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Allende, apprenti dictateur

Le mythe politique de Salvador Allende est déjà en partie effondré. De plus en plus de gens sont amenés à reconnaître que son action politique a été désastreuse. Aux yeux de la gauche, il restait cependant un héros, non en raison de ses hauts faits mais parce qu'il avait été "victime" de la dictature. La statue du héros est cependant de plus en plus lézardée.

Beaucoup ont compris que l'arrivée au pouvoir de Salvador Allende avait été une catastrophe pour le Chili. Après avoir été porté au pouvoir par une minorité d'électeurs, il en fut chassé par la grève générale et par les ménagères descendues dans les rues en tapant sur des casseroles. Car dès que le socialisme arrive au pouvoir, les gamelles se vident.

La statue est lézardée

Malgré tout, le héros malheureux, mort les armes à la main en luttant contre la dictature, ou suicidé (la version officielle a varié), restait un exemple aux yeux de la gauche. Comment l'auteur d'un désastre politique et économique peut-il rester un héros moral, c'est l'un des mystères de la pensée "progressiste". Mystère d'autant plus épais que les tenants de cette pensée sont les héritiers du marxisme, idéologié matérialiste qui subordonne les vertus morales aux faits tangibles.

Mais si le Vatican met des années, parfois des siècles, pour instruire les procès en canonisation, la gauche est moins regardante quand il s'agit de peupler son panthéon. Et elle rejette volontiers les avocats du diable du côté obscur... C'est ce qui fait dire à Victor Farias, auteur d'Allende, la face cachée : "On finit par croire que les problèmes moraux passent inaperçus à leurs yeux quand il s'agit d'excès commis par un des leurs".

L'auteur se livre à une analyse qui éclaire les idées et la vie d'Allende. Travail assez ingrat car non seulement Allende n'a cessé de mentir sur son propre compte, mais encore ses écrits sont confus. V. Farias décortique en particulier la thèse du jeune médecin que fut Allende. Cette thèse bâclée, intitulée "Hygiène mentale et délinquance", fourmille de citations tronquées, non attribuées ou citées sans guillemets, dont il a retrouvé la provenance.

Allende, médecin de la honte

Cette thèse est imbibée des idées matérialistes véhiculées par la vulgate marxiste et répandues par la franc-maçonnerie qui avait grandement contribué à constituer la faculté de médecine chilienne. Les idées qu'Allende reprend à son compte dérivent d'un souci hygiéniste légitime, mais rendu fou par le matérialisme le plus grossier. Cherchant des causes matérielles aux fléaux moraux, Allende les trouve dans la physiologie, et au bout du compte dans la race, par un déterminisme qui laisse peu de place à la destinée individuelle.

"Les Juifs se caractérisent par des formes déterminées de délit : escroquerie, fausseté, calomnie, et surtout usure", écrit-il, ajoutant plus loin : "Les Gitans constituent habituellement des groupements délictueux où règnent la paresse, la colère et la vanité." Des Arabes, il dit que "s'il y a quelques tribus honnêtes et travailleuses, la plupart sont aventureuses, imprévoyantes, oisives et portées au vol". Même les membres du parti national-socialiste chilien de l'époque (nous sommes en 1933) n'allaient pas si loin, professant un antisémitisme culturel et non purement et simplement raciste !

Allende adopte d'ailleurs l'idée d'une hérédité toute-puissante avec autant de naïveté que Zola dans Les Rougon-Maquard. Et il écrit :

"L'hérédité est une loi biologique qui régit depuis les êtres les plus simples, les végétaux unicellulaires, jusqu'aux animaux les plus perfectionnés."

L'eugénisme en folie

Après avoir affirmé que l'appartenance à une race est en soi un facteur de délinquance, elle-même considérée comme une maladie, et que l'hérédité est une cause déterminante, Allende déclare : "Le malade infecté, on l'isole. Le malade rebelle au traitement, on l'incarcère. Le malade dégénéré, on lui interdit ? au nom de la société et pour son seul bénéfice, une grande partie de ses activités." Notons que pour Allende, alcoolisme, homosexualité, délinquance, sont diverses formes de folie qui relèvent d'un traitement médical. Et quel traitement !

