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Dégradations en tous genres

Le recul de la notation Moody's des produits financiers de l'État central parisien pourrait, en elle-même et dans l'immédiat ne pas entraîner de conséquences trop graves. Elle est cependant intervenue ce 19 novembre, au plus mauvais moment. Elle corrobore la publication par The Economist la semaine précédente d'un dossier accablant de 14 pages qui aurait dû mettre en garde contre la perspective d'une catastrophe analogue aux scénarios imposés à l'Espagne, à la Grèce, au Portugal et même à l'Italie.

À l'instant même où ces lignes sont écrites la gouvernance européenne se révèle incapable de prendre les mesures les plus évidemment nécessaires. Bizarre assemblage de structures impuissantes typiquement synarchiques elle emboîte des comités qui actuellement se télescopent. Les jours à venir risquent donc d'être sérieusement marqués par ce chaos.

Tomber dans la dépendance du FMI, de l'Eurogroupe et de la BCE dégraderait donc infiniment plus le pays que la hausse éventuelle des taux d'intérêt nominaux.

L'attelage Hollande-Ayrault n'avait donc pas besoin du handicap constitué par ce nouvel avertissement sans frais sur les marchés obligataires.

Or, il se trouve désormais que sur les 17 membres de la Zone Euro, il ne reste plus que 5 pays vraiment crédibles aux yeux de la finance Internationale. Il s'agit de l'Autriche, du Luxembourg, des Pays-Bas, de la Finlande, et bien entendu le plus puissant en Europe : l'Allemagne de Mme Merkel. Les États du sud semblent de plus en plus détachés de ce groupe à la fois géographique et culturel.

Le découplage frappe également la France de M. Hollande, cela va sans dire mais cela mérite d'être rappelé à ceux qui ne l'ont pas encore compris.

Il faut certes beaucoup d'ingénuité pour suivre la réaction du gouvernement. Celui-ci réinvente, à 30 ans de distance, – plus exactement il sort des poubelles de l'oubli, – pour expliquer ses échecs, la rhétorique de l'héritage.

Quand nous entendons un Moscovici déployer cet argumentaire avec l'appui de ce que "Le Monde" (1)⇓ appelle "un proche de François Hollande interrogé par l'AFP" nous voguons allègrement en plein "illusionnisme de gauche" (2)⇓.

N'ose-t-on pas nous dire sans rire que "ceci valide notre stratégie économique" ?

Reportons-nous en effet à notre "grand journal du soir, en page précédente. Il décortique à sa manière les raisons de la décision de dégradation prise par Moody's. On pointe trois arguments principaux, alimentant les inquiétudes. Celles-ci ne troublent pas seulement les agences de notation. Elles pèsent sur les décisions de bailleurs de fonds internationaux. Or c'est auprès de ceux-ci que la République jacobine, que ses collectivités locales, que ses caisses sociales, que ses usines à gaz étatiques vont quémander des prêts destinés à payer des intérêts, sans doute encore trop modestes, et faire semblant de combler des déficits en aggravation constante depuis 30 ans.

Voici donc les 3 motifs, dans l'ordre cité par le Monde

1° D'abord les multiples défis structurels. Ah, certes, le rapport Gallois est apprécié en lui-même de façon positive au nom de l'agence par M. Dietmar Hornung. Mais ce macro-économiste optimiste basé à Francfort note que son effet positif, auquel il semble croire, ne risque d'être perceptible qu'en 2014.

Au bout du compte ce rapport, méthodologiquement aberrant, n'a fait qu'amoindrir très provisoirement une dégradation promise à la "catégorie B".

"Nous attendons les annonces", nous disent les experts à propos d'une question cruciale. Sur celle-ci achoppent actuellement tous les programmes de rigueur en Europe, puisqu'il s'agit de l'évolution du marché du travail.

Les technocrates internationaux "attendent". Ils risquent fort, telle sœur Anne de ne pas voir grand-chose venir, tant qu'un Michel Sapin pourra dire que les 35 heures restent impossibles à négocier.

2° Moody's remarque le caractère "incertain" [nous dirions plus précisément "mensonger"] des perspectives budgétaires, elles-mêmes fondées sur des hypothèses de croissance a priori irréalistes.

3° Enfin la France se trouve l'un des pays les plus exposés à la crise de la Zone Euro, au sein de laquelle précisément son influence ne cesse de reculer.

Sur aucun de ces trois points le pouvoir actuel ne peut esquiver la responsabilité qui lui incombe, au tire des résultats de son action, ou de son inaction, des six mois écoulés.

Une telle dégradation technique reflète en définitive un délitement politique, et osons le dire moral.

On ne pourra plus se le dissimuler longtemps.

JG Malliarakis http://www.insolent.fr/

notes

    1. cf. Édition papier en date du 21 novembre p. 3
    2. cf. le petit livre de Claude Fazier.

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