Le mois de mai s'ouvre sur une journée qui fut instituée officiellement en 1941 « Fête du Travail et de la Concorde sociale » C'était une façon très claire de récuser la lutte des classes tout en honorant comme ils le méritent les travailleurs, habitués depuis 1889 à rappeler par des manifestations leurs exigences de justice sociale (en particulier réduction de la semaine de travail à 48 heures) et le sacrifice des ouvriers américains qui, après la grève générale du 1er mai 1886, ont eu trois morts lors de la manifestation du 3 mai puis quatre autres, pendus en 1887.
En cette année 2013 est célébrée à la fin du mois de mai la Fête des Mères. Cette journée fut instituée fête nationale, sous la dénomination de « journée des Mères », en 1941, avec la précision qu'elle devait se dérouler le dernier dimanche de mai. Ainsi l'Etat français du Maréchal Pétain a-t-il choisi de marquer le « joli mois de mai » par deux illustrations de sa devise « Travail, Famille, Patrie », qui reste une bonne référence pour les femmes et les hommes de bon sens, comme l'a reconnu un jour un certain Raymond Barre...
Mais il est bon de rappeler que bien d'autres initiatives, heureuses, de l'Etat français ont perduré jusqu'à nos jours. Tout simplement parce que la diabolisation, inique, de la figure du Maréchal, n'a pas réussi à faire oublier le riche héritage qu'il a laissé, pour améliorer la vie quotidienne des Français, ce « legs immense » qu'évoque Emmanuel Le Roy Ladurie (dont le père fut ministre de l'Agriculture et du Ravitaillement à Vichy en 1942) dans la préface qu'il a donnée au livre fort instructif de Cécile Desprairies, L'héritage de Vichy, ces 100 mesures toujours en vigueur (Armand Colin, 2012). Beaucoup de lecteurs découvriront sans doute, dans cet ouvrage, que bien des mesures jugées aujourd’hui, à juste titre, si positives, sont dues à cet État français officiellement honni et dont les haineux professeurs de morale du style Bernard-Henri Lévy voudraient gommer jusqu'au moindre souvenir. Heureusement, ils se cassent les dents sur les réalités. Les réalités ? Parmi beaucoup d'autres, en voici quelques-unes.
Le 29 mars 1941, l'allocation de mère au foyer est transformée en allocation de salaire unique, étendue aux épouses d'artisans et d'agriculteurs, tandis que loi du 22 septembre 1942 en faveur du travail féminin donne capacité à la femme mariée de disposer seule de son capital dans le cadre de la séparation de biens, d'ouvrir un compte en banque sans l'autorisation du mari, de conclure un contrat de travail...
En 1941 une loi stipule que « pendant le mois qui précédera et le mois qui suivra l'accouchement, toute femme enceinte devra, sur sa demande, être reçue gratuitement et sans qu'elle ait besoin de justifier son identité, dans tout établissement hospitalier public susceptible de lui donner les soins que comporte son état ». Cette loi « sur la protection des naissances » met en place ce que l'on appelle aujourd'hui « l'accouchement sous X ». Une loi de 1943 organise la prise en charge par les services de l’État des enfants « trouvés, abandonnés, pauvres, sans soutien, maltraités, délaissés ou moralement abandonnés ». Quant aux allocations familiales, elles sont étendues et augmentées à plusieurs reprises de 1940 à 1943.
Dans le domaine de la santé, l'instauration d'un carnet de santé imposé à chaque enfant, avec un carnet de vaccination qui doit être régulièrement mis à jour par un médecin, permet un efficace suivi sanitaire. Fin 1941 est rendue obligatoire la visite médicale à l'école, l'accent étant mis sur la prévention des maladies contagieuses. Quant au monde du travail, il bénéficie d'une loi promulguée en 1941 « relative à la protection médicale du travail », qui met en place des services médicaux et sociaux du travail. Naît ainsi une médecine du travail qui - n'en déplaise aux esprits chagrins - s'inspire directement des réalisations de l'Allemagne nationale-socialiste. Il en va de même pour les « comités sociaux d'entreprise », destinés à associer employeurs et salariés pour la prise en compte des intérêts légitimes de ceux-ci. Ces structures survivront, après 1945, sous le nom de « comités d'entreprise ». Il en va de même pour bien d'autres organismes qui, même en changeant de nom (INSEE, INED, par exemple), devront leur existence à la politique pétainiste. Leur liste est trop longue pour être donnée ici. Ce rappel serait pourtant salutaire car, comme disait le Maréchal, les Français ont la mémoire courte. Il est vrai que certains font tout pour qu'il en soit ainsi...
Pierre VIAL. Rivarol du 31 mai 2013