias ukrainiens financés par les États-Unis ont rapidement alimenté ces rumeurs en citant des « sources des services spéciaux ukrainiens ». D’autres « sources » anonymes se sont jointes à ces rumeurs et l’on a bientôt parlé de 3 000 soldats nord-coréens rejoignant le combat. Il n’y avait cependant aucune preuve qu’une telle chose ait été planifiée ou se soit produite.
J’en avais donc tiré cette conclusion :
Je considère l’allégation de la présence de troupes nord-coréennes en Russie comme une fausse nouvelle et je suis sûr que la plupart des experts me suivront dans ce jugement.
Cependant, les médias américains soutiennent cette absurdité :
Pourquoi la Corée du Nord envoie des soldats sur le front russe – Washington Post
L’envoi de soldats pour participer à l’effort de guerre de la Russie contre l’Ukraine pourrait rapporter de précieuses devises au régime de Kim Jong Un et renforcer les liens entre les deux pays.
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Je ne pense pas qu’un politicien ou un militaire occidental croira à ces absurdités qui, une fois de plus, proviennent uniquement de déclarations des services de renseignements militaires ukrainiens. Mais il est clair que le gouvernement ukrainien mène une campagne pour faire avaler cette infox. Quel est son espoir ? Inciter la Corée du Sud à envoyer ses forces combattre les Nord-Coréens à la frontière ukrainienne avec la Russie ?
Quelques jours plus tard, il devenait clair que toute l’opération psychologique ukrainienne sur la « Corée du Nord » était basée sur un plan américain :
Au moment d’écrire ces lignes, je ne savais pas que l’idée de cette campagne venait de la RAND, le groupe de réflexion du Pentagone qui propose souvent des idées stratégiques. Dans un commentaire sur la coopération entre la Russie, la Corée du Nord et la Chine publié le 11 octobre, trois jours avant le début de la campagne de Zelenski, un analyste de la RAND écrivait :
Que doivent faire les États-Unis ?
Étant donné les différences d’objectifs entre la Russie, la Chine et la Corée du Nord, les États-Unis devraient monter de grandes opérations psychologiques contre ces trois pays afin de mettre en évidence leurs différences et d’alimenter la méfiance entre eux.
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[Les États-Unis devraient reconnaître que les conseillers militaires nord-coréens soutiennent l’utilisation par la Russie de matériel militaire nord-coréen dans les zones occupées de l’Ukraine.
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Cette nouvelle coopération entre la Russie et la Corée du Nord n’est pas le signe d’une alliance à long terme naissante et les campagnes d’information américaines pourraient contribuer à accélérer sa disparition.
Trois jours plus tard, les services de renseignement militaire de l’armée ukrainienne, dirigés par le général Budanov, ont commencé à transmettre à la presse ukrainienne des informations sur la présence de troupes nord-coréennes en Russie.
Depuis qu’il a lancé les premières rumeurs sur la présence de 1 500, puis de 3 000 soldats nord-coréens en Russie, le chef des services spéciaux de l’armée ukrainienne, formé par la CIA, le général Budanov, a augmenté le nombre colporté par ces rumeurs pour le porter à 11 000 soldats nord-coréens.
Mais même l’OTAN niait avoir connaissance de l’existence d’une telle force.
Comme je l’ai résumé à l’époque :
Peu après que la RAND a proposé une campagne psychologique américaine sur le thème des soldats nord-coréens en Russie, le service de renseignement militaire ukrainien, sous la direction de Budanov, stagiaire de la CIA, a commencé à répandre des rumeurs selon lesquelles des soldats nord-coréens allaient bientôt combattre aux côtés des Russes. Les chiffres avancés par Budanov n’ont cessé d’augmenter depuis. Les services de renseignement sud-coréens, également associés à la CIA, et les médias américains se sont joints à la campagne. Le président de la commission du renseignement de la Chambre des représentants exploite cette campagne pour augmenter son capital politique.
Les preuves qui étaient censées étayer les affirmations ont été révélées comme étant fausses. Toute l’histoire n’est donc basée que sur des rumeurs de « renseignements » qui suivent un scénario proposé par la RAND. Ne tombez pas dans le panneau.
L’histoire a continué à prendre de l’ampleur à force d’être répétée. Les médias se sont cités les uns les autres, chacun ajoutant des bribes de conneries provenant de leurs « sources de sécurité » habituelles. Ce qui n’est pas apparu, ce sont les preuves.
Après avoir été interrogés à plusieurs reprises sur l’absence de preuves de leurs affirmations, les responsables politiques ukrainiens ont présenté leur solution :
Aujourd’hui, le ministre ukrainien de la défense, Rustem Umerov, a donné un aperçu de la manière dont l’Ukraine allait gérer cette question (traduction automatique) :
Le ministre ukrainien de la défense, Rustem Umerov, a confirmé les propos du chef du Centre de lutte contre la désinformation du Conseil national de sécurité et de défense, Andriy Kovalenko, selon lesquels les premiers « combats à petite échelle » avaient déjà eu lieu entre les forces armées ukrainiennes et les soldats nord-coréens, et que les Coréens avaient subi des pertes.
