Arnaud Bordes, vous publiez aux éditions Auda Isarn votre dernier livre Pop Conspiration. Entre espionnage, conspirologie et post punk, l’héroïne, AnneMarie Pop, semble évoluer dans un univers fortement inspiré par Jean Parvulesco. Avez-vous connut le maitre de l’oniroman ? Quelle a été son influence sur vous ?
Je l’ai rencontré assez régulièrement, vers Saint-Sulpice, ou dans un café près La Muette (lieu qui participait de son esthétique du secret). Il me racontait des anecdotes sur de Roux, Hallier, Bergier…, d’étourdissantes choses sur Staline et le GRU. Nous parlions de littérature fantastique.
M’a-t-il influencé ? On le dit. D’autant, sans doute, que dans Pop Conspiration les références sont davantage politico-historiques. Et que lui-même y apparaît.
J’ai cependant toujours apprécié manipuler les références, littéraires, esthétiques. Aussi, cette fois, mes influences seraient plutôt dans Grasset d’Orcet et Pierre Dujols.
Pop Conspiration se compose de 37 petits chapitres, a l’écriture incisive et vaporeuse. On y trouvera moins l’influence du style décadent que je vous affectionnez par ailleurs. Pourquoi de tels changements stylistique ?
Pour le plaisir de changer.
De même qu’en alchimie, il y a dans l’écriture la voie humide, qui est celle de l’Asianisme et des nébulosités sophistes, des rhétoriques dissolvantes et complexes (l’apogée étant chez certains Grands Rhétoriqueurs du XVe siècle ou dans les Histoires tragiques de François de Rosset) ; et la voie sèche, qui est celle des clartés soufrées, de « l’éclat de l’escarboucle leste ».
Disons que j’ai pris la voie sèche.
Œuvre également politique, Pop Conspiration narre l’affrontement entre les agents de Murcie et Morvan. Vous semblez prendre parti pour Murcie. Serais-ce là le symbole des anciennes – mais toujours très actuelles luttes entre Guelfes et Gibelins ? Ou dans un autre ordre d’idée, entre la modernité et la tradition ? Qu’est-ce qui vous amené à vous rangez ici plutôt que là ?
Morvan et Murcie tiennent ensemble pour la Tradition, dont ils sont et qu’ils portent. Aucun n’est moderne ou progressiste.
L’Histoire est peut-être un labyrinthe, où l’on se perd. Perdition et labyrinthe entendus initiatiquement (voir Mircea Eliade). Morvan et Murcie ne s’y égarent pas, ils sont le labyrinthe.
Labyrinthe qui est également celui des Silentiaires (autre désignation probable de Morvan et Murcie). Les Silentiaires sont ces chroniqueurs énigmatiques (quoique attestés par Nicolas de la Mare, commissaire du Roi au Chatelet, et Adolphe Thiers) qui turent l’Histoire, dont ils dissimulèrent la vérité, bien des événements aussi, qu’ils chiffrèrent, manipulant la chronologie, les dates, les séquences, les intervalles…
C’est à rapporter, éventuellement, à l’école Récentiste qui postule que l’Histoire n’est pas telle qu’on la croit, que la chronologie des événements diffère et que les faits sont autres.
Murcie, en effet, incline vers la paroisse, la cité, Rabelais, les Catholiques, les Armagnacs… Ce doit être, j’imagine, mon côté guelfe qui me le fait apprécier.
Il est rare que des héroïnes soient aussi cruelles et déterminées. Pourquoi avoir choisi une femme pour incarner Murcie ?
Pour le romanesque d’abord – rien de mieux qu’une jeune femme dépravée et nostalgique, qui, bien raisonnablement, n’admire rien ni personne.
Elle n’est pas de Murcie. Elle en fut, à un moment de sa vie.
Elle a, pour reprendre à nouveau Eliade, « ce goût de la vanité des choses qui pénètre tout [son] être, circule avec [son] sang. »
Le « poids de l’Histoire » l’ennuie. Pour s’en affranchir, alors que d’autres cherchent un ou le temps sacré, elle se plaît dans la pose, le geste, la somptueuse futilité, dans l’instant pop. La différence n’est d’ailleurs pas là de nature, mais de degré.
Certains, férus d’archétypes, pourront y trouver un avatar de l’éternel féminin. Lequel ? Je leur laisse le plaisir de choisir.
Votre livre est émaillé de références musicales, avec un goût prononcé pour le post punk et le néo-folk. Quelle est l’influence de la musique sur votre écriture ? Participe-t-elle de l’élaboration de votre style ?
Malgré des incursions plus ou moins longues dans le Classique ou l’Industriel, je ne me suis jamais vraiment dépris du post-punk. Joy division, la plupart des groupes Factory, Section 25, The Wake, The Names…, m’importent. Sans omettre Minimal compact ou encore The Sound… ou, tout autrement, les Byrds.
J’écris, oui, avec ces musiques. Je ne saurais sans.
Vous êtes également l’Altmeister des éditions Alexipharmaque, comment devient-on éditeur ? Pourquoi avoir choisi ce chemin difficile ?
S’il est une chose que je crois savoir faire, c’est rechercher des livres et lire, tout le temps, de tout, en quantité. Devenir éditeur est peut-être une manière de rendre un rien utile une telle obsession.
