« Il n’y a que les Prépas qui ont encore de bons résultats », déclare une intervenante aux Grandes gueules sur RMC ce lundi 9 décembre, et poursuivant : « il faut que l’on arrête de niveler par le bas », à propos des projets de M. Peillon, ministre provisoire de l’Education nationale en attente d’un siège au Parlement européen en mai prochain… et dont la réforme est en train d’affaiblir les fameuses classes préparatoires françaises, au moment même où les classements internationaux comme « Pisa » montrent le déclin accéléré du niveau éducatif de notre pays !
Ce matin, les collègues des classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) du lycée Hoche étaient en grève et distribuaient des tracts à la porte de l’établissement pour dénoncer le sort qui leur était réservé par ce gouvernement qui, de plus en plus, semble n’avoir de cesse que de détruire ce qui marche et de décourager ceux qui prônent l’excellence et l’espérance plutôt que la défiance et l’assistanat. C’est aussi ce que dénonçait Jacques Julliard dans son article de samedi dernier publié par Marianne, à la suite de nombreux autres textes rédigés par des professeurs ou d’anciens élèves de Prépas, comme celui de Camille Pascal dans Valeurs actuelles de jeudi dernier et affiché ce matin dans la salle des profs du Couvent de la Reine, au milieu de quelques autres et de papiers administratifs.
Le tract des collègues, en quelques lignes, résumait bien la situation et allait plus loin que la seule défense de leurs propres intérêts, en soulignant que les professeurs de lycée étaient aussi concernés par une prochaine baisse de leurs revenus, alors même que nos salaires (je dis « nos », car je suis dans ce cas qui est celui de tous mes collègues de l’enseignement public…) sont, depuis 3 ans, « gelés » (ce qui, dans mon cas personnel, ne me gêne pas mais qui peut affecter les professeurs chargés de famille et dont les frais, eux, ne cessent d’augmenter…), que le gouvernement soit de droite ou de gauche, d’ailleurs : sans doute la « continuité républicaine »…
« Vincent Peillon ne cache pas son hostilité au système des prépas. Nous sommes pourtant convaincus qu’il permet chaque année à des milliers de jeunes gens de progresser et de réussir, c’est pourquoi nous y sommes très attachés. Notre inquiétude est grande quant à l’avenir de ces filières d’excellence au sein desquelles nous sommes pourtant fiers et heureux de travailler. » : le tract évoque là le vrai souci, celui de la disparition possible (et souhaitée par certains…) des classes préparatoires considérées comme « des lieux de reproduction sociale » par les égalitaristes de tout poil, à la fois jaloux de l’excellence des élèves sélectionnés pour y entrer et des rémunérations de ceux chargés d’encadrer et d’instruire ceux-ci.
Et pourtant ! Tout le monde sait bien que, si la France veut encore jouer un rôle dans les années prochaines au sein des grandes nations, il faut préparer les nouvelles générations et former des élites, ce dernier mot étant hypocritement honni par ceux qui nous gouvernent actuellement et, j’espère, provisoirement. Alors que de nombreuses universités ont désormais du mal à assumer leurs fonctions traditionnelles de transmission du savoir et de l’expérience, n’ayant pas la possibilité de filtrer les entrées en leur sein malgré l’effondrement du niveau des bacheliers depuis quelques décennies déjà (le problème était ainsi évoqué au milieu des années 1980 au Conseil d’administration de l’université de Rennes-2, conseil au sein duquel je siégeais en tant qu’élu étudiant !), et au lieu de s’inspirer des réussites des classes préparatoires, le ministère de la République préfère, par paresse intellectuelle et aussi par lâcheté vis-à-vis des pédagogues qui continuent de faire la loi, leur Bourdieu en poche et leur suffisance en bandoulière (tel ce Meirieu qui empoisonne l’éducation en France depuis tant d’années…), s’attaquer aux quelques milliers d’enseignants de CPGE, traités d’ « aristocrates » (sic !) comme aux temps sombres de la Révolution française, celle-là même que M. Peillon, déclarait n’être « pas terminée » dans son livre de 2008, véritable manifeste républicain qu’il veut, désormais au Pouvoir, appliquer pour le pire plus que pour le meilleur…
Danton aurait-il lui-même trouvé grâce aux yeux de M. Peillon ?
En écoutant il y a quelques jours Vincent Peillon s’exprimer à la radio avec ce ton si déplaisant et arrogant et affirmer qu’il ne céderait pas devant la colère des enseignants, un collègue haussait les épaules et lançait, dans un souffle rageur, ce qui me semble bien résumer la situation : « la République n’a plus besoin de professeurs, juste d’ordinateurs ! ». Julliard, dans Marianne, ne disait, en d’autres termes, pas autre chose…
Et si, nous les professeurs, nous en tirions enfin les conséquences politiques ? Tant pis, alors, pour la République…
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