
Rencontre avec des enfants heureux
« Arrive une voiture qui s’arrête à notre niveau, et lorsque le conducteur baisse sa vitre, un des pères de famille en tête du cortège reconnaît Patrick Sébastien. Tout souriant, il gare sa voiture pour échanger un instant avec nous et prendre une photo », continue l’abbé. « Monsieur l’abbé, je ne vous demanderai pas de chanter ma dernière chanson qui s’appelle "Est-ce que tu l’as vu mon cul" », plaisante le chanteur, fidèle à sa réputation grivoise et provoquant l’hilarité générale. L’abbé rit, ne se laisse pas démonter et quand Patrick Sébastien continue « mais par contre, vous en avez fait une autre, tout à l’heure », petits et grands entonnent en chœur : « Aaaah, qu’est-ce qu’on est serré, au fond de cette boîte, chantent les sardines, chantent les sardines… » La rencontre impromptue fleure bon la France profonde, c’est vivifiant, rafraîchissant, loin de la pudibonderie qu’on prête à l’Église ou de la provocation convenue des chanteurs qui donnent dans le culturellement correct.
Une vedette à l'esprit trop gaulois
C’est là tout le problème. Licencié de France Télévisions en 2019, l'ancien animateur du Plus Grand Cabaret du monde et des Années bonheur ne répondait plus aux dogmes imposés dans l’audiovisuel public. Il explique d’ailleurs, lit-on dans Télé-Loisirs, qu’« il y a des chemins qui sont interdits. […] Moi, je suis un humaniste, donc toutes les différences me plaisent. Mais pas si on met la mienne à la poubelle. Et c'est ce qui se passe. Il y a cette mode où il faut être homo, trans […] Moi, je suis un homme, je suis vieux, je suis blanc… Je n'y suis pour rien, je n'ai pas demandé à être comme ça et je ne voudrais pas que ce soit un handicap. Alors, ça rééquilibre, c'est très bien. Mais je ne veux pas que ma différence à moi, on la foute aux égouts… » « Les propos de Patrick Sébastien vont plaire aux anti-woke », remarquait Closer, dubitatif.
Ce n'est pas faux et cela n’arrête pas le chanteur connu pour son franc-parler et sa liberté de ton qui, elle, ne plaît pas aux woke : « J'ai été viré pour ça, quand même : "homme blanc de plus de cinquante ans" […] Normalement, ça devrait être interdit par la loi, on n'a pas le droit de virer quelqu'un en raison de son âge, de son sexe ou de sa couleur de peau. » Normalement... mais c’est oublier que dans la différence, il est une hiérarchie, et qu'une vedette à l’esprit trop gaulois a peu de chance de tenir le haut du pavé ! La différence est une richesse si elle est uniforme et idéologiquement conforme.
Patrick Sébastien en a fait les frais et expliquait aux Grosses Têtes de RTL que pour lui, « la télé, c’est fini, on [l]’a jeté comme une merde, [il] ne [va] pas y revenir ! Et puis ça a tellement changé, c’est plus du tout pareil. » Comme Bertrand Chameroy qui se moque de lui sur France Inter, la condescendance est de mise pour tout ce qui ferait trop paillard, trop « popu », trop franchouillard : « Allô, Rachida ? Elle trouve qu’on est toujours pas assez popu ! Alors, ça va piquer très fort, avant le 8h, mais je suis contraint de vous diffuser le dernier titre de Patrick Sébastien. » Catalogué comme « ringard » ou « vulgaire », le chanteur n’a de toute façon plus besoin de cette chaire audiovisuelle en perte de vitesse pour trouver son public. Il explique que ses vidéos, dont celles de son dernier album qui surjoue le côté grossier qu’on lui prête, cumulent déjà plus de 40 millions de vues. Il prévoit même, rapporte La Dépêche, d’ouvrir « le plus petit cabaret du monde », « un petit village gaulois contre la morosité » dans sa campagne lotoise.
Nul doute que, dans ce « petit village d’irréductibles Gaulois qui résiste encore et toujours », curés et paroissiens seront les bienvenus parce qu’eux aussi sont parmi les derniers des Mohicans. C’est d’ailleurs le nom d’une de ses dernières chansons : « On ne se pliera jamais, on est des résistants. On ne cédera jamais, on est des Mohicans. »