Ministre de la Santé dans le gouvernement de Front populaire (1939-1941), Allende rendit obligatoire un certificat d'absence de maladie vénérienne des futurs conjoints, faute de quoi le mariage ne pourrait être enregistré. Son programme comportait la "stérilisation des aliénés mentaux", dispositif qui sera l'un des instruments de "défense de la race avec un aspect coercitif composé par des mesures eugéniques négatives".

Si, en 1973, Allende instaura au Chili une véritable dictature marxiste, ce ne fut pas sous la pression des événements, pour résister aux complots ourdis par le grand capital ou par la CIA. Ce fut par une sympathie déjà ancienne pour la dictature en tant que telle. Dans un entretien avec Régis Debray, en 1971, Allende qualifie ainsi la dictature d'Ibanez, qui sévissait dans sa jeunesse, de "dictature molle". Or Ibanez était au mieux avec l'Allemagne nationale-socialiste, et son intendant pour la province de Valparaiso fit par exemple noyer une centaine de personnes dans la mer parce qu'elles étaient homosexuelles.

Autre signe de complaisance avec le National-socialisme, son refus (par un usage illégal d'une prérogative présidentielle) de laisser extrader l'ancien S.S. Walther Rauff. Or celui-ci aurait accordé à Allende des subsides pour financer son élection au Sénat en 1969 dans les provinces du sud. Dans ces provinces se trouvaient les conserveries administrées par Rauff. Allende lui-même était actionnaire et directeur général d'une société de salpêtre, industrie concentrée dans le nord dont il était devenu sénateur en 1953. C'est toute une partie de la vie d'Allende, celle de représentant du grand capital chilien, qui apparaît ainsi par morceaux au grand jour et reste en grande partie à explorer.

La grande tradition totalitaire

En se montrant raciste et antisémite, Allende ne "trahit" pas la gauche, et n'adopte nullement un point de vue "réactionnaire". Les opinions racistes qu'il professe découlent non du nationalisme, du conservatisme ou d'un esprit réactionnaire, mais du matérialisme, enfant du marxisme. Notons en passant qu'avec la question habirou, Marx avait lui-même apporté une pierre de belle taille à l'édifice de la littérature antisémite.

Quand Allende écrit : "La bienfaisance d'hier est l'assistance sociale d'aujourd'hui; la nécessité collective a assujetti la bonté personnelle", il ne manifeste pas un esprit conservateur. Il rejette au contraire toutes les valeurs traditionnelles de charité, de compassion, que la gauche répudie volontiers sous le nom de "paternalisme" ou qu'elle qualifie "d'opium du peuple". Les valeurs spirituelles sont remplacées par un utilitarisme glacé.

Les idées matérialistes et positivistes du XIXe siècle n'ont pas été développées par la droite, mais par la gauche. Ce matérialisme donne aux phénomènes moraux, sociaux ou spirituels des causes matérielles. Pour Marx, ce seront des causes économiques ; pour Freud, des causes sexuelles. Les causes de la criminalité, Allende les cherche dans la physiologie, et donc, finalement, dans la race. S'il se rapproche ainsi du national-socialisme, ce n'est pas par la voie du nationalisme, mais par celle du socialisme.

Ce n'est pas une "dérive droitière" qui a conduit Allende au racisme, à l'antisémitisme ; ces idées ont été chez lui les conséquences des idéologies "progressistes". L'auteur met en parallèle l'eugénisme d'Allende et celui de l'Allemagne nationale-socialiste. Mais doit-on rappeler qu'aujourd'hui, en France, l'avortement "thérapeutique" est autorisé sans limite de date, autrement dit, jusqu'au neuvième mois de grossesse ?

Comprendre enfin l'histoire

La conclusion du livre mérite d'être citée en grande partie tant elle met le doigt sur un point essentiel, constamment occulté, qui rend presque impossible la compréhension de l'histoire du XX" siècle. Après avoir observé que "beaucoup opteront pour le silence et l'oubli", V. Farias écrit : "D'autres verront ici l'expression des analogies patentes entre socialisme et national-socialisme, entre communisme et fascisme, unis non seulement par un naturalisme biologique radical, mais aussi par leurs méthodes criminelles."

Victor Farias, "Allende, la face cachée : antisémitisme et eugénisme", Grancher, 250 p. 20,50 €.

Pierre de Laubier Français d'Abord août 2006

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