Guillaume Bernard critique l'entretien donné par François Hollande :
"Trois principales caractéristiques peuvent être dégagées des propos tenus par François Hollande lors de la traditionnelle interview du 14 juillet.
1. Un sentiment de déficit quant à son charisme politique : nombre de ses propos apparaissent comme la combinaison de la méthode Coué (la reprise économique serait « là ») et de la navigation à vue (les prélèvements obligatoires seront augmentés si cela s’avérait « nécessaire »). Avec le niveau de dette publique que connaît la France, il paraît peu vraisemblable (sauf à faire des coupes claires) que cela ne devienne pas indispensable. En outre, il n’est peut-être pas inutile de noter, au passage, que l’engagement du président de la République de ne pas augmenter les impôts ne concerne que l’Etat, nullement la Sécurité sociale ou les collectivités territoriales auxquelles l’Etat confie (se défausse ?), d’ailleurs, de plus en plus de compétences.
2. Une confirmation quant à ses orientations idéologiques profondes : candidat du Parti « socialiste », François Hollande est authentiquement social-démocrate, c’est-à-dire qu’il accepte l’économie de marché mais devant être régulée par l’intervention de la puissance publique. En assumant la mise en place d’emplois pouvant être considérés comme artificiels parce que financés avec de l’argent public et en affirmant que la réduction des déficits devait être réalisée mais sans que celle-ci n’étouffe l’activité économique, le président de la République s’est fait le farouche défenseur de l’Etat-providence. Il est sans doute regrettable que les journalistes qui l’interrogeaient ne lui aient pas demandé (puisqu’il a explicitement pris position contre tout protectionnisme) ce qu’il pensait de la préférence nationale en matière sociale préconisée par le Premier ministre britannique, Monsieur David Cameron. Enfin, sur la question de la réforme des retraites, sa présentation des enjeux a été très édulcorée : rien sur les régimes spéciaux, rien sur la dichotomie fondamentale entre les retraites financées par les cotisations sociales et les rémunérations à vie des fonctionnaires qui, elles, sont budgétisées.
3. Un refus entêté d’envisager, en face, certaines réalités sociales et culturelles. Est-il vraiment utile de relever la nième réaffirmation béate de la théorie du « creuset républicain » à propos de l’islam ? Dans la prise de parole présidentielle, les préoccupations des Français ont quasiment été réduites aux questions économiques (qui ont, naturellement, de l’importance) ; mais, d’aucuns pourraient interpréter sa vision des choses comme étant purement matérialiste. Ses silences sont extrêmement révélateurs. Aucune allusion à l’immense mouvement populaire de « La Manif Pour Tous » et l’inquiétude de nombreux Français sur l’évolution des mœurs et de la bioéthique. Mais surtout, pas le moindre mot sur l’insécurité et les émeutes urbaines ! C’est effarant. Dans le fond, c’est la crise des fonctions régaliennes de l’Etat qui a été presque totalement éludée dans l’intervention présidentielle. Sa prise de position sur la question énergétique est, à ce titre, emblématique : François Hollande a martelé que la France devait être « exemplaire » ; il n’a jamais parlé d’indépendance nationale. "