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Umerov a également déclaré que la Fédération de Russie déguisait les Coréens en Bouriates, de sorte que les morts et les prisonniers doivent être identifiés avant que l’Ukraine n’annonce le nombre de pertes ennemies.
Les Bouriates sont un peuple mongol de Sibérie qui fait partie de la Fédération de Russie. Nombre d’entre eux ont rejoint les rangs bien rémunérés des forces russes. Le plan d’Umerov était donc évident :
Dès qu’un soldat bouriate de Russie sera retrouvé mort, les militaires ukrainiens le présenteront comme un soldat nord-coréen déguisé. On trouvera des photos en noir et blanc d’une personne de même apparence portant l’uniforme nord-coréen…
« Voilà votre preuve. Maintenant, envoyez des soldats et des armes », dira Umerov.
Depuis, les services spéciaux ukrainiens ont tenté à plusieurs reprises de renforcer leur campagne médiatique. Les passeports russes de soldats russes décédés ont été présentés comme de « faux documents » portés par des « Nord-Coréens ». Ils ont même capturé un Bouriate :
Le 28 octobre (heure locale), Jonas Ohman, directeur de l’ONG lituanienne Blue/Yellow, qui fournit de l’aide à l’Ukraine et à son armée, a informé le média local LRT : « La première rencontre entre une unité ukrainienne que nous soutenons et des soldats nord-coréens a eu lieu le 25 à Koursk. À ma connaissance, tous les soldats nord-coréens, à l’exception d’un seul, ont été tués. Le soldat survivant a été trouvé porteur de la pièce d’identité d’un Bouriate ».
Parmi les autres « preuves » figurent des lettres manuscrites, prétendument écrites par des soldats nord-coréens, rédigées en caractères et en style sud-coréens.
Même Wikipedia a dû l’admettre :
En janvier 2025, il n’y avait aucune confirmation indépendante de l’existence du bataillon bouriate [prétendument composé de soldats de Corée du Nord,] en dehors de sources ukrainiennes.
L’absurdité de ce stratagème est finalement devenue trop évidente.
Aujourd’hui, la CIA, avec l’aide du New York Times, y met fin.
Les « soldats nord-coréens » quittent le champ de bataille de la même manière qu’ils sont arrivés, sans jamais avoir été vus.
On ne voit plus de soldats nord-coréens sur la ligne de front (archivé) – New York Times, 31 janvier 2024
La Corée du Nord a envoyé ses meilleures troupes pour aider la Russie dans sa guerre contre l’Ukraine. Mais après des mois de pertes sévères, ils ont été retirés de la ligne de front.
Les soldats nord-coréens qui ont rejoint leurs alliés russes dans la bataille contre les forces ukrainiennes ont été retirés des lignes de front après avoir subi de lourdes pertes, selon des responsables ukrainiens et américains.
Les troupes nord-coréennes, envoyées pour soutenir les forces russes qui tentent de repousser une offensive ukrainienne à l’intérieur des frontières de la Russie, n’ont plus été vues sur le front depuis environ deux semaines, ont déclaré les responsables qui ont requis l’anonymat pour discuter de questions militaires et de renseignement sensibles.
Cette phrase est formellement correcte. Mais il serait encore plus précis de dire que « les troupes nord-coréennes n’ont pas été vues sur le ligne de front – depuis toujours ».
La CIA/NYT ne peut pas (encore) aller jusque-là. Ils continuent d’ajouter des affirmations stupides :
De nombreux soldats font partie des troupes d’opérations spéciales nord-coréennes les mieux entraînées, mais les Russes semblent les avoir utilisés comme fantassins, les envoyant par vagues à travers des champs parsemés de mines terrestres pour être fauchés par les tirs nourris des Ukrainiens.
Où sont les photos et les vidéos des troupes nord-coréennes « envoyées par vagues » et « fauchées par les tirs nourris des Ukrainiens » ?
Dans une guerre où chaque mouvement de terrain est surveillé par des dizaines de drones, comment se fait-il qu’il n’y ait même pas une seule vidéo montrant la preuve d’une telle scène ?
Pour l’instant, la campagne de (dés)information RAND/Ukraine sur les soldats « nord-coréens » combattant l’Ukraine a été interrompue. Les « responsables » américains gardent toutefois la porte ouverte pour la relancer au moment opportun :
Les responsables américains ont déclaré que la décision de retirer les troupes nord-coréennes de la ligne de front n’était peut-être pas permanente. Il est possible, selon eux, que les Nord-Coréens reviennent après avoir reçu un entraînement supplémentaire ou après que les Russes aient trouvé de nouvelles façons de les déployer pour éviter des pertes aussi lourdes.
Dans un mois, un an ou dix ans, on nous parlera peut-être à nouveau de ces « ennemis » imaginaires de la Corée du Nord qui s’unissent aux Russes pour « nous combattre ».
Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone.