Que sait-on sur cette société secrète dirigeant prétendument les affaires du monde ?
Une légende en verrait l’origine parmi les constructeurs du Temple de Jérusalem. Mais sa véritable histoire prend sa source en l’an 614, bien avant Charlemagne, lorsque le Pape Boniface IV octroie aux MAÇONS **, ARCHITECTES, SCULPTEURS etc., les premières FRANCHISES, qui les libéraient de tous les statuts locaux, édits royaux ou autres obligations imposées aux habitants des pays où ils allaient séjourner.
Leurs avantages étaient d’importance capitale, leur assurant :
- Le passage libre des frontières
- Une justice indépendante
- La transmission des SECRETS techniques et le service de l’Église.
Mais au XVIème siècle, la Révolution protestante entraîna les corporations de maçons, maîtres d’œuvre etc., travaillées par la rébellion à l’Église de Rome et le libre examen. Cette contagion de la RUPTURE entraîna troubles, guerres civiles et religieuses partout.
C’est au XVIIIème siècle que se produisit sa rupture irréparable. Deux pasteurs protestants, Désaguliers en 1716 et Anderson en 1739, ont fait détruire tous les documents anciens prouvant l’origine catholique de la franc-maçonnerie et rédigent les NOUVELLES CONSTITUTIONS.
Les « loges » et « ateliers » deviennent peu à peu des instruments de la POLITIQUE ANGLO-SAXONNE. Et en 1773, se constituèrent en Angleterre la Grande Loge écossaise déiste et le Grand Orient de France, athée, qui se séparent.
C’est ainsi que l’Église fut amenée à excommunier la franc-maçonnerie, d’abord en 1738, puis en 1751, par Benoît XIV. Il avait à cela d’excellentes raisons :
- le SECRET auquel étaient tenus les franc-maçons : tout d’abord OPÉRATIF (se rapportant aux « chefs-d’œuvre » des cathédrales), il était devenu SPÉCULATIF, c'est-à-dire un engagement inconditionnel philosophique, idéologique pour un BUT INCONNU, avec l’entraide occulte entre tous les franc-maçons.
- Secondement, la franc-maçonnerie devenait une puissance ANTI-CATHOLIQUE anglaise.
- Enfin, son humanisme contraire à la vérité révélée, même en sa branche déiste au XXème siècle, après Jean Macé au XIXème, en 1875.
Et le jugement négatif de l’Église sur la franc-maçonnerie reste inchangé. (1)
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Les grands philosophes français du XVIII siècle sont DÉISTES ou ATHÉES ; les « loges » et « ateliers » de la franc-maçonnerie dominée par l’Angleterre, ont marqué une VOLONTÉE DÉLIBÉRÉE de détruire l’église.
Voltaire, auteur d’une immense correspondance, terminait toujours ses lettres par la formule: « ÉCRASONS l’INFÂME », c'est-à-dire l’Église catholique. Ils n’ont été que trop bien suivis pendant la Terreur!
Il faut savoir que ces grands philosophes français – dont l’œuvre est admirable par ailleurs, puisqu’ils furent les chantres de la liberté et de l’égalité, dit-on – ont montré parfois un étonnant mépris du peuple! Ils ont même reproché à l’Église de l’instruire!
En 1763, La Charlotais (1701-1785) qui venait de demander le bannissement des jésuites, écrivait : « N’y a-t-il pas trop d’écrivains, trop d’académies, trop de collèges ? Le peuple même veut étudier: des laboureurs, des artisans, envoient leurs enfants dans les collèges des petites villes où il en coûte peu pour vivre… Les “Frères de la Doctrine Chrétienne” qu’on appelle “Ignorantins” sont survenus pour achever de tout perdre. Ils apprennent à lire et à écrire à des gens qui n’eussent dû apprendre qu’à dessiner et à manier le rabot et la lime. Le bien de la société demande que les connaissances du peuple ne s’étendent pas plus que ses occupations ».
Le 28 février 1763, Voltaire lui répond: « Je vous remercie de proscrire l’étude chez les laboureurs. Moi qui cultive la terre, je vous présente requête pour avoir des manœuvres et non des clercs tonsurés. Envoyez-moi surtout des “Frères Ignorantins” pour conduire mes charrues et les atteler ».
Les « Frères Ignorantins », ainsi appelés parce qu’ils instruisaient les ignorants, s’appelèrent aussi « Frères des Écoles Chrétiennes »; Ordre fondé au XVIIème siècle par saint Jean Baptiste de La Salle. Cet Ordre existe toujours.
Le démantèlement de l’Église de France commença en 1790 par la CONSTITUTION CIVILE DU CLERGÉ à laquelle tout prêtre devait porter serment, qui faisait élire le clergé par tous les citoyens – protestants et juifs compris – et interdisait l’obéissance au Pape! D’où la clandestinité et l’émigration, puis les massacres.
Sous la Convention, les églises deviennent des « clubs » ou sont démolies; à Notre Dame de Paris, la « déesse Raison » (une danseuse de l’Opéra) est exhibée sur le Maître-autel pour la fête de l’« Être Suprême » des franc-maçons.
Les « loges » maçonniques et l’or anglais travaillaient notre malheureux peuple en sous-main et le duc d’Orléans lui-même en bénéficiait.
Et le général Bonaparte, imprégné des idées nouvelles en leur partie raisonnable et en même temps rattaché à notre tradition Chrétienne ?
Idéal et ardente curiosité intellectuelle le poussèrent à un contact avec la franc-maçonnerie, à laquelle la plupart des officiers adhéraient, et en laquelle il voyait peut-être une société de secours mutuel en cette période sanglante. Sa lumineuse intelligence et son bon sens légendaire eurent vite raison de cette erreur. Et parvenu à la tête de l’État, l’Empereur Napoléon combattit ce pouvoir occulte dont beaucoup de rouages étaient manipulés par Londres.
Ainsi, la tragédie historique – inoubliable épopée – se doublait en quelque sorte d’un drame occulte.
Toute une bibliographie recueillie par l’historien Charles de Flahaut en 1943 (2) et totalisant 45 auteurs, permet de se forger une idée assez précise au sujet de l’entourage de Napoléon, qui fut victime non seulement de l’hégémonie anglaise, mais de trahisons flagrantes de la part de hauts dignitaires de l’État, de compagnons d’armes en qui il plaçait sa confiance, le cabinet de Londres tirant les ficelles.
Ce que révèle l’historien est à proprement parler, ahurissant, et voici quelques noms découverts dans les fichiers des loges dès 1942 – toutes ces archives ayant été envoyées à la Bibliothèque Nationale-Richelieu après perquisitions:
CLARKE, duc de Feltre, ministre de la Guerre, membre de la Loge du Grand Orient de France (GOF).
AUGEREAU, maréchal de France, duc de Castiglione, grand officier d’honneur du GOF, membre de la loge « Les enfants de Mars » à l’Orient, du 27ème Régiment d’Infanterie légère.
TALLEYRAND, prince de Bénévent, ex-évêque d’Autun, Grand Dignitaire, le plus ancien vénérable de la loge jacobine « Philalètes » à l’Orient de Paris. Membre des loges « Les Neuf Sœurs et les « Francs Chevaliers » à l’Orient de Paris.
JOSEPH BONAPARTE, roi d’Espagne, Grand Maître du Grand Orient de France. (3)
MARMONT, maréchal de France, duc de Raguse. Membre de la loge « La Candeur » à l’Orient, du quartier général du 6ème corps de la Grande Armée.
Maréchal BEURNONVILLE, Premier Grand Maître adjoint et Grand Commandant du Grand Orient de France, Vénérable d’honneur de la loge des « Chevaliers de la Croix de Saint-Jean de Palestine » à l’Orient de Troyes.
MACDONALD, duc de Tarente, maréchal de France, Grand Conservateur, puis Grand Maître adjoint du Grand Orient de France.
Baron de GROUCHY, maréchal de France. Membre de la loge « La Parfaite Union » à l’Orient, du régiment de dragons du Dauphin.
Nathan ROTHSCHILD, banquier, membre de la « Loge of Emulation » des grandes loges d’Angleterre.
FOUCHÉ, duc d’Otrante, ministre de la Police. Grand officier d’honneur du Grand Orient de France, Grand Conservateur de la Grande Loge de France, Vénérable de la loge jacobine « Philalètes » à l’Orient de Paris, membre de la loge « Les citoyens réunis » à l’Orient de Mélun et de la loge « Sophie Madeleine, reine de Suède » à l’Orient d’Arras.
Marquis de LAFAYETTE, général de la Garde Nationale que Napoléon avait libéré des geôles autrichiennes (1797). Vénérable de la loge « Les Amis de l’Humanité » a l’Orient de Rozoy, membre des loges de « La Candeur », du « Contrat Social » à l’Orient de Paris.
Ce ne sont que quelques exemples français. Et il serait possible de citer chez nos ennemis d’alors, auteurs de sept coalitions successives contre la France, des noms aussi prestigieux que celui du duc de Wellington, membre non pas du Grand Orient mais du « Grand Firmament » de Londres!
En Europe, pourtant libérée par l’Empereur de la féodalité, les sociétés secrètes, comme les « Carbonari » italiens, et autres en Allemagne, sont infiltrées. Et en Suède, le « Grand Firmament » s’adresse à Bernadotte en lui offrant « le million de livres sterlings » qui le fit entrer en 1814 dans la coalition. L’« Ordre » manœuvra, écrit Charles de Flahaut, « afin que tous les peuples d’Europe, depuis les Tartares jusqu’aux Napolitains, prissent les armes contre Napoléon ».
L’épisode Suédois est assez écœurant. Car le roi Charles XIII n’ayant pas d’héritier avait sollicité l’empereur des français. Et Napoléon choisit un de ses frères d’armes. C’était ainsi que le maréchal Bernadotte devint roi de Suède, et Désirée Clary, son épouse, reine à ses côtés.
Fille de ce célèbre fabricant de savon de Marseille, elle illustre parfaitement ce mot que Chateaubriand prononça plus tard en parlant de Napoléon 1er : « Monté au trône, il y fît monter le peuple avec lui ». C’est ainsi que ses descendants de Bernadotte occupent toujours le trône suédois et président chaque année le prix Nobel, décerné aux scientifiques de premier plan.
Le plus piquant de cette histoire, est que Désirée Clary avait été la première petite fiancée de Napoléon. Mais Joseph, frère de Napoléon, ayant déjà épousé une Clary, le fabricant de savon avait trouvé qu’« un Bonaparte suffisait dans la famille »…
Mais le drame qui se joue est d’une toute autre ampleur.
Ainsi, les sept coalitions successives qui liguèrent toute l’Europe d’Ancien Régime contre la France nouvelle furent-elles alimentées financièrement par Londres et la franc-maçonnerie toujours excommuniée par l’Église, ainsi que l’a rappelé le Pape Jean-Paul II à cause du fameux SECRET.
J’ai eu l’occasion d’avoir en mains en 1942, grâce à un parent chef de service à la Bibliothèque Nationale, un petit manuel cartonné contenant le « rituel » étonnant de réception d’un nouveau membre, où rien ne manque, ni le triangle, ni le « tablier » du maçon, etc… Atmosphère étrange faite pour frapper l’imagination; leurs réunions importantes, où sont prises des décisions qui tendent à influencer tous les rouages de l’État s’appellent CONVENTS. Des signes secrets, connus seulement des initiés, sont échangés parfois.
Et, chose bizarre et extravagante: à Orléans, lors des fêtes de Jeanne d’Arc du 8 mai, dans la série de cartes postales de 1912 montrant les délégations une par une, on y découvre des « franc-maçons » en haut-de-forme et habit noir, tablier de cuir blanc devant eux, orné des symboles habituels! Étonnante participation d’athées avérés à la célébration d’une sainte. (4)
Lors de la Réforme du Droit Canon par Rome en 1983, Jean-Paul II et Mgr. Ratzinger, futur Benoît XVI, son secrétaire et ami, ont réaffirmé solennellement : « le jugement négatif de l’Église sur la franc-maçonnerie demeure donc inchangé parce que ses principes ont toujours été considérés comme incompatibles avec la doctrine de l’Église ; c’est pourquoi il reste interdit par l’Église de s’y inscrire ».
Et Napoléon en tout cela ?
Au risque de nous répéter, nous dirons pour conclure : son sort était réglé à l’avance. Restaurateur d’une France qu’il a, selon De Gaulle, « ramassée à la petite cuiller », restaurateur du culte catholique si cruellement persécuté, il devait disparaître. Des conspirateurs armés devaient, dès 1800, surprendre son escorte sur la route de Malmaison, le faire prisonnier et l’emmener à Sainte-Hélène, ou le tuer en cas de résistance. Wellington lui-même l’a avoué à Stanhope, ce qui fut fait quinze ans plus tard, après qu’il ait résisté à tant de coalitions.
Renée Casin.
Lauréate de l’Académie française et des Arts et des Lettres de France
Membre du Comité de la Francophonie de la Francosphère Mexique-France
Président du Comité Historique de l’Institut Napoléonien Mexique-France *
* Du même auteur, voir aussi sur le site de l’Institut Napoléonien Mexique-France (INMF), Napoléon et la religion : http://inmf.org/freligion.htm
** Capitales de l’auteur.
NOTES:
1) On peut toujours lire avec profit : « L’Église sur la franc-maçonnerie », par Maurice Colinon aux éditions Fayard.
2) Éditions littéraires et artistiques, 13 rue des Saints-Pères, Paris.
3) « Napoléon n’était pas maçon, ça, c’est prouvé. C’est vrai qu’il n’est pas maçon, que tout autour de lui était maçon, mais il a protégé la franc-maçonnerie ; non pas pour les beaux-yeux des maçons, mais parce que ça le servait. Il aurait pu dissoudre la maçonnerie pour de bon, mais il se serait mis beaucoup de gens à dos, à commencer par ses proches, la famille, ses maréchaux etc. Mais comme il était plus intelligent que ça, il a nommé son frère Grand Maître du Grand Orient, qui était la seule obédience à l’époque, en France, et comme ça il avait la mainmise dessus. Il contrôlait tout, sans avoir l’air de le contrôler. Il était très habile Napoléon, très habile. » Yves-Fred Boisset.
4) C’est Napoléon qui a rétabli la fête de Jeanne d’Arc à Orléans, supprimée par la Convention.
http://www.generationfa8.com