Je l’ai rencontré assez régulièrement, vers Saint-Sulpice, ou dans un café près La Muette (lieu qui participait de son esthétique du secret). Il me racontait des anecdotes sur de Roux, Hallier, Bergier…, d’étourdissantes choses sur Staline et le GRU. Nous parlions de littérature fantastique.
M’a-t-il influencé ? On le dit. D’autant, sans doute, que dans Pop Conspiration les références sont davantage politico-historiques. Et que lui-même y apparaît.
J’ai cependant toujours apprécié manipuler les références, littéraires, esthétiques. Aussi, cette fois, mes influences seraient plutôt dans Grasset d’Orcet et Pierre Dujols.
Pop Conspiration se compose de 37 petits chapitres, a l’écriture incisive et vaporeuse. On y trouvera moins l’influence du style décadent que je vous affectionnez par ailleurs. Pourquoi de tels changements stylistique ?
Pour le plaisir de changer.
De même qu’en alchimie, il y a dans l’écriture la voie humide, qui est celle de l’Asianisme et des nébulosités sophistes, des rhétoriques dissolvantes et complexes (l’apogée étant chez certains Grands Rhétoriqueurs du XVe siècle ou dans les Histoires tragiques de François de Rosset) ; et la voie sèche, qui est celle des clartés soufrées, de « l’éclat de l’escarboucle leste ».
Disons que j’ai pris la voie sèche.
Œuvre également politique, Pop Conspiration narre l’affrontement entre les agents de Murcie et Morvan. Vous semblez prendre parti pour Murcie. Serais-ce là le symbole des anciennes – mais toujours très actuelles luttes entre Guelfes et Gibelins ? Ou dans un autre ordre d’idée, entre la modernité et la tradition ? Qu’est-ce qui vous amené à vous rangez ici plutôt que là ?
Morvan et Murcie tiennent ensemble pour la Tradition, dont ils sont et qu’ils portent. Aucun n’est moderne ou progressiste.
L’Histoire est peut-être un labyrinthe, où l’on se perd. Perdition et labyrinthe entendus initiatiquement (voir Mircea Eliade). Morvan et Murcie ne s’y égarent pas, ils sont le labyrinthe.
Labyrinthe qui est également celui des Silentiaires (autre désignation probable de Morvan et Murcie). Les Silentiaires sont ces chroniqueurs énigmatiques (quoique attestés par Nicolas de la Mare, commissaire du Roi au Chatelet, et Adolphe Thiers) qui turent l’Histoire, dont ils dissimulèrent la vérité, bien des événements aussi, qu’ils chiffrèrent, manipulant la chronologie, les dates, les séquences, les intervalles…
C’est à rapporter, éventuellement, à l’école Récentiste qui postule que l’Histoire n’est pas telle qu’on la croit, que la chronologie des événements diffère et que les faits sont autres.
Murcie, en effet, incline vers la paroisse, la cité, Rabelais, les Catholiques, les Armagnacs… Ce doit être, j’imagine, mon côté guelfe qui me le fait apprécier.
Il est rare que des héroïnes soient aussi cruelles et déterminées. Pourquoi avoir choisi une femme pour incarner Murcie ?
Pour le romanesque d’abord – rien de mieux qu’une jeune femme dépravée et nostalgique, qui, bien raisonnablement, n’admire rien ni personne.
Elle n’est pas de Murcie. Elle en fut, à un moment de sa vie.
Elle a, pour reprendre à nouveau Eliade, « ce goût de la vanité des choses qui pénètre tout [son] être, circule avec [son] sang. »
Le « poids de l’Histoire » l’ennuie. Pour s’en affranchir, alors que d’autres cherchent un ou le temps sacré, elle se plaît dans la pose, le geste, la somptueuse futilité, dans l’instant pop. La différence n’est d’ailleurs pas là de nature, mais de degré.
Certains, férus d’archétypes, pourront y trouver un avatar de l’éternel féminin. Lequel ? Je leur laisse le plaisir de choisir.
Votre livre est émaillé de références musicales, avec un goût prononcé pour le post punk et le néo-folk. Quelle est l’influence de la musique sur votre écriture ? Participe-t-elle de l’élaboration de votre style ?
Malgré des incursions plus ou moins longues dans le Classique ou l’Industriel, je ne me suis jamais vraiment dépris du post-punk. Joy division, la plupart des groupes Factory, Section 25, The Wake, The Names…, m’importent. Sans omettre Minimal compact ou encore The Sound… ou, tout autrement, les Byrds.
J’écris, oui, avec ces musiques. Je ne saurais sans.
Vous êtes également l’Altmeister des éditions Alexipharmaque, comment devient-on éditeur ? Pourquoi avoir choisi ce chemin difficile ?
S’il est une chose que je crois savoir faire, c’est rechercher des livres et lire, tout le temps, de tout, en quantité. Devenir éditeur est peut-être une manière de rendre un rien utile une telle obsession.
Cercle Curiosa http://www.voxnr.com/cc/dt_autres/EFZyFZkuFlBZTBuEbd.shtml
Notes :
Arnaud Bordes, Pop Conspiration, récit, 12 euros, Auda Isarn, http://www.reflechiretagir.com/auda.html